Isabelle Juppé, directrice déléguée au développement durable chez Lagardère et auteur de "La femme digitale" nous explique les effets de la révolution numérique - Intro
L'imagination contribue peu à l'enrichissement graduel de cet intime butin. Notre cerveau n'est qu'un prisme et n'a guère la faculté de créer mais il possède la faculté de capter, puis d'évoquer; il donne ainsi le change. L'imagination, qui devrait dominer, n'est en nous que la Cendrillon de notre mémoire.
Un matin, j'étais passée devant l'escalier comme des fleuristes ornaient chaque pilier de magnifiques fleurs blanches, des hortensias si ma mémoire est bonne. Le soir, en repartant, juste avant le dîner officiel, j'avais été étonnée de voir qu'elles avaient disparu, remplacées par d'autres compositions florales... Que s'était-il passé ? En fait, l'invité d'honneur était le Premier ministre vietnamien, et quelqu'un s'était souvenu dans la journée qu'au Vietnam le blanc est signe de deuil ! On avait frôlé l'incident diplomatique... L'art de réussir une opération protocolaire consiste justement à éviter de tels dérapages...Les « Grands » ne se rendent en général pas compte de ces mille et un détails si importants.
C'est une banalité de dire que les hommes qui nous gouvernent ont une vie de fou. Mais on ne mesure pas assez à quel point c'est une réalité... et combien eux-mêmes en sont de plus en plus éloignés. Ils n'ont même plus le temps de prendre le temps.
Je crois que la théorie du réflexe de Pavlov s'applique à tous, y compris dans les allées du pouvoir. Si tous les matins vous avez eu l'habitude de trouver votre petit déjeuner servi avec vos journaux favoris sur un plateau d'argent, et qu'un beau jour vous soyez obligé d'aller dans la cuisine, de ne pas y trouver de pain frais et d'entendre une voix autoritaire vous crier : « Pour le café, la cafetière est dans le placard du fond, pour le journal, il y a un kiosque au bout de la rue », comment réagiriez-vous ? Mal sans doute, malgré vous.
Quand elles existent, certains ambassadeurs étant célibataires. Soit célibataire par vocation, soit « célibataire géographique », poétique appellation pour les hommes mariés mais partis seuls en poste pour des raisons diverses. Chez nous, en France, contrairement aux autres pays qui ne connaissent que la dénomination « épouse de », le terme « ambassadrice » désigne bel et bien l'épouse de l'ambassadeur, les rares femmes elles-mêmes ambassadeurs se faisant appeler « Madame l'Ambassadeur ».
Quand de graves crises internationales éclatent, là encore, le téléphone et le contact direct entre ministres priment sur toute autre forme d'action diplomatique. Mais rien ne serait possible sans les ambassadeurs immergés dans la vie quotidienne, la vie politique et « l'opinion » des pays étrangers. Ce sont eux qui assurent la continuité de la politique française sur place et établissent les réseaux de contacts indispensables à la connaissance d'un pays.
Certes, l'habit ne fait pas le moine. Mais le « grunge » ne fait pas non plus la femme de ministre. Peut-on arriver en jean et baskets au Quai d'Orsay ? Peut-on débarquer en visite officielle à l'étranger en blouson de cuir et bottes de cow-boy ? En théorie, oui. Aucun article de la Constitution, aucun principe général du droit, aucun règlement, aucun décret, aucun arrêté ministériel ne l'interdit.
L'habitude d'être servi, obéi, rarement contesté (les collaborateurs les plus précieux sont d'ailleurs ceux qui ont réussi à garder leur esprit critique), et craint. Certes, l'époque des empereurs romains est révolue, et l'on ne jettera pas aux lions le cuisinier qui a raté son soufflé au fromage, mais le pouvoir impressionne toujours.
Les hommes, au fond, sont à peu près tous les mêmes. La femme qui les accompagne, ils la préfèrent plutôt bien habillée que vêtue comme l'as de pique. Assez bien vêtue pour flatter leur orgueil, mais pas trop, pour ne pas attirer de regards inopportuns ! Subtil équilibre à trouver...
S'il est un pays où la table est l'un des piliers de la diplomatie, c'est bien chez nous, en France. L'art de la table reste en effet typiquement français. Aux quatre coins du monde, un bon repas, comme on sait, facilite les contacts, détend l'atmosphère et laisse de bons souvenirs.