nous ne reviendrons plus ici
nous chercherons un autre lieu
un immense champ
une piste d'atterrissage
où les oiseaux et les magiciens
nous livreront leurs secrets
Je cours sur les eaux du fleuve,
les noyés m'encerclent;
des plumes de rapaces se mêlent à mes cheveux
quand je m'élance dans de longues chevauchées.
Je suis là, debout sur un tapis de pissenlits,
les mots se sont perdus dans ces temples oubliés;
Hier, nous étions seuls et indécis *,
aujourd’hui, deux ballerines aériennes
se mêlent à la lumière;
tout ce que nous dansons nous appartient
* Borduas, Refus global
Tu commences à quatre heures dans le bar-salon. Habillée en cow-girl avant cinq heures. Tu dégénères juste après neuf heures et découpes toutes les annonces classées pour te voir femme d’intérieur assez préoccupée par l'essence des choses. Les clients auront les dents longues et le pourboire facile.
Tu racontes des petites histoires. Un langage. Tu traces en blanc un récit ni parlé ni écrit, mais attesté, inscrit quelque part dans ton espace. Tu ne les regardes pas. T’offres à eux résistante comme la petite fille sauvage qui s’installe devant le miroir en attendant que ça se passe.
Les yeux grands ouverts, tu es en mesure d’oublier tes vestiges personnels et de réaliser Ton roman de vie d’artiste. Tu es une strip-teaseuse aveugle et cela te rend fière.
Corsage à moitié déchiré, tes sens étonnent toujours jusqu’au moment du drame. Cernée, tu préfères la drogue aux nourritures terrestres. Des ecchymoses au creux des bras. Un essai remarqué, la peau si blanche, les ongles rongés à l'os.
Les religieuses squattent les terrains des Indiens,
elles crient au viol;
je suis au milieu des fées noires
qui affectionnent le fouet et la laisse,
poursuivent les enfants abandonnés,
leurs veines remplies de métal,
le cœur obstrué par des oiseaux.
En juillet, cette année-là
Il était trop tôt pour te rejoindre
Sans poème, sans enfant
À la recherche d’un corps
Personne d’autre que toi
Ne se souvient de mon séjour
Mes mains fouillaient le sol
Égrenaient les résidus d’os
Appartenant à d’autres familles
Longtemps, je t’avais réservé l’oubli
Comme une chambre ouverte sur l’Adriatique
Tu manges avec elle dans l'après-midi graisseuse. Tu la regardes. Elle est toute noire et décidée dans son corsage moiré en filet, réelle en tout cas dans son film. Les mécanismes de sa fiction autant que de sa jupe et de ses bottes de cuir noir, sa jouissance à énoncer la misère d'une jeune révoltée. D'où son film la sauve-t-elle? D'aucun roman, mais de beaucoup de romanesque.
Folle des arcades, elle connaît les beautés qui circulent entre les édifices de l'est.
Son coeur sectionné. Absente à sa mère, à sa soeur, seul le souvenir poétique demeure.
En fait, elle ne se confie à personne. Car certains plaisirs sont tout ce qu'elle n'a jamais possédé. Elle les porte à sa bouche quotidiennement.
C'est peut-être simplement l'envie qu'elle tient si près d'elle. Cette continuelle impression, de très loin, lui vient d'une étrangère.
Je confonds les oliviers avec les mimosas en fleurs
Nous roulons dans les nuages
Je vais à ta rencontre
Bien que je sois déjà venue à cet endroit
J’ai la peur d’être abandonnée
Sur le bord d’une route
La blessure d’ouvre, se referme
La nuit, je veille les morts, les vivants
Cherche mes clés
Mes enfants pas encore nés
Sous le lit
Vies jetées, arbres rabougris,
une fillette, sa corde à danser
un nœud coulant, branche minuscule,
des mèches de cheveux;
le passé des épines me reprend :
mes parents en jeunes mariés encerclés.
Ils ont rêvé Dieu, les pieds mouillés,
j’ai brûlé de leur propre feu