Tant que mon père vivait, j'avais besoin de cet ailleurs, de ce voyage, de cet élan de folie qui me permettait d'exister en dehors de lui. Virginia était de passage, moi aussi. Elle n'avait pas le temps, moi non plus. Ces rares instants de clarté me suffisaient, m'inspirant assez d'énergie pour affronter le quotidien.
Maintenant que mon père n'est plus, l'équilibre a changé. L'ailleurs est concentré au fond de mon être.
L'étreinte brève, imparfaite, à l'ombre du massif de Belledonne.
Le chiffre bleuâtre sur le bras d'Alma.
L'amour brut, qui renforce le désespoir. L'éclat de la neige au-dehors, l'éblouissement. L'acte, à la limite de la survie.
Au retour, les olivaies détruites par les colons, les racines arrachées à la terre.