— Pas cette année : ma belle-sœur attend un heureux événement, répondit George d’une voix lugubre. Sa conversation n’a jamais été éblouissante, mais ces jours-ci, elle semble se limiter exclusivement à son état, et mon mollusque de frère se contente de hocher la tête et de la regarder, béat. Je crains fort de me faire sauter la cervelle si on m’oblige à rester plusieurs jours en leur compagnie.
— Ce qui risquerait fort de gâcher le dîner, observa Richard en souriant. Pas question de laisser une telle chose se produire !
Comme beaucoup d’autres gentlemen du même milieu que lui, George menait une vie propre à effrayer la plupart des dames ayant une morale et un tant soit peu de bon sens. C’était un séducteur qui aimait boire, jouer aux cartes et passer la nuit dans le lit d’une femme pour peu qu’elle soit jolie et consentante, sans se soucier de savoir si elle était servante ou comtesse.
Même s’il n’hésitait d’ordinaire pas à acheter ce qu’il désirait, l’idée de payer une femme pour ses faveurs lui répugnait. Il aurait donc dû séduire quelque dame, ce qui était pratiquement impossible en raison de son absence quasi totale de relations féminines.
— Avec tout le respect que je dois à vos traditions, dans mon monde, on juge un homme à ses actes, à ce qu’il a accompli, et non à son extraction. De plus, je ne vois pas ce qu’il y a d’honorable à harceler une femme sans défense.
Les hommes sont par nature logiques – pour la plupart – et les femmes illogiques. Leurs têtes sont bien trop souvent remplies de notions aussi ridicules que l’amour ou le romantisme. Si Juliet a accepté si facilement votre proposition, c’est peut-être parce qu’elle s’est imaginé que vous alliez vivre comme de vrais tourtereaux, heureux jusqu’à la fin de vos jours.
— Je n’ai rien contre les enfants, en principe… mais comme je n’en ai jamais vraiment côtoyé, je ne sais pratiquement rien à leur sujet.
— Ils ne sont pas très différents des adultes, vous savez : ils désirent qu’on fasse attention à eux et qu’on passe du temps en leur compagnie. Au fond, ils veulent simplement être appréciés par ceux qu’ils aiment.
Toutes les femmes s’adonnaient aux plaisirs de la chair,quel que soit leur milieu, mais Richard n’arrivait pas à songer ainsi à Mrs Wentworth. Il savait d’instinct qu’elle n’était pas le genre de personne avec laquelle on badinait. Non, si un homme la voulait dans son lit, il devait l’épouser avant.
Les garçons aiment ceux qui les traitent d’égal à égal et les écoutent.
Toutes les femmes aimaient qu’on leur dise qu’elles étaient belles, mais cet homme lui donnait l’impression d’être la seule à qui il ait jamais fait de tels compliments.
Certes, les traditions étaient peut-être différentes en Amérique, mais l’esprit de Noël était universel, quel que soit l’endroit où il était célébré.