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Celia Izoard (Autre)
EAN : 9782491109028
136 pages
Éditions de la Dernière lettre (22/10/2020)
4.36/5   7 notes
Résumé :
Dans un style piquant et une écriture argumentée, Celia Izoard prend la plume pour dire à des roboticiens et des ingénieurs de renom qu'ils ont mieux à faire que d'élaborer des robots pour vieilles personnes, des engins connectés qui facilitent les livraisons de commande ou des voitures autonomes intelligentes.
Journaliste et traductrice, Celia Izoard les interpelle sur l'impact écologique et social désastreux de leur profession, dans un monde en proie à la ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Tout chercheur, que ce soit dans les domaines de la science ou de la technologie, devrait légitimement se poser la question de savoir quels seront les aboutissements de ses découvertes, leurs applications, l'usage qu'en feront ceux pour qui il oeuvre; les nuisances qu'elles risquent de produire.
Celia Izoard, par ailleurs traductrice de la nouvelle édition de 1984 de George Orwell paru chez Agone en cette année 2021, distingue ici un problème d'importance qui devrait interpeller tout un chacun. Celui d'un "agir sans conscience" ayant pris place dans l'ordre mondialisé du capitalisme où prédomine l'exigence du profit; aux dépens de toutes autres priorités. La "division du travail" ayant certainement facilité cet abandon de toute réflexion éthique sur le fruit de ses oeuvres et quelques soient leurs nuisances finales. "Ce n'est pas moi, ce n'est pas ce que je voulais et je n'y suis pour rien ..." Tiens, la faute à qui alors ?

En 1969, déjà, furent poser les termes de ce dont, avec ce petit livre, nous avons l'illustration contemporaine. Avec, toutefois, un élément complémentaire qui s'est si l'on peut dire universalisé : l'irresponsabilité assumée.
"De la même façon que l'industrie, destinée à libérer les hommes du travail par les machines, n'a fait jusqu'à présent que les aliéner au travail des machines, la science, destinée à les libérer historiquement et rationnellement de la nature, n'a fait que les aliéner à une société irrationnelle et anti-historique.

"Mercenaire de la pensée séparée, la science travaille pour la survie, et ne peut donc concevoir la vie que comme une formule mécanique ou morale. En effet, elle ne conçoit pas l'homme comme sujet, ni la pensée humaine comme action, et c'est pour cela qu'elle ignore l'histoire comme activité voulue, et fait des hommes des "patients" dans ses hôpitaux.


Fondée sur le mensonge essentiel de sa fonction, la science ne peut que se mentir à elle-même. Et ses mercenaires prétentieux ont conservé, de leurs ancêtres prêtres, le goût et la nécessité du mystère. Partie dynamique dans la justification des États, le corps scientifique garde jalousement ses lois corporatives et les secrets du "Machina ex Deo" qui en font une secte méprisable.


(...) L'impossibilité actuelle de la recherche et de l'application scientifique sans des moyens énormes, a mis dans les mains du pouvoir la connaissance, concentrée spectaculairement, et l'a dirigée vers les objectifs d'État. Il n'y a aujourd'hui plus de science qui ne soit au service de l'économie, du militaire et de l'idéologie. Et la Science de l'idéologie nous montre son autre côté, l'idéologie de la Science."
(Internationale Situationniste N° 12 - 9/1969)
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l'auteure présente dans ce livre 3 lettres de sa main, une lettre d'un chercheur mathématicien américain à un président d'un syndicat américain des travailleurs du secteur de l'automobile et un entretien qu'elle a eu avec un ingénieur en robotique démissionnaire.
Ces cinq textes sont très instructifs. Basés essentiellement sur le secteur de la mobilité, nous pouvons trouver un certain parallélisme dans de nombreux secteurs économiques et marchand et non marchand.
Ce qui me semble être dénoncer ici peut se résumer en deux points :
le premier; comment l'argent publique et privé peut être investi dans des recherches dont la finalité est, pour le privé essentiellement, faire des économies et donc des bénéfices sur le dos des travailleurs en les remplaçant par des machines.
le deuxième; la non connaissance des chercheurs de l'impact qu'ont leurs découvertes ou inventions sur le monde du travail.

Je termine avec ce paragraphe repris aux pages 91 et 92 :
Terry Gou, patron taïwanais de Foxconn, sait très bien ce qu'il fait quand il pose en couverture du magazine "Forbes" enlaçant un robot. Il crache à la figure des 1,3 million de salariés de sa boîte en leur disant : " inutile de vous mettre en grève : bientôt les Fosbots - les robots Foxcom - travailleront à votre place. "
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Fin janvier 2023, je sors enthousiasmé de la représentation aux Amandiers de "France Fantôme", une dystopie de Tiphaine Raffier qui interroge sur la technologie et la condition humaine.

En "tête de gondole" de l'étal de la librairie dans le hall du théâtre, "changer de métier" accroche mon premier regard

Et vient faire écho à mes impressions à chaud de sortie de spectacle. 


Je travaille dans l'informatique, côté innovation et technologie. le moins que l'on puisse dire est que ce livre m'a bousculé, dans le bon sens du terme. Obligé à me questionner sur mes choix de vie, de carrière. 


En quelques lettres bien choisies, Céline Izoard prend l'exemple de la voiture autonome comme le projet techno-délétère par excellence et enjoint les ingénieurs de refuser de travailler sur ce genre de projets. 


Le propos apparaît un peu manichéen et fait pour moi fi de l'intrication des avancées technologiques entre différents projets, entre différents sujets. le livre est entièrement à charge. 


Néanmoins, dans notre époque actuelle ou nous sommes confrontés avec le dérèglement climatique à une menace existentielle comme l'humanité n'en a jamais connu, le livre a le grand mérite de nous obliger à nous poser la question de comment nous voulons organiser nos priorités dans les contributions que nous apportons à la société par notre activité professionnelle. 

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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
On est obligé de se demander quel rapport ce projet-là entretient avec la situation tragique qui est maintenant la nôtre, l'emballement climatique, l'extinction massive des espèces, la raréfaction de l'eau potable.
(...) Pourquoi, dans un monde empoisonné par le chômage et la pollution, n'y aurait-il rien de plus urgent que de mobiliser les universités et les centres de recherche les plus prestigieux, d'impliquer, bientôt, toute la société, dans le but d'accomplir cette prouesse : faire conduire les véhicules par des machines?
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Les techniques de production de l'électronique sont particulièrement intensives : elles mobilisent énormément de substances qui ne se retrouvent pas dans le produit fini (à masse égale, en termes de ressources mobilisées et d'intensité du processus, il est beaucoup plus polluant de fabriquer une puce électronique qu'un sèche-cheveux).
(p. 33)
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Pourquoi, dans un monde empoisonné par le chômage et la pollution, n'y aurait-il rien de plus urgent que de mobiliser les universités et les centres de recherche les plus prestigieux, d'impliquer, bientôt, toute la société, dans le but d'accomplir cette prouesse : faire conduire les véhicules par des machines ?
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Voici une évidence qui s'est imposée à nous en discutant avec les roboticiens du Laas : la capacité d'un chercheur à penser l'impact concret des technologies sur la vie des gens est proportionnelle aux distances sociales et physiques qui les séparent.
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" Les véhicules autonomes sont indispensables", par exemple : une fois que les alternatives auront disparu, ce sera devenu vrai. C'est souvent par ce genre de prophéties autoréalisatrices que les nouvelles technologies deviennent hégémoniques.
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Videos de Celia Izoard (6) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Celia Izoard
Alors que la voiture électrique est désormais une réalité qui connaît un certain succès commercial, la production de batterie nécessite des tonnes de matières premières et notamment du Cobalt. Ce nouvel or bleu est un métal toujours plus prisé mais très inégalement présent sur Terre. Pour le marché européen, c’est une nouvelle fois le continent africain qui est ciblé, avec principalement la RDC qui présente les plus gros gisements au monde… mais aussi le Maroc, qui détient plus de cobalt que la Chine.
Et c’est justement dans le sud du Maroc que la journaliste indépendante Célia Izoard est allée enquêter, pour le compte du média spécialisé Reporterre, sur une situation sanitaire et sociale désastreuse qui vient éclabousser les constructeurs allemands et français, BMW et Renault.
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