"Trajectoires Mtl" 13. Discussion DÉAMBULATIONS POÉTIQUES ET POLITIQUES, 21.09.2012
Le colloque-événement "Trajectoires Montréal" s'est tenu à Montréal et à Saint-Hyacinthe les 20, 21 et 22 septembre 2012. André Carpentier (Études littéraire...
On aurait dit qu’elle épiait la durée continue du monde
Tournant le dos à la rue, je vois que les passant se reflètent dans les vitrines. À l'écart, des fumeurs s'abiment dans leurs rejets de fumée. Certains se trémoussent sur leur chaise, car, à compter de demain, 31 mai 2006, Journée mondiale sans tabac, il sera interdit de fumer dans les bars, les restos, les cafés. On est loin de ce que le Paris du XIXe siècle appelait des divans, ces cafés où des canapés étaient disposés tout le tour de la pièce, de manière que chacun puisse s'y allonger à son aise, et où il était permis de fumer la cigarette ou le cigare.
Ce café, c'est le genre qui vous harponne en presque fin d'après-midi, quand vous êtes mentalement prêt à fuir les responsabilités, et qui ne vous lâche pas tant que vous n'avez pas fait le plein de vous-même à travers le spectacle des autres, puis il vous restitue à la vie courante, juste à temps pour le séminaire.
Tous ces gens qu'on rencontre en oblique, qu'on ne reverra jamais ou qu'on ne reconnaîtra pas si on les croise de nouveau, que laissent-ils en nous, et nous en eux, sinon l'image fugace d'une silhouette passante? Une trace d'humanité, peut-être.
Milieu d'après-midi de gros automne venteux, un arrêt d'und demi-heure pour rembobiner la journée, dans un établissement où la commande de café et de patisserie tourne au quiz, à cause d'un menu trop élaboré.
La nature a en effet le don de mettre sa présence en spectacle à des moments opportuns, de manière à nous rappeler à quel point elle est mêlée à nous et nous à elle.
Sa voix? Sa voix, je l'ai perdue. Je la reconnaîtrais entre mille, mais je ne l'entends plus en moi. Est-ce ainsi que les gens disparaissent pour de vrai?
Il arrive que notre présence au lieu paraisse volatile parce que des couches de temps vécus viennent s'immiscer dans l'espace.
Les dernières plaques de neige brillent au soleil comme les espaces blancs d'un poème.
Il est des moments où ce qui n'est plus existe davantage que ce qui est.