- Notre action est mal perçue. Des agressions sont perpétrées contre des humanitaires. (...)
- Vous n'allez tout de même pas me dire que vous vous étonnez, monsieur Dubessy ? Allons ! Vous introduisez de l'aide alimentaire dans le pays, notamment du lait en poudre en quantités énormes, et vous cassez le marché. Vous êtes au courant des conséquences déplorables de votre superbe générosité ? Plus personne n'achète le lait des paysans. Les prix s'effondrent et les paysans vendent à perte. Pour survivre, ils offrent leurs vaches à la boucherie et, là aussi, les prix chutent. Et bientôt, il ne restera plus grand-chose des troupeaux du Sahel ! Plus rien ! Les paysans, les éleveurs, les bergers, tous ceux que vous aurez ruinés avec votre lait en poudre gratuit quitteront leurs maigres pâturages sahéliens et déferleront sur les villes, sur Bamako, Niamey et Ouaga. Le désert, abandonné à lui-même, gagnera encore du terrain. Mais vous, monsieur Dubessy, vous aurez bonne conscience. Et toute la Fance avec vous.
La misère n'embellit personne.
C'est une idée de ma mère. Elle pense que quand on est mort on devient beaucoup plus libre. Tu comprends, c'est notre corps qui nous retient et qui nous pèse. Une fois que l'on est débarrassé de lui,tout devient facile. Rien ne nous arrête. On va où on veut, aussi vite que l'on veut. On retrouve les êtres que l'on aime et qui sont encore vivants, qui ne sont pas encore dépouillés de leur carcasse...
Tu comprends? l' Afrique ,c' est chaud.Parfois même ,ça devient brûlant... Oh, tu peux faire semblant de ne pas entendre,mais c' est la vérité.
Il éprouvait une sensation curieuse. Les mises en garde et les coups de gueule font partie de l'amour, mais il l'ignorait. Il manquait d'expérience.
Un grand avenir, vous savez, l'automobile. Dans quinze ans, vingt ans, tout le monde aura la sienne.
La planète Afrique lui arrivait en plein cœur, dans un déferlement d'images et de parfums. En passant à la hauteur de ce que le docteur Dubessy désigna sous le nom de "grand marché", la tourmente vint à son comble. Dans l'entassement des petites boutiques, ornées de dessins naïfs où l'on pouvait lire en grosses lettres malhabiles que "Miko fait le franc plus gros" ou qu' "Ibrahim donne l'heure à toute heure" montait le grincement métallique et brouillé des transistors, mêlé aux odeurs fortes de viande avariée, de mangues trop mûres, dans le souffle des épices et l'eau croupie des caniveaux. Niamey était une terre de parfums, de musc et de gingembre, portée par le souffle brûlant de l'après-midi.
C'était devenu un être jeune, inconsciemment courbé sur sa souffrance, maigre, les yeux vides, qui palpitait comme un oiseau blessé, plongé dans une dérive sans fin, d’où émergeaient des ordres criés dans la brume et des appels tendus vers sa mère, du fond de son naufrage.
Ne pas oublier deux cochons vivants qu'on tuera l'un le 14 juillet, l'autre le 15 aout, et surtout le " boujaron", le mot-clef pour les terre-neuvas, le mauvais rhum qui fait oublier le froid, l'humidité, la fatigue, la douleur.
En mer, ne soyez jamais pris par ces maudits Anglais! Mieux vaut être tué, transpercé par une pique, troué d'une balle, déchiqueté d'un coup de hache...Et s'ils vous cernent, jetez-vous à l'eau !