Dolores Redondo

James regarda Amaia, qui souriait légèrement écoutant la conversation, tête baissée. Engrasi se remémora les connaissances acquises lors de ses années passées à la faculté de psychologie, qu’elle s’était repassé mentalement des centaines de fois en espérant que ce jour n’arriverait jamais.
(p.414)

Amaia se gara près d’un camping-car immatriculé en France et se dirigea vers l’entrée. Derrière le comptoir de la réception, une adolescente avec des
dreadlocks rassemblées en queue-de-cheval jouait à un jeu d’adresse online.
(p.358)

L’attitude d’Angel Ostolaza lui donna une fois encore l’impression qu’il se réjouissait un peu trop de se voir impliqué dans l’enquête. Elle avait constaté ce phénomène à plusieurs reprises au cours de sa carrière, mais elle était toujours surprise que quelqu’un soit fier de se voir mêlé à une mort violente.
(p.258)

Les Wexford, les parents de James, semblaient avoir entrepris une campagne agressive afin d’obtenir un petit-fils. Elle se rappelait que le jour de leur mariage, son beau-père avait porté un toast en son honneur où il lui demandait des petits-enfants le plus tôt possible. Et lorsque, plusieurs années après, les enfants n’étaient toujours pas là, l’attitude ouverte de ses beaux-parents envers elle s’était muée en une sorte de reproche voilé qui ne devait pas l’être autant vis-à-vis de James.
James resta allongé, regardant fixement la porte de la salle de bains tout en écoutant couler l’eau, et se demanda ce qui pouvait bien leur arriver.
(p.246)

Il sourit.
Prendre un café au lit était une habitude qui remontait à l’époque où elle était étudiante, quand elle vivait a Pampelune dans un vieil appartement
sans chauffage. Elle se levait pour préparer le café et puis retournait le déguster sous les couvertures, et ce n’était qu’une fois qu’elle se sentait réchauffée et suffisamment réveillée qu’elle sortait de sous les
draps pour s’habiller dans l’urgence. James ne prenait jamais le petit déjeuner au lit, mais il avait pris l’habitude de la réveiller chaque matin en lui apportant un café.
(p.242)

-Teniente Nogueira –concedió cauto-, le he escuchado, le agradezco su preocupación, pero si, como usted admite, el caso está cerrado y es el único que parece no estar de acuerdo contra el criterio de sus mandos, dígame, ¿por qué me cuenta todo esto? Si no ha sido capaz de convencerlos, ¿qué podría hacer yo?
-Mucho, usted es un miembro de la familia.
-No es verdad –negó amargado-. No soy de su familia y parece que nunca lo he sido.
-Y sin embargo lo es, de pleno derecho –rebatió Nogueira vehemente-. Con su ayuda podríamos avanzar en la investigación que ha quedado suspendida.
-Acaba de decirme que ya no es guardia…

-Lieutenant Nogueira, -concéda-t-il prudemment-, Je vous ai écouté, j'apprécie votre inquiétude, mais si, comme vous l'admettez, l'affaire est close et que vous êtes le seul à ne pas être d'accord avec les critères de vos commandants, dites moi, pourquoi me dire tout ça? Si vous n'avez pas réussi à les convaincre, que puis-je faire?
-Beaucoup, vous êtes un membre de la famille.
-Ce n'est pas vrai, -nia-t-il amèrement-. Je ne suis pas de sa famille et il semble que je ne l'ai jamais été.
-Et pourtant ça l'est, à part entière, -répondit Nogueira avec véhémence-. Avec votre aide, nous pourrions faire avancer l'enquête qui a été suspendue.
-Vous venez de me dire que vous n'êtes plus un garde ...

Elle a capturé toute seule un collectionneur, la pire espèce de prédateurs, la plus insaisissable. Elle a libéré la dernière femme qu'il avait enlevée et prouvé qu'il en avait kidnappé au moins deux autres, avant de les tuer.

Wilson était de ces hommes qui peuvent donner l'illusion d'être en forme quand on les voit de dos. De face, un ventre dodu, aussi gros que celui d'une femme enceinte de six mois, ne laissait aucun doute. Ensemble, Wilson et Verdon avaient été les artisans de l'Indice descriptif latent d'identification, un programme pionnier dans les années 1980 qui permettait de comparer les caractéristiques d'un crime avec les profils d'assassins étudiés, déjà intégrés dans le système. Le programme détectait les analogies et suggérait des suspects.

Nous pensons que l'intention de cet homme est de passer inaperçu, qu'il est de ceux qui ne désirent pas la notoriété et semble satisfaire son objectif par le passage à l'acte. Il n'a pas besoin de publicité, et nous non plus. Notre meilleur atout est qu'il continue de croire que nous ignorons son existence.

L'assassin connaissait sans aucun doute cette information. Dans deux cas il a écrasé les orifices d'entrée des balles avec des pierres, mais dans les autres il a utilisé des bouts de bois pour littéralement empaler leurs têtes.

Quand il reprit conscience, l'assassin avait filé. Cependant, ses investigations furent suffisantes pour établir le parcours criminel de l'individu et localiser les cadavres de neuf de ses victimes. La base de données créée par Scott Sherrington sert encore aujourd'hui de référence et de cours magistral sur la façon d'appliquer la victimologie, aussi bien lorsque le crime est évident que, en raison d'une mise en scène effectuée par l'assassin, quand il nous est présenté comme un suicide ou un accident. L'inspecteur dut prendre sa retraite à cause de sa grave maladie cardiaque.
 

L'objectif de cette conférence et des prochains exercices de votre formation traitera de la détection d'éléments communs et discordants autour d'un type de victime, des caractéristiques de la disparition ou du lieu d'apparition du corps, qui peuvent laisser soupçonner que ce qui se présente comme un suicide ou un accident cache un meurtre ou une série de meurtres. Et comment étudierons-nous des assassins que nous n'avons pas encore été capables d'appréhender ?

Ce type d'assassin n'a nullement l'intention d'être arrêté, il est capable de jouer au bon citoyen toute sa vie, il n'a pas soif de notoriété, il a déjà sa place dans le monde.

Ce type de tueur en série est capable d'exercer pendant des années son travail macabre avec discrétion, dissimulant ses traces ou les cadavres de ses victimes, faisant passer ses meurtres pour des disparitions, des fugues, des accidents ou des suicides, et choisissant pour cela des victimes avec un profil à haut risque, des exclus sociaux dont la disparition peut passer inaperçue ou attire peu l'attention : drogués, prostituées, sans-abri, réfugiés clandestins ou en situation irrégulière.

Les assassins ne s'arrêteront pas, parce qu'ils ont enfin trouvé le moyen d'être quelque chose, d'être quelqu'un, d'être importants, et cet ego les conduit souvent à leur perte, car, dans leur soif de reconnaissance, ils s'exposent jusqu'au moment où ils sont attrapés.

Il est commun de supposer que le crime est la façon dont l'assassin se purge de sa propre douleur, puisqu'il a souvent été victime avant de passer à l'acte. Mais la plus dangereuse de toutes les hypothèses est celle-ci : tous au fond veulent être arrêtés, tous veulent être attrapés, et leurs crimes ne sont que de terribles appels pour attirer l'attention sur leur propre souffrance, ce qui exclut évidemment les maladies mentales.

Vous connaissez tous l'importance d'établir un profil des victimes qui nous permet, à travers l'analyse du choix des victimes manifestes, d'atteindre notre objectif. Mais aujourd'hui je vous parlerai de l'importance d'établir des listes de victimes potentielles pour détecter la présence d'un tueur en série. Nous prêterons attention dans un premier temps au type de victime qu'il choisit, avant même qu'il se manifeste ou connaisse leur existence.

Bien entendu je suis profileur et ma spécialité est l'analyse de données. Ça ne paraît peut-être pas aussi brillant, mais c'est d'une importance capitale au cours d'une enquête.

Mince et jolie, elle avait les cheveux teints, d'une couleur rouge et artificielle qui ne l'avantageait pas, et portait dans ses bras un de ces petits chiens stupides qui n'arrêtait pas de glapir. Martin s'assura une fois de plus que son insigne était bien visible sur sa veste. Tout le groupe sembla reprendre espoir à sa vue.

Peu importaient les mots. Tous les survivants d'une tragédie, sans exception, disaient la même chose. Leur voix étranglée tentait de transmettre des encouragements pathétiques pleins d'espoir qui mouraient sur leurs lèvres pendant qu'ils fouillaient dans les décombres, exsangues, vidés de leurs propres forces, à la recherche de quelque chose à quoi s'accrocher.