Longtemps, dans leur mémoire, ils revoient défiler, apparitions fulgurantes, les arrêts désertés des tronçons interdits (...) et, surgies du clair-obscur de leurs quais poussiéreux, les contours fantastiques d'hommes en long manteaux de draps gris, lourdement armés, statufiés dans l'épaisseur du temps.
Elle en fixe, silencieuse, la couleur grège et le froissement élégant qui disent nos mondes dépareillés, à mille lieues l'un de l'autre.
En ce matin morne de février, le cours de mes jours studieusement enchaînés a imperceptiblement dévié.
Au campo dei Fiori désert, je zoome mentalement sur la statue en bronze de Giordano Bruno érigée sur les lieux mêmes où, il y a près de cinq cents ans, le dominicain philosophe fut brûlé vif, langue clouée, pour avoir osé penser l’héliocentrisme, l’univers infini.