Gilbert Sinoué
EAN : 9781021008534
Tallandier (26/02/2015)
/5
9 notes
Tallandier (26/02/2015)
Résumé :
Nasser ? A peine prononce-t-on le nom de cet homme d’État, qui régna sur l’Égypte entre 1956 et 1970, que l'on recueille ce type de commentaire : un horrible dictateur, un despote, le farouche ennemi de l'Occident ! En réalité, il y a plusieurs Nasser : le militaire de 1948, à Faluja, en Palestine, où il combat en héros ; le patriote de 1952, qui met un terme à soixante-dix ans d'occupation britannique ; le nationaliste qui, en prenant le contrôle du canal de Suez, ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3)
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Le coup de force de Nasser avait été précédé d'une retraite. On pourrait presque dire d'un retour aux sources. Au lieu d'aller à sa maison de campagne de chef du gouvernement, près du dernier barrage du Nil, au milieu des fleurs, il avait choisi de réfléchir dans son pavillon d'officier pauvre, à Héliopolis. Cinq petites pieces, un jardinet, une porte aveugle , un mur bas, un unique garde du corps en civil. Nasser n'aime pas le bureau gorgé de livres, il le trouve laid parce-que il doit tout lire pour apprendre, pour un métier auquel il n'est pas préparé. Mais la nature des ouvrages, les biographies des dictateurs, apologie des dictateurs, traduit les tendances de l'homme. La traduction de Mein Kampf n'est jamais loin de la main et peut-être de la pensée d'Abd el Gamal Nasser. C'est près d'elle, sinon sous son influence, qu'il fit le point de l'aventure dans laquelle il est précipité. Il revenait de Brioni. Dans l'interpellation officielle, l'entrevue adriatique avait été une nouvelle apothéose pour le jeune chef de l'Égypte; en fait elle fut pleine de difficultés et même d'orages avec la condamnation nuancée de la France en Algérie...Ceux qu'il désire convaincre ou séduire, Nasser parle volontier de sa prudence et, peut-être existe-t-il effectivement chez ce petit fils de fellah un fond de jugement qui lui fait voir l'abîme dans lequel d'autres plus forts que lui ont sombré.
Nasser, le raïs égyptien, fut l'un des leaders du monde arabe. Avec le Mouvement des Officiers Libres, il renversa le roi Farouk en 1952 et nationalisa le canal de Suez en 56. Cette période voit aussi la montée en puissance des frères musulmans ...
Gilbert Sinoué nous offre une biographie complète de cette personnalité d'envergure.
Gilbert Sinoué nous offre une biographie complète de cette personnalité d'envergure.
J'ai tout simplement dévoré ce roman historique qui nous plonge dans l'histoire et nous retrace la vie de Nasser. Super !
Citations et extraits (10)
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Au scandale des armes s'ajoute à l'automne ce qu'on a appelé le « scandale du coton », un énorme fricotage boursier dont l'écho se fait entendre jusqu'en Europe. Les coupables sont des membres du gouvernement wafdiste, associés à des hommes d'affaires égyptiens issus des familles bourgeoises les plus en vue. Des spéculateurs se sont concertés pour obtenir la maîtrise des récoltes cotonnières et en priver le marché. En terme boursier, cela porte un nom : « corner ». Les abus apparaissent d'autant plus odieux que la classe pauvre et la classe moyenne souffrent déjà de la hausse excessive du coût de la vie, et l'on imagine aisément le désespoir du petit cultivateur qui, faute de moyens, a vendu son coton avant même qu'il ne soit récolté, et qui constate que le prix de la balle a doublé, voire triplé, une fois la récolte entre les mains des spéculateurs. Pour Gamal Abdel Nasser et ses amis, qui ont encore à l'esprit la tragédie de la guerre de Palestine, cette affaire est intolérable. Les abus de ces capitalistes, marchands de coton et grands propriétaires, renforcent plus que jamais leur conviction que le paysan, l'ouvrier, le petit fonctionnaire et l'honnête intellectuel égyptiens doivent être protégés contre « le féodalisme et le capitalisme monopolisateurs ». p.140
Nasser aspirait à la libération de son pays, les Frères voulaient la création d'un État islamique. La conception que le futur rais se faisait d'une « cité idéale » et d'un « programme » devait plus à une logique laïque qu'à une lecture des versets coraniques. Comme l'explique Hassanein Heikal : « Le nassérisme ne pouvait pas s'accommoder de l'idéologie des Frères musulmans qui n'avait aucun contenu précis, n'étant qu'une somme de principes contradictoires destinés à répondre au désarroi idéologique de la société égyptienne et faisant habilement appel à la "conscience religieuse de la population". Le nassérisme n'ignorait pas pour autant l'islam, mais il considérait l'appartenance religieuse comme secondaire par rapport à l'appartenance à la nation arabe. p.120
La soirée était détendue, et les nokats fusaient. Brusquement, Gamal nous pria de faire silence et déclara d'une voix empreinte de gravité: "Mes frères, saisissons cette occasion pour créer quelque chose de solide. Que ce jour soit un jour historique. Faisons le serment de rester toujours fidèles à l'amitié qui nous unit. Grâce à cette union, nous triompherons de tous les obstacles." »
Je me souviens de tout cela, et je me souviens également que, durant cette période de la jeunesse où tout n'était que rêve, nous nous étions mis à réfléchir. Et Gamal avait dit : "Les Anglais sont responsables de tous nos malheurs." Cela nous le savions. Mais dit par lui, ces mots nous firent une étrange impression. C'était comme si tout à coup nous étions chargés d'une grande mission face à laquelle nous ne devions absolument pas nous dérober. Nous parlions de notre Égypte malade, conscient qu'il lui faudrait des années pour recouvrer sa santé. Nous rêvions de refaire la patrie. Une patrie au sein de laquelle chaque citoyen aurait sa place d'homme libre. »
Le 9 avril 1948, à midi, des membres de l'Irgoun et du groupe Stern', dirigés par Menahem Begin, futur Premier ministre israélien, firent irruption dans le petit village palestinien de Deir Yassin. C'était un village paisible et sans histoire, situé à l'extérieur de la zone assignée par les Nations unies à l'État juif. Ce fut une boucherie. Sur les 750 habitants désarmés, une centaine fut massacrée froidement. Le lendemain, le délégué suisse du Comité international de la Croix-Rouge ne retrouva que trois survivants hébétés, dont une fillette. L'affaire de Deir Yassin eut des répercussions immenses. La presse et la radio se mirent à diffuser in extenso la nouvelle, provoquant côté palestinien une terreur généralisée. Poussés par la peur, des centaines de milliers d'Arabes abandonnèrent tout dans le seul but d'éviter de subir le sort des habitants de Deir Yassin. p.20-21
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