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3.66/5 (sur 98 notes)

Nationalité : Barbade
Né(e) : 1974
Biographie :

Cherie Jones est écrivain, avocate et mère de quatre enfants. Ses nouvelles ont été publiées dans PANK , Cadenza , Eclectica , The Feminist Wire et diffusées sur BBC Radio 4. Elle est boursière du Vermont Studio Center et a obtenu sa maîtrise avec distinction à l'Université Sheffield Hallam, où elle a reçu le Markham Award et le prix AM Heath.
Cherie Jones est née en 1974. Elle a obtenu un baccalauréat en droit de l'Université des Indes occidentales, à la Barbade, en 1995, un certificat d'éducation juridique de la Hugh Wooding Law School, St Augustine, Trinidad en 1997 et a été admise au Barreau à la Barbade en octobre 1997. Elle travaille toujours comme avocate, en plus de ses écrits.

Source : Goodreads
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Et d'un seul bras, la soeur balaie sa maison


Citations et extraits (17) Voir plus Ajouter une citation
Que sont les secrets, si ce n’est des choses que l’on veut oublier ? Par conséquent, pourquoi voudrait-on rester ami avec ceux qui s’en souviennent ?
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Un brancard arrive, et Lala est allongée quand elle passe les portes et traverse un couloir où des gens étendus gémissent. Elle voit des bras pliés à de drôles d’angles, des entailles, des blessures, des chemises et des serviettes appuyées sur des fronts, des bouches, des plaies béantes, elle lève les yeux pour s’épargner le spectacle et un quadrillage de dalles de plafond et de néons carrés jouent au morpion en direction de son avenir et elle se demande si, après tout ce qu’elle a subi, elle va mourir ici. Cette idée ne la trouble pas. Le brancard s’arrête et d’autres infirmières apparaissent, et quand Lala reprend connaissance, elles lui disent de pousser mais elle ne veut pas pousser car elle a peur de ce qu’elle va découvrir.
C’est alors que Lala constate le deuxième fait établi : quand elle ouvre la bouche pour demander de l’eau, le cri qu’elle dissimulait jusque-là sort enfin. Elle veut leur expliquer, ce n’est pas mon cri, c’est un cri que j’ai récupéré devant une maison de Baxter’s Beach, parce qu’elle espère que les infirmières comprendront que ce cri aussi nécessitera des soins, mais elles ne comprennent pas. L’infirmière à la vilaine perruque façon Boney M. lui dit de la fermer et lui demande si elle braillait comme ça quand elle se faisait prendre par le type qui l’a mise dans ce pétrin. Lala voit bien à son regard qu’elle ne peut pas, qu’elle ne veut pas se laisser toucher par ses hurlements parce que ça s’annonce mal et que ces adolescentes sans un rond qui débarquent chaque jour sont toujours un peu plus jeunes.
Alors Lala ferme sa bouche et ravale le cri qu’elle a attrapé à Baxter’s Beach comme d’autres attrapent un rhume, et dans sa tête, elle supplie le bébé de ne pas mourir tandis qu’elle pousse et sent les vaisseaux du blanc de ses yeux exploser et lui brouiller la vue.
Et Lala découvre le troisième fait établi, parce qu’après avoir surmonté la brûlure, la déchirure, l’écartèlement et enfin l’expulsion d’un poids qu’elle porte en elle depuis huit mois, elle se rend compte qu’elle n’entend pas la plainte qui, à la télévision, signale toujours la naissance du bébé. Elle dit : « Infirmière, infirmière ? » parce qu’elle veut qu’on lui assure que tout va bien, que le bébé va bien, mais l’infirmière ne la regarde pas, l’infirmière dégage son poignet qu’a attrapé Lala et ordonne à l’autre infirmière d’appeler le médecin et elle tient entre ses mains une chose qui ne bouge pas. Elle s’empresse de déposer le bébé sur une table éclairée par une lampe, où elle introduit un tube bulbeux dans ses narines, frictionne, compresse et écoute sa poitrine. Lala sait que ce n’est pas bon signe, elle ne veut pas regarder mais elle ne peut pas s’en empêcher et elle prie pour que le bébé vive car elle voit que les infirmières ont déjà baissé les bras et soudain, elle est furieuse contre Adan qui n’est pas là et après ce qui s’est passé, elle est persuadée qu’elle ne pourra plus l’aimer, et peut-être que ce bébé est la seule bonne chose dont Adan est capable, et elle veut que le bébé vive pour pouvoir lui donner tout son amour plutôt que de le donner à Adan.
Une autre infirmière entre précipitamment dans la salle, suivie d’un très jeune étudiant en médecine, et tous deux se dressent au-dessus de son bébé sur la petite table et le claquent, le palpent et le ponctionnent avec des tubes et des aiguilles jusqu’à ce que Lala entende un petit cri faible. Et ce n’est qu’une fois que Lala se met à geindre de soulagement que l’étudiant demande : « Elle est recousue ? » et l’infirmière qui a aidé à sauver Bébé répond : « Non » et revient vers elle et lui tapote le bras et dit que ça va, qu’ils font tout leur possible.
Le temps qu’ils terminent, Bébé est encore bleue mais elle respire, et ils l’enlèvent de la petite table blanche pour la montrer brièvement à sa mère avant de l’emmener. La pièce est silencieuse pendant que Lala se fait recoudre et planter des aiguilles et transfuser avec le sang de quelqu’un d’autre. Elle a froid et elle tremble et l’infirmière à la perruque roule en boule la chemise de nuit poisseuse de Wilma, la met dans un sac et prépare la salle pour un autre accouchement. Lala demande s’ils peuvent appeler Wilma pour l’informer que sa Stella a accouché et lui dire de venir, même si elle sait que Wilma ne viendra pas. Alors l’infirmière, pas impressionnée par le fait que Lala appelle sa grand-mère par son prénom mais radoucie à l’idée qu’elle a apparemment réussi à conjurer le sort, répond d’accord mais le bébé n’aura probablement pas droit aux visites dans l’immédiat. Son ton suggère que le bébé ne verra peut-être jamais aucun visiteur.
Elle laisse Lala dans la pièce froide et silencieuse, allongée sur le dos avec les jambes encore écartées, sans aucune sensation à l’intersection des cuisses, et ça n’a rien à voir avec le bonheur sur les posters de la clinique, ou dans les pubs à la télé ou sur le visage des touristes fortunées qui se promènent avec leurs nouveau-nés à Baxter’s Beach. Elle prend au contraire conscience qu’elle vient de livrer un autre être vivant à l’obscurité, que la naissance est une blessure et que mettre le bébé au monde l’a marquée à vie, et lorsque l’infirmière lui propose d’aller voir son bébé aux soins intensifs, elle secoue la tête pour dire non et l’infirmière fait claquer sa langue tsk tsk et Lala pense à Adan qui n’est pas revenu, et elle se demande s’il est retourné chercher le pistolet mais elle garde la bouche fermée parce qu’un reste de cri s’y trouve encore.
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Les extrêmes quels qu'ils soient sont mauvais, et les deux extrêmes de la possession - le dénuement et la surabondance - nuisent particulièrement à l'âme. C'est pour cette raison que la mère de Mira Whalem a toujours prôné la modération. Posséder juste assez pour être heureux. Assez pour manger. assez pour boire. Ni plus, ni moins. Chercher à déterminer en quoi consiste cet "assez" a sans doute déjà de quoi occuper toute la vie.
page 49.
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Les gens mentent quand ils décrivent la première claque. Lala sait qu’on ne peut pas faire confiance à une femme qui vous dit d’où la première claque est venue, parce que la première fois qu’on vous bat, si vous êtes vraiment sous le choc, la seule chose dont vous vous souviendrez, c’est de la douleur. Vous ne pouvez pas vous souvenir d’où c’est venu parce que vous ne vous y attendiez pas. Un peu comme les histoires que racontent les hommes comme Adan, qui disent que vous pouvez vous faire tirer dessus sans même vous en rendre compte, car vos sens doivent essayer de déchiffrer les indices laissés par quelque chose que votre cerveau ne comprend toujours pas. Vos yeux voient du sang, vos oreilles entendent le coup de feu, votre nez sent la poudre à canon, vous sentez le goût de la bile, vous sentez un point rouge et humide. En gros, vous avez été touché. La première claque, vous n’en prenez conscience qu’une fois que vos sens ont suffisamment récupéré pour vous transmettre l’information. Une femme qui affirme le contraire est une sorcière qui s’attendait à recevoir une gifle et l’a très probablement cherchée. Une femme comme ça a donc les yeux trop grands ouverts pour être vraiment amoureuse.
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Comment est-ce qu'on apprend à aimer un homme ?
La première fois que tu te poses cette question, c'est que tu viens de te marier. Il y a des jours où les casses d'Adan te payent des habits qui remplacent les affreuses robes que faisait Wilma. Il t'achète des robes en jean jaune fluo et des bottines en daim orange à petits talons aiguilles, des ceintures en cuir cloutées que tu peux porter sur les hanches quand tu sors en boîte pour écouter Alpha 24 et regarder les voyous se trémousser de leur mieux sur la musique de leurs ancêtres, tout en portant leur fortune autour de leur cou. Il y a aussi ces jours où Adan commence à manifester sa capacité à t'enlever ces habits à coups de poings, à déchirer ces robes et à te cogner avec les talons de ces mêmes bottines qu'il t'avait offerte dans une boîte avec un ruban dessus.
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La plage pue la mousse croupissante, les algues sargasses et les entrailles en putréfaction de poissons échoués qui pourrissent dans l'air tiédissant. C'est un de ces matins où l'eau a la gueule de bois après une nuit d'insoussiance et a vomi sur la sable avant de tenter de cuver.Les touristes trouvent que marcher le long du rivage relève moins de la balade sur l'étendue de poudre rose représentée sur les magazines que d'un parcours du combattant où il faut éviter les méduses cachées sous les algues, les épines des oursins enlisés dans le sable, les morceaux de bouteilles en verre qui ne sont pas restées assez dans la mer pour être lissés et émoussés par le solei et le sel, transformés ainsi en objets dignes d'une chasse au trésor.
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Si nous devions chercher Lala, et si nous devions la trouver au bord de Baxter’s Beach, les doigts enfouis dans les cheveux d’une inconnue, si nous devions nous approcher d’elle et lui demander si elle connaît le marginal crasseux qui traîne sur la plage, celui à qui nos femmes insulaires adressent des claquements de langue méprisants, celui au souvenir duquel s’accélère la respiration de certaines touristes, nous remarquerions d’abord la façon dont elle garde les yeux rivés sur la tête de sa cliente quand elle demande : « Qui ça ? » comme si elle cherchait délibérément à éviter notre regard. Ses doigts ne ralentiraient pas, non, ils continueraient à tresser les cheveux à une vitesse qui semble impossible à mesurer : dessusdessousdessusdessousdessusdessousdessusdessousdessus…

Nous pourrions, en premier lieu, décrire Robert Parris (alis « Tone ») en termes physiques, car son physique – locks couleur rouille mi-longues, taille moyenne, silhouette fine, dessinée et puissante – est ce qui saute d’abord aux yeux de ceux qui le regardent.

Nous expliquerions que nous parlons de celui dont les ongles de pied blanchis ont la couleur des vagues, dont la peau est saupoudrée de la fine poussière d’une vie gagnée sur la plage. Nous expliquerions que les cheveux sur sa tête et les poils sur ses mains ont pris la teinte dorée du soleil, si bien que, comme le soleil, nous ne le verrions pas si nous le regardions directement.

Quand Lala continuerait à feindre de ne pas le connaître, nous pourrions évoquer ses particularités – le collier à dent de requin qu’il porte autour du cou et qu’il embrasse avant de s’aventurer dans l’eau, la façon dont il frappe la surface de la mer de son Jet-Ski, faisant sursauter les baigneurs plus âgés et cracher des obscénités aux plus jeunes, l’habitude qu’il a de se pencher en avant et de presser les locks indisciplinées au sommet de son crâne pour les débarrasser de l’eau salée.
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Elle ne l’avait pas quitté, bien sûr. Quelle femme irait quitter un homme pour risquer de subir les mêmes choses des mains d’un autre ? La voisine de Wilma ne se réfugiait-elle pas chez elle presque tous les vendredis soir après que son mari était rentré à la maison ? N’avait-elle pas vu, sur des femmes de sa connaissance, les preuves de raclées pires encore que celles qu’elle-même essuyait ? Sa propre mère n’avait-elle pas toléré pareilles corrections ?
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Tu peux regarder les lève-tôt qui avancent d'un pas hésitant dans une mer baignée par les couleurs lilas et orange du lever de soleil et voir leur étonnement quand ils comprennent que l'eau est chaude. Tu peux observer les femmes, surtout, s'allonger et flotter avec leurs mèches de cheveux soyeux qui se déroulent autour de leur tête, et tu les entendrais presque soupirer quand leur stress se dissout dans la caresse de l'eau tiède et peu profonde.
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Le portail s’ouvre violemment et Adan est là, juste devant elle, imperturbable, hormis sa cicatrice qui palpite et son air menaçant.
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