Un fil à la patte de Georges Feydeau
"Avec de la paresse et de l’entêtement, on est toujours sûr d’arriver à quelque chose"
LUCIENNE : Mais enfin, monsieur, je ne vous connais pas.
PONTAGNAC : Mais moi non plus, madame, et je le regrette tellement que je veux faire cesser cet état de choses...
Qu’est-ce que ça prouve, le mari ! Tout le monde peut être mari ! Il suffit d’être agréé par la famille... et d’avoir été admis au conseil de révision ! On ne demande que des aptitudes comme pour être employé de ministère, chef de contentieux. Tandis que pour l’amant, il faut l’au-delà. Il faut la flamme ! C’est l’artiste de l’amour. Le mari n’en est que le rond de cuir.
Ma seule gymnastique c'est d'aller aux enterrements de mes amis qui faisaient de la gymnastique pour rester en bonne santé.
“YVONNE, sur un ton larmoyant. — Comment as-tu pu te laisser aller à l’appeler chameau?
LUCIEN, a un geste vague, puis, comme le meilleur argument du monde. — Je ne pensais pas qu’elle mourrait!”
Dufausset. — Et moi qui croyais être chez des fous…
Pacarel. — Hein ?
Dufausset. — Dame ! C’est vrai, on vous trouve là, tous, sur des chaises, sur la table ou dans le piano… On aurait cru que vous jouiez au chat perché… en musique.
Landernau. — On vous faisait une entrée.
Amandine. — Plaignez-vous donc…
Dufausset. — Ah ! c’était pour… quelle drôle de façon de recevoir !
Amandine. — Ce jeune homme m’a regardée.
Dufausset. — Comment, vous êtes M. Pacarel… Enchanté ! Ah ! à propos, j’ai une lettre pour vous, elle est au fond de ma malle…
Pacarel. — De Dufausset… Ah ! ce cher ami… Il va bien Dufausset ?
Dufausset. — Admirablement ! Il va admirablement, mon père.
Pacarel. — Pourquoi m’appelle-t-il son père ? Il a dû être élevé chez les Jésuites, (Remontant vers les siens.) Eh ! bien, comment le trouvez-vous, mon ténor ?
Amandine. — Majestueux !…
LUCIENNE: Allez, vous êtes tous les mêmes, vous autres célibataires.
VATELIN: Célibataire, lui! mais il est marié.
LUCIENNE: Non!
VATELIN: Si!
LUCIENNE: Marié! vous êtes marié!...
PONTAGNAC (embarrassé): Oui... un peu!..
LUCIENNE: Mais c'est affreux!
VATELIN: Vous trouvez?
LUCIENNE: Mais c'est épouvantable!... Comment se fait-il...
PONTAGNAC: Oh! bien! vous savez ce que c'est!... un beau jour, on se rencontre chez le Maire... on ne sait comment, par la force des choses... Il vous fait des questions... on répond "oui" comme ça, parce qu'il y a du monde, puis quand tout le monde est parti, on s'aperçoit qu'on est marié. C'est pour la vie.
(Acte I, scène 2)
Moricet. - Oh ! alors... A propos, je te remercie de la façon dont tu as rangé mon volume.
Duchotel, descendant à gauche. - Ah ! Tu l'as trouvé ?
Moricet. - Oui ! sous le bahut !
Duchotel, comme d'un air tout naturel. - Ah ! oui... oui... en effet, c'est moi qui l'ai mis pour remplacer le pied... Je n'avais rien d'autre sous la main... (Aimablement.) Comme quoi un livre sert quelquefois à quelque chose.
Acte I, scèneVIII
LUCIENNE : Marié ! vous êtes marié !...
PONTAGNAC : Oui... un peu !...
RÉDILLON : Une femme qui trompe son mari n'a pas l'habitude de lui envoyer des cartes d'invitation. (...) Si elle le fait, c'est qu'elle a une raison ! celle d'exaspérer la jalousie de son mari. (...) Ne voyez-vous pas là la comédie d'une femme outragée qui se venge ! (...)
VATELIN : Oui !
RÉDILLON : Enfin, j'en sais quelque chose, puisque c'est à moi qu'elle est venue proposer le rôle... que j'ai refusé (À part) et pour cause !...
VATELIN : Ah ! mon ami ! mon ami !
RÉDILLON : Et vous avez donné dans le panneau... Ah ! vous n'êtes guère tacticien !
VATELIN : Je suis avoué.
RÉDILLON : Voilà !
VATELIN : Ah ! que je suis content !... (Sanglotant) que je suis con... on... tent ! Ah ! là ! là !... Ah ! là ! là !
RÉDILLON : La joie fait peur !