Nous avons le plaisir de recevoir l'écrivain et conférencier belge Bart van Loo pour son ouvrage Napoléon : l'ombre de la Révolution paru aux éditions Flammarion.
Il s'est fait connaître du grand public grâce à ses mini-conférences virtuoses dans de Wereld Draait Door, mais van Loo est bien sûr avant tout un écrivain. Il a publié la trilogie France, très appréciée, ainsi que les best-sellers Chanson et Les Téméraires.
Orphelin de son cavalier détraqué, le destrier noir poursuivit seul son chemin. Slalomant entre les cadavres, il disparut dans le brouillard. La bannière ducale gisait à côté du Téméraire. La neige qui tourbillonnait recouvrit la devise brodée en fil d'or. De ce légendaire cri de ralliement : Je lay emprins (je l'ai entrepris), il ne resta bientôt plus aucune trace.
Dans le célèbre Viandier (paru en 1380), premier chef-d’œuvre culinaire de l’histoire de France, l’auteur et cuisinier Guillaume Tirel ne dit pratiquement pas un mot de la durée de préparation des plats, en dehors d’exhortations religieuses appelant à laisser mijoter un plat en égrenant dix-huit Notre Père ou vingt-trois Je vous salue Marie.
[Au cours du XIVe siècle] La démocratisation de la foi déclencha une vulgarisation de l’art catholique. Le symbolisme complexe dut céder la place à un réalisme pur et simple; il s’agissait bien plus de vivre la foi que de la professer. Les gens ressentirent par ailleurs le besoin d’en porter des signes sur eux. Ceux qui en avaient les moyens glissaient un livre de psaumes ou de cantiques dans leur poche, les autres un simple chapelet. En ayant laissé la foi entrer dans la sphère privée, en la trimbalant partout et en se mettant à la vivre à sa guise, l’homme occidental permettait à l’individualisme de bourgeonner.
Plein de déférence, ils regardaient ce roi sans couronne de la monarchie théâtrale bourguignonne, un Philippe le Bon resplendissant, au sommet de son pouvoir. 417.
Ce qui est sûr, c'est que Charles, qui a quelque chose d'un Napoléon raté, paya bien plus tôt le prix de son hubris que le Corse trois bons siècles plus tard. L'histoire enseigne que les souverains aux ambitions démesurées finissent inévitablement par mordre un jour la poussière. La question est de savoir quand; p. 548.
Nous sommes tous Flamands et, par Dieu, nous le resterons, quelle que soit la langue que nous parlons !
Pour combler son souhait d'obtenir une descendance, Philippe le Bon entendait prendre son temps et s'assurer de choisir une épouse désirable. Une raison supplémentaire de recruter, dans son entourage, le meilleur portraitiste de l'époque. Si le tableau représentait un beau visage, il pourrait s'y fier les yeux fermés : cela signifiait que la dame était d'une réelle beauté.
Il s'agit là d'une pensée exaltante : le fondateur de fait des Plats Pays fit des beaux-arts l'une de ses priorités. L'intimité et les affinités que Philippe le Hardi partageait avec ses artistes, Philippe le Bon les reprit à son compte pour les porter à maturité. Après l'annexion du duché de Bourgogne, la cour de France fera sienne cette tradition. Caractéristique de ce pays, elle traversera les siècles, de François Ier à François Mitterrand. La vérité réclame son dû : cette tradition qui s'est épanouie avec une rare intensité est bien une invention bourguignonne.
La noblesse avait en réalité loupé le train du renouveau. L'aristocrate flamand Jean de Lannoy, courtisan pourtant apprécié par Philippe le Bon, avoua à son fils Louis, dans une lettre de 1465, qu'il avait trop peu étudié pour encore exercer une quelconque influence dans le domaine administratif. Bien qu'il ait oeuvré au plus haut niveau pendant de nombreuses années, il sentait de plus en plus les finesses du métier lui glisser entre les doigts. Sa lettre est le témoignage d'un homme qui a compris que si la noblesse n'y prêtait garde, elle se trouverait tout bonnement remplacée par une horde d'érudits et de savant. Une évolution difficile à enrayer. À présent qu'il devenait manifeste que les gentilshommes ne maîtrisaient pas les aspects techniques d'une bonne gestion publique, la plupart d'entre eux restèrent sur la touche - eux dont les modèles tutélaires étaient ces guerriers qui avaient jadis conquis Jérusalem.
A la fin du Moyen Age, la mort était une affaire d'une importance vitale.