Edmond-Louis de Taeye

Le symbolisme existera aussi longtemps que l'homme aura une religion ou que l'art aura pour mission de représenter une idée ou un sentiment soit sous des formes frappantes directes, soit sous des formes conventionnelles qui éveillent certaines idées ou certains sentiments.
Contrairement au naturalisme qui dissèque les détails, le symbolisme généralise des idées larges, synthétise des rêves, restaure la subjectivité. Le symbole habille l'idée, la passion, l'époque d'une forme sensible et les caractérise avec ses grands attributs. Il matérialise l'invisible, traduit la retraite au plus profond de l'être humain aux diverses époques de l'humanité, suit de près l'évolution de l'idée religieuse.

Jeune et actif, Portaels ne perdait d’ailleurs pas une minute. Il a successivement visité le Maroc, l’Algérie, l'Egypte, le Liban, la Judée, l'Espagne, la Hongrie et la Norvége, Chose curieuse, c’est dans ce dernier pays et dans le Liban, que l’artiste a éprouvé les plus fortes sensations d'art. Cependant il s’est longtemps attardé en Hongrie à étudier le type étrange des Madgyars, des Bohémiens, Zingaris ou Gitanos qui y promènent sans cesse leurs pittoresques hordes vagabondes.

Chaque peuple, chaque race, chaque pays a sa physionomie, son caractère
et son style. Toujours l’artiste s’est, évertué de les rendre mais en les poétisant. Il ne reculait devant aucun obstacle. Ainsi, au Maroc, où il resta six mois, Portaels, malgré la loi de Mahomet qui défend formellement la représentation humaine, se procurait les plus beaux modèles du pays — grâce, il est vrai, à un certain personnage moins sensible aux principes du Koran qu’à la soif de l’or. Ce jeu dangereux occasionna à l’artiste plus d’un désagrément. En jour, il apprend qu’un de ses plus beaux modèles, une charmante jeune fille, vient d’être dénoncée et traînée en prison. Tout de suite, sans hésiter, il se met en campagne. Il fallait délivrer l’innocente. Il fallait rendre la liberté à cette gracieuse gazelle. Après de nombreuses démarches et non d'avoir dépensé beaucoup d’argent, le charmant modèle dont l’esquisse trouve aujourd'hui chez S. M. la Reine, fut rendue à sa famille éplorée.

Cependant, Paris où Lambeaux avait espéré trouver la réalisation de ses beaux rêves d’or, ne lui donna pas précisément ce qu’il avait espéré. Après avoir, pour des raisons spéciales et d’ailleurs personnelles, abandonné
l'atelier de son ancien compagnon d’études, il reprend la sculpture mais éprouve beaucoup de peine, malgré l’exécution de quelques œuvres intéressantes et notamment Le Mendiant, La Charmeuse de serpents, L'Aurore et Le pauvre aveugle (exposé à Gand, en 1880), à pourvoir aux
besoins de son existence dans cette cité éminemment dispendieuse.
Malgré tout, cette période exerça une influence très heureuse sur la
personnalité du statuaire.