Citations de André Maurois (304)
La première année, ils avaient été très heureux. La liberté, la jeunesse, l'amour, tout leur semblait merveilleux.
La coquetterie est une arme à deux tranchants. Elle blesse celle qui, en la maniant, se permet un faux mouvement.
Être exigeant, c'est montrer de l'intérêt.
En d'autres termes, vous croyez à une immortalité de l'âme universelle, mais non à la survie de l'individu ?...
- Vous avez un goût très français des idées, mon ami...
J'étais perdu dans la rêverie où nous plonge toujours l'énigme d'un beau visage [...]
« Le bonheur n'est pas dans les événements. Il est dans le cœur de ceux qui les vivent. »
Un homme trop fin pour la classe où le hasard l'a fait naître est d'abord simplement jaloux et malheureux. Mu par ces sentiments, il construit ensuite une critique véhémente de la société pour expliquer ses déboires et ses haines. Nietzsche avait du génie parce qu'il avait le délire de la persécution. Karl Marx était un dangereux maniaque. Seulement, quand les sentiments de mécontentement qu'il s'agit d'expliquer sont ceux de toute une classe ou de toute une nation, le théoricien passionné devient un prophète ou un héros, tandis que s'il se borne à expliquer qu'il aurait préféré naître empereur, on l'enferme.
L'amour de l'humanité est un état pathologique d'origine sexuelle qui se produit fréquemment à l'époque de la puberté chez les intellectuels timides : le phosphore en excès dans l'organisme doit s'éliminer d'une façon quelconque. Quant à la haine du tyran, c'est un sentiment plus humain et qui a beau jeu en temps de guerre, alors que la force et la foule coïncident. Il faut que les empereurs soient fous furieux quand ils se décident à déclarer ces guerres qui substituent le peuple armé à leurs gardes prétoriennes. Cette sottise faite, le despotisme produit nécessairement la révolution jusqu'à ce que le terrorisme amène la réaction.
Pour nous, les "droits imprescriptibles de l'homme" sont le droit à l'humour, le droit aux sports et le droit d'aînesse.
"Etre de ceux auxquels les hommes croient, dans les yeux desquels des milliers d'yeux cherchent l'ordre, à la voix duquel des routes s'ouvrent, des pays se peuplent, des villes surgissent."
Disraëli fut un jeune homme insolent, dont la famille, originaire d'Italie, abandonnera le judaïsme par amour des traditions anglaises. Au collège il fut le premier de sa classe, tout en étant champion de boxe. Il écrivit, et ses romans eurent du succès. Quand il voyage, c'est en disciple de Byron et de Brummell. Mais c'était avant tout le plus grand homme politique de tous les temps. Sa vie correspond à l'époque la plus brillante de l'Empire britannique.
Je me propose d'étudier, sur trois générations, les formes successives d'un tempérament fabuleux, né de l'union d'un gentilhomme français et d'une esclave noire de Saint-Domingue.
Aucun homme n'est parfait sauf celui que votre femme a failli épouser avant de vous connaitre.
Au commencement avait été Illiers, une petite ville aux confins de la Beauce et du Perche, où quelques Français se serraient autour d'une vieille église encapuchonnée sous son clocher ; où un enfant nerveux et sensible lisait, les beaux après-midi du dimanche, sous les marronniers du jardin, François le Champi ou le Moulin sur la Floss ; où il entrevoyait, à travers une haie d'aubépines roses, des allées bordées de jasmin, de pensées et de verveines, et restait là, immobile, à regarder, à respirer, à tâcher d'aller avec sa pensée au-delà de l'image ou de l'odeur. « Certes, quand ils étaient longuement contemplés par cet humble passant, par cet enfant qui rêvait, ce coin de nature, ce bout de chemin n'eussent pu penser que ce serait grâce à lui qu'ils seraient appelés à survivre en leurs particularités les plus éphémères », et pourtant c'est son exaltation qui a porté jusqu'à nous le parfum de ces aubépines mortes depuis tant d'années, et qui a permis à tant d'hommes et de femmes, qui n'ont jamais vu et ne verront jamais la France, de respirer en extase, à travers le bruit de la pluie, l'odeur d'invisibles et persistants lilas.
1968 - [p. 94/95]
Il y aura toujours du romanesque au monde pour ceux qui en sont dignes ( "Les violettes de mercredi")
Un raisonnement n'a jamais convaincu personne. Mais croire qu'un raisonnement de père puisse changer les idées d'un fils est le comble de la folie raisonnante.
L'amitié suppose la confiance, la mise en commun des idées, des souvenirs et des espérances. Dans l'amour, le désir de plaire remplace la confiance.
André Maurois (1885-1967)
in "Sentiments et coutumes" (1934)
Les moments très beaux sont toujours mélancoliques. On sent qu'ils sont fugitifs, on voudrait les fixer, on ne peut pas.
Je comprenais maintenant une phrase que m'avait dite un jour Philippe et que j'avais alors jugée monstrueuse : l'amour supporte mieux l'absence ou la mort que le doute ou la trahison.
(Proust) savait maintenant qu'un écrivain, avant tout autre devoir, a celui de vivre pour son œuvre ; que l'amitié, par le temps qu'elle fait perdre, devient une dispense de ce devoir, une abdication de soi ; que la conversation est « une divagation superficielle qui ne nous donne rien à acquérir ». L'inspiration, la pensée profonde, le « choc spirituel » ne sont possibles que dans la solitude. L'amour même est moins dangereux que l'amitié, parce qu'étant subjectif il ne nous détourne pas de nous-mêmes.
1780 - [p. 84]