AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Annabel Blusseau (Autre)
EAN : 9791037511669
Les arènes BD (18/04/2024)
4.09/5   16 notes
Résumé :
Lors de la grande chasse aux sorcières qui a touché l'Europe au XVe siècle, la dénonciation de la sorcellerie et l'essor de l'imprimerie sont étroitement liés, à des fins de propagande. L'un des ouvrages imprimés permettant de répandre la terreur est alors le Malleus Maleficarum.
Que lire après L'Imprimerie du diableVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
"L'imprimerie du diable" est un ouvrage de très belle facture et à l'intrigue intéressante.
Toutefois, je reste un peu mitigée sur ma lecture pour plusieurs raisons. J'étais assez convaincue par l'intrigue en général, puis j'ai été de moins en moins convaincue à partir du milieu et j'ai fini déçue par la façon dont cette BD se termine.

Après lecture des remerciements de dernière page, je crois avoir compris que ce récit a mis dix ans à voir le jour et est passé à travers les mains de plusieurs dessinateurs et différentes maisons d'édition... et je pense que c'est ce qui peut expliquer en partie ma gêne graduelle.
J'ai une impression globale de quelque chose qui me dérange, en plus d'une direction du récit qui ne correspond pas à ce que j'attendais. Graphiquement c'est pareil, je trouve les cases inégales : globalement ça fonctionne pour de la BD franco-belge de type médiéval, il y a quelques fulgurances surtout en termes de couleurs, mais sinon c'est quelque peu déséquilibré.

Concernant l'intrigue, je l'ai trouvée très prometteuse et qui amène une approche un peu originale pour explorer l'époque : tout simplement un Romeo et Juliette religieux.
Étienne est un fils de paysan, loin d'être un fervent chrétien, mais ayant soif de connaissance et d'autre chose que la vie du village ne peut lui offrir... Reine est la petite-fille d'une guérisseuse et déjà en apprentissage pour devenir la future "mère" du village. Amoureux mais conscients de leurs différences, Reine promet à Étienne de l'attendre et Étienne lui promet de revenir un jour dans leur village natal, avant de s'enfuir dans la nuit.

On retrouve les deux jeunes gens bien des années plus tard : Reine est devenue la guérisseuse du village et cohabite sans problème, comme son aïeule avant elle, avec la foi catholique et les messes du curé local.
Étienne, lui, est devenu imprimateur à Genève et expert en démonologie. Son savoir des connaissances et rituels de Reine, son ancienne amante, lui a permis d'être propulsé expert en démonologie et d'éditer et d'imprimer nombre de manuels définissant la sorcellerie. Étienne compte donc parmi les hautes sphères de l'Inquisition et semble en symbiose avec le fanatisme catholique qui ne fait que grandir au fil des années.
Forcément, ses ouvrages auront des répercussions énormes et leur application ira même jusqu'aux frontières de son village d'origine, surtout pour le pire...

Jusqu'ici, j'étais vraiment convaincue par l'intrigue et le développement que les auteurs étaient en train de faire. Néanmoins, à partir des retrouvailles de Reine et Étienne, c'est là que j'ai de moins en moins accroché.
En effet, j'ai trouvé que le récit manquait de plus en plus de finesse à partir de ce moment-là. On avait bien compris ce que voulaient dire les auteurs, on n'avait pas besoin d'en rajouter autant : le fanatisme religieux, c'est très mal, évidemment, et les agissements de l'Église étaient affreux, abjects.
A mes yeux, mettre autant l'accent sur le côté manichéen du récit aurait eu plus de sens s'ils s'étaient axés sur l'aspect tragique et avaient été au bout de cette idée-là ; mais comme ce n'est pas le cas, j'ai déploré ce manque de finesse alors qu'avant ce n'était pas le cas.

Ce qui m'amène à parler de la fin ! Toute la dernière partie du scénario m'a désarçonnée car je ne m'attendais pas à ça et je dois avouer que même si j'ai compris après pourquoi les auteurs avaient opté pour ça, j'en reste quand même déçue.
Je pense que l'ensemble aurait eu plus d'impact si .
Ceci dit, après avoir réfléchi à la BD à froid, j'ai réalisé que malgré sa construction, ce roman graphique n'est pas qu'une dénonciation du fanatisme religieux, des erreurs de l'Histoire, non. Ce récit est en son coeur une histoire d'amour, et je ne l'avais pas réalisé.

Il n'empêche que malgré les reproches que je fais, cette BD est une bonne lecture, réfléchie et recherchée et qui a le mérite d'être originale.
Commenter  J’apprécie          110
« - Nous oublier et nous trahir de cette manière ! Lui ! Je n'arrive pas à y croire…
- Etienne est parti il y a bien longtemps. Il a tracé son chemin et il appartient à un autre monde. Il fait ce qu'il pense devoir faire… Pour le bien de son monde…
- Un monde responsable de la mort horrible de toutes ces femmes ? Ces femmes dont je fais partie. Comment est-il devenu ce monstre capable des pires horreurs ? Comment ? Il faut que je sache… Je sais que vous correspondez tous les eux. Laissez-moi lui écrire, lui faire entendre que le diable n'est pas là où il croit qu'il se trouve. Il comprendra qu'il fait fausse route et il retrouvera le chemin de ce coeur qu'ils lui ont fait oublier. Etienne ne peut pas être d'accord avec les atrocités qui sont commises sous son patronage. Je le sais… »
Virginie Greiner et Annabel, L'Imprimerie du Diable (Les Arènes BD , avril 2024), pp.61-62
Oui, il faut saluer ce fantastique roman graphique (bon, on ne se disputera pas sur la définition du genre… Ici, il y a bien un vrai long et bon « roman », une narration qui, même sans illustrations, captiverait le lecteur). le dessin d'Annabel est réaliste, toujours précis, rendant avec une vraie puissance d'évocation les décors urbains comme les paysages sylvestres, les gestes des personnages et l'expression des sentiments qui les habitent. Une belle robe iconographique pour une formidable intrigue, troussée avec soin par la talentueuse Virginie Greiner, une histoire qui noue, dans une tragédie implacable, une chasse aux sorcières et l'aventure d'un amour contrarié.
A Vernoux (rien ne situe précisément ce lieu dans le texte, même si une partie de l'action se déroule à Genève, d'où l'idée apparue dans certaines critiques que l'on serait à proximité de la Suisse… Mais aussi bien, pour flatter le chauvinisme ardéchois, on pourrait penser, et les images de campagne et de forêt l'autorisent, qu'il pourrait s'agir de Vernoux-en-Vivarais…), un petit village, au début de l'année 1470, les habitants survivent tant bien que mal, comme la plupart des populations rurales dans l'Europe de l'époque, affrontant famines et maladies, subissant les violences imposées par la soldatesque ou les pouvoirs ecclésiastiques. Initiée à cet art par sa grand-mère, la jeune Reine Percheval, encore adolescente, aide ses voisins à se soigner, à mettre leurs enfants au monde ou à protéger leurs cultures, grâce à sa connaissance des plantes ou des ressources animales, tout un savoir sauvage et magique qui lui permet d'accomplir des miracles. Et personne ne songe à mettre en cause les bienfaits qu'elle accomplit quotidiennement, à commencer par un curé tolérant et qui lui-même semble un fervent adepte de cette médecine naturelle. Personne, sauf le père d'Etienne, un jeune homme à qui le curé a appris à lire et vénérer les choses de l'esprit, un grand adolescent qui est aussi amoureux de la belle Reine, laquelle partage ses sentiments. Ce père, un pauvre bougre jaloux de la complicité qui s'est instaurée entre le curé, la jeune femme et son fils, maltraite ce dernier, au point de l'amener à fuir la maison familiale et le village, non sans qu'il ait promis à Reine de revenir…
Sur son chemin, Etienne croise un homme, propagandiste de l'Eglise arpentant les campagnes pour y distribuer des libelles contre ceux, et surtout celles, que l'on accuse de sorcellerie. Ce compagnon lui propose de l'accompagner dans son retour à Genève, « la grande cité où chacun se consacre à faire naître le monde de demain », un monde où, malheureusement, l'Eglise renforcerait, pour le bénéfice des puissants, son emprise spirituelle sur la société. Il fait découvrir à Etienne, ébloui, tant il aime depuis longtemps tout ce qui touche aux livres et à la connaissance, le principal atelier d'imprimerie de la ville. C'est là qu'Etienne apprendra le métier d'imprimeur, jusqu'à éditer lui-même des ouvrages, dont le Malleus Maleficarum, un traité de démonologie permettant de reconnaître tous les signes dénonçant les pratiques de sorcellerie. Oubliant son ancienne complicité avec Reine, dont il partageait tout le savoir sur les vertus des plantes, il devient le pire des propagandistes de l'Eglise. Désormais considéré comme un expert, il est bientôt envoyé dans les campagnes pour assister les juges dans les procès de sorcellerie. Un jour, on apprend que trois soldats prétendent avoir été victime d'une de ces femmes servantes du Diable dans le village de Vernoux, et Etienne, sans trop savoir à quoi s'attendre, s'empresse de proposer ses services…
Au-delà de son scénario captivant, ce roman graphique dresse un tableau formidable de cette époque et de ses fantasmes angoissants, montrant comment le peuple était manipulé par la peur. Comme le titre l'indique, le lecteur comprend vite que le Diable est certainement beaucoup plus du côté des imprimeurs que de ces femmes que l'on accuse de sorcellerie. D'ailleurs, les pages des libelles ou des traités de démonologie qui apparaissent dans les mains des propagandistes catholiques ou des juges évoquent, avec leurs dessins naïfs de bûchers et de femmes juchées sur des balais, de sympathiques planches de bandes dessinées… On a là comme une mise en abyme, en négatif, du pouvoir de « ces petits dessins qui valent un long discours », comme si ces enluminures prédisaient aussi les puissances du neuvième art, d'une BD qui se veut pourtant souvent, comme celle que l'on a entre les mains, porteuse d'un message d'émancipation ! Un roman qui rappellera à ceux qui les ont lus Anna Thalberg, le passionnant roman d'Eduardo Sangarcia (La Peuplade, 2023), évoquant une superbe figure de femme libre accusée de pratiques malignes, ou le Sorcières de Mona Chollet (La Découverte, 2018) essai mettant en perspective cet imaginaire de la sorcière à travers l'Histoire, encore actif aujourd'hui comme un épouvantail que l'on agite face aux femmes manifestant farouchement leur désir de liberté. Et puis, peut-être qu'au bout du compte, l'amour, comme le meilleur langage de compréhension de l'autre, pourrait bien triompher de tristes ressentiments et de mauvaises haines… Mais on vous laisse découvrir vous-mêmes la fin de cette histoire pleine de bruit et de fureur !
Commenter  J’apprécie          40
Etienne et Reine sont nés dans le même village. A l'adolescence, ils tombent amoureux : lui le jeune érudit et elle la petite fille de la rebouteuse. Ne pouvant faire d'études, Etienne s'enfuit pour Genève et promet à Reine de revenir. La jeune fille poursuit son éducation d'herboriste, de connaissances des potions auprès de sa grand mère et prend sa place quand celle ci meurt. le curé du village qui a permis à Etienne d'acquérir ses connaissances, la protège, persuadée que la science des simples ne vient pas du diable.
Mais à Genève, certains intellectuels souhaitent laisser le peuple dans l'ignorance, en l'éduquant le moins possible et en luttant contre tout ceux qui pouraient s'élever contre cette volonté. Entre autres les femmes qui par leurs connaissances présumées non scientifiques leur échappent. Leur but? Conserver le peuple corvéable à merci. POur cela il suffit de faire reparaitre la peur du diable. Et pour combattre les sorcières, il faut s'inspirer d'un livre terrible "le malefis maleficarum" ou le marteau des sorcières.
Etienne qui lors de son arrivée dans la grande ville a été employé dans une imprimerie et est devenu le garant de ces ouvrages qui permettent de cibler ceux qui pourraient résister à l'autorité. Après ces années en ville, le jeune homme a oublié le village et ne souhaite pas y retourner. Mais suite à la plainte d'un habitant revanchard, son propre père, persuadé qu'Etienne est parti à cause de Reine, il va devoir s'y déplacer pour décider s'il y a un nid de sorcière...La confrontation avec Reine sera terrible, mais suffira t'elle à ébranler ses nouvelles convictions?
Une intrigue féministe qui a repris la fameuse chasse aux sorcières menée en XVeme siècle, en y intégrant une nouvelle cause ; le fait que l'imprimerie, outil sensé apporté l'éducation à tous, ai permis aussi de disséminer des idées réactionnaires, celles crées de toutes pièces comme la peur du diable , pour pouvoir maintenir la docilité du peuple par la peur, celle du diable. Avec comme contrepartie celle des sorcières, trop indépendantes à leur gout. Une histoire forte avec un personnage ambigüe comme Etienne, convaincu par les idées qu'il essaime alors qu'il a connu des femmes comme Reine et sa grand mère.
Des personnages bien campés, un suspens bien repris, à lire.
Commenter  J’apprécie          50

Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
- Il a été catégorique. Il prétend que s’il se sait qu’il utilise les rites magiques, il aura des ennuis… Qu’il faut s’adresser à notre curé maintenant…
- Mais ces rituels, se pratiquent depuis des siècles et ont toujours prouvé leur efficacité !
- Il semblerait que les temps soient au changement…
Commenter  J’apprécie          10
La peur est le plus violent des poisons. Seuls la paix et le partage apportent toutes les guérisons.
Commenter  J’apprécie          20
Écoute, ce que la lune te souffle. Car elle est l’astre de tous les mystères, et jour après jour, elle te les révélera…
Commenter  J’apprécie          10
Il faut toujours laisser croire au peuple qu'il y a une échappatoire possible.

Trop de terreur et de désespoir empêchent la soumission de s'installer complétement...

Oui, quand les gens n'ont plus rien à perdre, ils sont moins contrôlables ! Ah ! Ah !
Commenter  J’apprécie          90
Tuer notre monde, le soumettre ! C'est ce qu'ils désirent plus que tout. Et pour cela, ils ont fait du diable leur plus fidèle soutien.
Commenter  J’apprécie          50

Video de Virginie Greiner (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Virginie Greiner
Dans le 175e épisode du podcast Le bulleur, on vous présente la trilogie marseillaise qui regroupe les trois albums Marius, Fanny et César, adaptation des ouvrages de Marcel Pagnol par Eric Stoffel et Serge Scotto avec Sébastien Morice, Amélie Causse, Winoc et Victor Lepointe pour le dessin et c’est édité chez Grand angle. Cette semaine aussi, on revient sur l’actualité de la bande dessinée et des sorties avec : - La sortie de l’album Retour à Lemberg, adaptation en bande dessinée du livre de Phillipe Sands que l’on doit au scénario de Jean-Christophe Camus, au dessin de Christophe Picaud et c’est édité chez Delcourt - La sortie de l’album L’imprimerie du diable que l’on doit au scénario de Virginie Greiner, au dessin d’Annabel et c’est édité chez Les Arènes BD - La sortie de l’album Coccinelle, chercher la femme, album que l’on doit à Gloria Ciapponi pour la partie scénario, Luca Conca pour le dessin et c’est édité chez La boite à bulles - La sortie de l’album Truman Capote, Retour à Garden City que l’on doit au scénario de Xavier Bétaucourt, au dessin de Nadar et c’est édité chez Futuropolis - La sortie de l’album Les ennemis du peuple que l’on doit au scénario d’Emiliano Pagani, au dessin de Vincenzo Bizzari et c’est édité chez Glénat - La réédition dans la collection La bibliothèque de Daniel Clowes, qu’édite la maison Delcourt, de Caricature, titre que l’on doit à Daniel Clowes
+ Lire la suite
autres livres classés : chasse aux sorcièresVoir plus
Les plus populaires : Bande dessinée Voir plus


Lecteurs (40) Voir plus



Quiz Voir plus

Quelle guerre ?

Autant en emporte le vent, de Margaret Mitchell

la guerre hispano américaine
la guerre d'indépendance américaine
la guerre de sécession
la guerre des pâtissiers

12 questions
3231 lecteurs ont répondu
Thèmes : guerre , histoire militaire , histoireCréer un quiz sur ce livre

{* *}