Il parlait bas, de préférence en face-à-face, avec une très légère pointe d'accent, seul héritage de sa jeunesse bordelaise. L'homme que deux Présidents avaient chargé - entre autres - d'ausculter la France était d'ailleurs à demi sourd, depuis sa prime enfance, sans que la plupart de ses interlocuteurs l'aient jamais remarqué. Jacques Pilhan faisait parler les autres. Son jardin très secret était celui du psy et non celui de l'homme de pub. Il avançait à bas bruit. C'est en écoutant les autre qu'il leur faisait les poches. Parler peu. Parler bas. Laisser entendre. Faire semblant d'en savoir davantage et d'être déjà au courant, même quand ce n'était pas vrai. Et, pour ce qui le concerne - règle de base du métier -, en dire le moins possible, se contentant d'observer avec ses grands yeux enfantins qui lui mangeaient le visage, dès lors qu'il avait choisi de séduire et non pas de tuer.
Il rappelle qu'un homme sans parole est un roi plein de misère. Il souligne enfin que l'exercice de communication ne consiste pas à plaquer du faux sur du vrai, ou du factice sur du réel, mais à donner à voir ou à entendre - donc à comprendre - ce qui sans lui, ne serait qu'accumulation de sons ou d'images, privée de cohérence.
En politique comme en amour, on ne sort de l'ambiguïté qu'à ses dépens