Je n`ai jamais fermé un livre en me disant que j`allais écrire un livre mais de nombreuses lectures ont été des chocs et ont probablement influencé mon écriture.
« L`Agneau carnivore » d`Augustin d` Augustin Gomez Arcos qui date des années 1980 et qui est dans la veine de « Cent ans de Solitude» de Gabriel Garcia Marquez mais en plus pointu. Il y a une vraie beauté de langue, une violence inouïe et une liberté absolue. On est dans le plus pur romantisme de la littérature.Un tel livre n`existe pas. Chaque façon de raconter une histoire peut être merveilleuse. Le livre qui arrêtera les autres n`existe pas.
Ça a été « La Comtesse de Cagliostro » de Maurice LeBlanc que j`ai découvert à l`âge de 11 ans en pension. On m`y interdisait de le lire comme je le raconte malicieusement dans le roman ! C`est un livre merveilleux que j`ai lu en un week-end. C`était également un éveil sexuel à l`époque. Et je pense que c`est un livre à redécouvrir. La femme est un bandit de 30 ans qui a pris un gamin qui en a 16 et qui le forme pour en faire un voleur et un amant. C`est n`est pas forcément bien écrit mais quel livre !
La trilogie de Lynda La Plante (« Sang froid », « Coup de froid », « Cœur de pierre ») qui met en scène Lorraine Page, une flic alcoolo qui est un peu l`équivalent féminin de Matt Scudder dans « Huit million de façons de mourir » de Lawrence Block. C`est quand même ce que l`on fait de mieux dans ce genre de personnages. Ils vous hantent longtemps.
C`est dans la famille des polars mais ça raconte une histoire formidable : la fille est alcoolique, elle est privée de ses enfants, elle a tué un môme. C`est traité comme un thriller mais ça pourrait être un roman de Jean-Paul Dubois ! Je me moque de l`étiquette « thriller » comme des étiquettes en général. Ce qui compte ce sont les personnages, c`est d`eux dont on se souvient.
Il y a également un livre vraiment inclassable de Lou Durand qui s`appelle « le Grand Silence » que j`ai du lire une bonne dizaine de fois. C`est l`histoire d`un gamin qui a le défaut d`entendre les pensées des gens et qui en devient fou. Il part alors dans le grand blanc en Alaska pour fuir mais les gens le savent et essaient de le rattraper. C`est un thriller poétique avec une liberté d`écriture extraordinaire.
Enfin, Jean Follain est un poète que j`aime beaucoup et que je relis souvent. Il avait une écriture élégante et magnifique.
Michel Houellebecq, je ne l`ai encore jamais lu et j`en ai honte… Enfin, ce n`est pas vraiment de la honte mais je suis quand même un peu embarrassé ! Je compte tout de même le lire prochainement.
Laura Kasischke. Elle commence à être connue mais je la lis depuis le début et c`est vraiment magnifique.
Les Trois Mousquetaires d`Alexandre Dumas Père.
Spontanément je dirais « Aimez-vous les uns les autres ». C`est très naïf mais c`est quand même ce qu`il y a de plus beau. Et cette phrase a 2000 ans. Elle tient quand même bien la route !
Je lis trois livres. « Le Passager » de Jean-Christophe Grangé, « Occupée » de Laure Buisson et « Les îles » de Philippe Lançon. Je suis sur les trois en même temps. J`essaie de lire beaucoup et j`achète tous mes livres. Je trouve ça important. Il faut arrêter avec la gratuité. Quand tu achètes quelque chose, tu le respectes.
Non il n`y a pas de pression. C`est uniquement du plaisir car cela veut dire que le livre touche, modestement, beaucoup de gens.
Il y a beaucoup de passages très romancés. Le personnage d`Annie Vachon -dont on me demande parfois les coordonnées ! - est une totale fiction et mon frère n`est pas du tout autiste par exemple mais il n`empêche que j`ai créé des personnages pour raconter une histoire autour du langage, autour des mots, autour du don et de ce qu`on fait de cette tragédie qui est celle d`être désigné « écrivain de la famille ». Il faut parfois passer par des choses très romancées pour dire la vérité. Ce n`est pas parce que quelque chose n`est pas vrai que ce n`est pas vraisemblable.
Pour les passages sur la publicité, je me suis inspiré de ma vraie trajectoire parce que je la connais bien et que ça me permettait de raconter le monde de la pub autrement que d`autres. De plus, ça m`intéressait de raconter comment se fabrique une campagne de pub mais je cite de vraies marques et je ne pouvais donc pas dire n`importe quoi. Les nombreuses anecdotes sont vraies.
Je ne sais pas si c`est le plus dur mais le plus intéressant c`est d`arriver à un point d`honnêteté qui fasse que le lecteur ait du plaisir et qu`il trouve une vraie sincérité dans le livre.
J`avais envie d`écrire depuis très longtemps mais j`attendais le moment d`être plus mûr. J`avais envie de raconter quelque chose qui puisse intéresser les gens. Écrire pour écrire ne m`intéressait pas, donc j`ai attendu. J`ai attendu d`être prêt moralement et physiquement, prêt pour un échec ou une réussite, prêt à la méchanceté des gens… Mais j`ai toujours eu envie d`avoir la possibilité d`écrire un livre, et d`en écrire un deuxième.
Il devrait sortir fin janvier, début février. J`espère que tous ceux qui ont aimé celui-là aimeront le prochain. On verra ensuite si le livre élargira l`audience ! Il a été écrit avant que le premier ne sorte, donc sans véritable pression même si le deuxième roman est toujours compliqué. Il y a une insouciance dans les premiers romans qu`il n`y a plus dans les deuxièmes et j`avais très peur en soumettant mon deuxième texte de décevoir, de n`être que « l` homme d` un coup » . Dans la théorie on construit un auteur et pas seulement un livre. Si on construit un livre, il faut reconstruire à chaque fois, repartir de zéro. Pour un vrai auteur, un jour on attend son livre.
Pour ce roman, je n`ai pas eu le sentiment de tout dire, ni de penser à une éventuelle « carrière ». Il n`y a pas de calculs. Certains auteurs ont font sûrement mais j`ai écrit ce livre, qui m`a plu, en mettant beaucoup d`énergie. Mais on ne met jamais tout. Il y a une vie à côté.
Plus généralement, Je crois qu`on doit construire des auteurs et ne pas faire qu`un livre. Un seul livre, cela n`intéresse pas un éditeur de toute façon. Ce qui est intéressant c`est le travail de longue haleine. Un lectorat, c`est quelque chose qui se construit, qui se gagne, qui se rassure. Mais c`est payant à l`arrivée : David Foenkinos, par exemple a eu une traversée du désert importante avant de connaître un succès important aujourd`hui et Delphine de Vigan est montée en puissance jusqu`à « No et moi » où elle a eu une sorte d`apogée qu`elle retrouve décuplée aujourd`hui avec son livre merveilleux « Rien ne s`oppose à la nuit ». Il faut du temps pour construire une œuvre.
Ce sont deux modèles d`écriture différents, mais le cadeau de la pub c`est de m`avoir appris à « découenner le jambon », à enlever le gras, à éviter les mots qui "s`écoutent écrire", à essayer d`aller directement au but. Moi j`aime les chapitres courts que l`on retrouve dans la littérature anglo-saxonne. Des choses très maitrisées avec un vrai rythme. Tout ce qui fait que quand tu rentres dedans, tu as envie de continuer.
Les gens savent ce que c`est que d`aimer, ils savent ce que c`est que d`avoir faim ou d`avoir peur et tu n`as donc pas besoin d`insister.
En outre, je pense que l`époque se prête plus aux formats courts. On est plus dans le zapping, dans une sorte d`impatience.
C`est quelque chose que j`ai appris dans la pub peut-être mais certainement dans la vie : tout ce qui est trop drôle ou trop triste n`est pas intéressant. C`est le mariage des deux qui compte. Il faut toujours surprendre et ne pas trop s`installer dans l`émotion ou dans la blague. Il faut les deux. Parfois tu prends la blague pour être très émouvant et l`émotion pour être drôle. Les gens aiment beaucoup cela je pense.
Je voulais suivre un gamin jusqu`à l`âge adulte et j`ai pris les décennies qui m`amusaient par rapport à l`histoire que je voulais raconter. Les films, les musiques, les livres qui sont cités c`est une toile de fond qui m`a marqué, qui m`a touché. Il y avait une sorte d`élégance de la désinvolture dans les années 1970. Les femmes étaient belles, elles fumaient…
Parce que c`est très cinématographique. Il y a une esthétique de la clope. Elle représente la libération de la femme. En 1978, il y a l`avortement. Les femmes fumaient, buvaient, commençaient à avoir des amants. Les années 1980, c`est la décennie du Sida. En 1990 c`est l`âge adulte du monde dans lequel on vit aujourd`hui. Les époques sont constitutives de qui on est plus que la politique par exemple. Les chansons sont l`histoire sociologique de notre pays.
C`est dur d`être des parents. On n`apprend pas à aimer, on n`apprend pas à faire des enfants, à les éduquer ou à les aimer. On a des enfants au moment où on est un homme ou une femme, où on doit réussir. On a des enfants qui veulent être aimés… Je pense que tout cela forme un gigantesque chaos et qu`au final la cellule familiale est très violente. Alors, elle est régie par la morale : « tu es mon fils, donc je t`aime ». Mais moi j`ai le droit de ne pas aimer mes enfants. L`enfant n`est en effet pas toujours aimable et on n`est pas obligé d`aimer.
Je trouve que la famille est un endroit d`amour extrêmement compliqué.
Je voulais aussi qu`on se souvienne que, pour ma génération, nos mères étaient des militantes dans une période assez chaotique pour les familles. Pour les enfants de la guerre qu`étaient nos parents, c`était difficile de construire une famille.
Les femmes ont réinventé le monde dans les années 1970. Il n`y a qu`à voir les films de Claude Sautet qui sont des bijoux de psychologie féminine et dans lesquels les femmes sont exceptionnelles.
Il y a peu d`auteurs ou de réalisateurs qui ont le courage de mettre les femmes en avant.
Qui est l'auteur du roman ?