À peine a-t-elle dépassé les portes d’entrée automatiques, qu’elle est freinée dans son élan par un
jeune membre du personnel. Joli garçon à la barbe de quatre jours, il arbore fièrement une longue
blouse blanche.
– Woh ! Woh ! Woh ! Et elle va où comme ça ?
– Hé ? Poussez-vous ! Je viens voir mon grand-père !
– Ca, j’en suis persuadé ! Mais votre tenue n’est pas convenable pour entrer ici.
– Convenable ? C’est qui ici ? Le Ritz ? C’est une maison de retraite à la con ! Laissez-moi passer !
– Houla ! Houla ! Pas un pas de plus, mademoiselle ! Je suis certain que votre papy serait ravi d’avoir
de la visite, mais si vous entrez là-dedans dans cette tenue, vous allez faire exploser les pacemakers
de tous nos résidents !
– Non… en fait. J’ai besoin d’un conseil. Un conseil de filles.
– Oh ! Mon dieu… je t’écoute.
– Voilà. Ce matin, j’ai rencontré des Anglais, des Français, des Américains et… il y avait un garçon dans
le lot…
– Oh, merde ! Ce genre de conseils…
– Oui, ce genre-là.
– Déjà, arrête de vernir tes ongles de pieds parce que c’est ridicule. Primo, tu ne mets que des
souliers et des chaussures à la con. Deuzio, si tu vernis tes pieds tu devras les mettre en valeur avec
des chaussures ouvertes et je sais que ce n’est pas ton truc. Tertio, si tu mets du vernis en espérant
être belle au moment de passer à l’acte, tu perds ton temps, les garçons, quelles que soient leurs
nationalités n’en ont pas après tes pieds.
Catherine, l’air blasé, pose le flacon de vernis sur la table basse devant elle et se met à jeter les bouts
de ouates coincées entre ses doigts de pieds.
– Putain maman ! Pourquoi tout est si nul ?
— On s’est aimés tellement fort, Elisha. Tu peux me croire. Tout le monde au sein du clan Carlone le savait. Notre histoire d’amour a fait passer Roméo et Juliette pour un simple plan cul. […]
– Peter… tu veux savoir pourquoi j’ai l’impression que tous ces parfums puent ? Tu veux que je te dise pourquoi j’avais tout le temps la nausée ces trois derniers mois ?
– Ne me dis pas…
– Oui ! Je suis enceinte, enfoiré ! Et c’est peut-être bien toi le père !
-Moi ? Mais c’est impossible ! Il y a quatre mois…
– On baisait à l’hôtel, toi, moi et ta chère princesse !
Un homme en érection ne peut prononcer clairement que deux mots : oui et encore.
Au-delà de ça, c’est du yaourt. Encore en-dessous du charabia.