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Expert roman graphique

Cet insigne distingue les lecteurs qui apprécient les bandes dessinées qui ne sont plus destinées qu'aux enfants, à la croisée des chemins entre littérature et 9ème art. D'Hugo Pratt à Art Spiegelman en passant par Will Eisner.
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Jim

« À l’heure de la promenade, je ne t’ai pas vu

Tu devais pourtant m’attendre quelque part… »

Les promenades, sous le soleil, la pluie, la neige, le vent, …

Une longue promenade tous les jours pour Jim et François, un rituel immuable.

Mais un jour, un vide, un manque terrible, plus de promenades, Jim n’est plus là, emporté par la vieillesse et ses treize ans déjà passés.

François Schuiten met en dessins sa peine dans un très bel et court album en noir et blanc en petit format. Il relate la complicité perdue homme-chien faite de tant de bons moments partagés, le regard vaguement soupçonneux ou envieux des autres…

Une tendre déclaration de l’auteur aux chiens, leurs bons yeux remplis d’attente, d’espoir, d’envies de jeu, de bonheur … un rêve de petite fille que j’ai caressé de nombreuses années.

Mais quand la question m’a été posée :

- Qui sortira le chien quand il pleuvra ?

J’avais répondu ingénument « Ben toi Papa ! », j’ai compris trop tard que cette réponse n’était pas la bonne, et je n’ai jamais eu de chien.

Je me suis consolée avec le chien de ma cousine que j’avais plaisir à promener pendant les vacances et toujours partant pour fuser comme une balle après les bâtons que je lui lançais.

Tous les amoureux des chiens se plongeront avec émotion dans ces dessins délicats, pleins de nostalgie de tendresse, un bel hommage de l’auteur à son cher flat-coated retriever.

Je conclue avec les mots d’Audrey Jougla en préface : [Ce livre] est surtout une ode à la joie de vivre, cette joie qui caractérise si bien le chien, et un hommage au bonheur que l’on connaît avec cet ami hors du commun. »

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Les âmes fendues

(LX971) - Un peu déçu par cet album dont le sujet est pourtant si important, difficile et complexe tout en étant rarement exploré en BD : le quotidien d'un hôpital psychiatrique à travers le vécu des soignants et des patients qui souffrent d'une pathologie chronique, la schizophrénie. A trop vouloir être didactique et révéler les différentes facettes de ce quotidien, on s'y perd et on a du mal à dégager une émotion ou une meilleure compréhension de ce qui demeure le plus souvent lointain, à l'écart de la société. Malgré l'effort de colorisation des patients, les dessins n'aident pas à s'y retrouver, faisant qu'on a souvent du mal à comprendre qui est qui, les jeunes par ex ressemblant à des vieux et vice-versa. Il n'en demeure pas moins que l'album apporte son lot d'informations et que cela pourra aider à cerner (un peu) l'inexplicable. de même, on ne peut qu'être admiratif des personnels qui travaillent au quotidien auprès des patients en proie à leurs hallucinations. En ce sens au moins, la BD est réussie. Cela étant, en se concentrant sur 2 ou 3 parcours de soignants/patients, avec des graphismes plus réalistes, l'album aurait gagné en force et en émotions, sans sacrifier la dimension pédagogique ici clairement assumée. Non à regret pour la sélection du Prix BDz'îles.
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Contrition

Club N°52 : BD sélectionnée

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Un homme, anciennement condamné pour pédophilie, est retrouvé brulé dans la ville de Contrition, lieu où vivent de nombreux condamnés identiques qui sont selon la loi de Floride interdit de vivre à moins de 300 mètres d'une école, d'un parc, d'un air de jeu… soit à peu près partout.



Une journaliste de la ville voisine commence son enquête pour comprendre ce qu'il s'est passé.



A travers une construction non chronologique, suivant plusieurs des personnages principaux, Portela et Keko livre une BD très sombre aussi bien dans les thèmes que dans les visuels.



Intéressant pour la réflexion sur le traitement judiciaire que les États-Unis réservent à ces condamnes, et un polar qui plonge dans la réflexion sur la frontière entre l'attrition et la contrition.



Belle découverte.



Greg

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Un thriller bien ficelé dans une communauté de pédocriminels.



Ambiance très noire et réussie, pour un sujet très sensible.



Mörx

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Un album très noir sur un sujet difficile.



Une réussite !



Clément

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Très bonne BD d'enquête au sein d'une communauté de pédocriminels.



Noir à la fois sur le fond et sur la forme, découpage intelligent, personnages fouillés, une excellente BD dans ce genre.



Gilles

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Les yeux fermés

Les yeux fermés par Héloïse Martin, Baptiste Magontier, Valentine de Lussy, Éditions Dupuis



Lors d'une réunion familiale pour fêter l'anniversaire de mariage des grands-parents, Émilie est choquée en voyant un invité, membre de la famille. Comment celui qui a été reconnu coupable de pédophilie par la justice a-t-il pu être invité ? Émilie va devoir affronter les membres de sa famille et ils devront choisir. Pour cette fête, c'est lui ou elle...



Par cette bande dessinée, les auteur(e)s nous interpellent sur le sujet de l'inceste familial. Comment ce grave sujet est perçu par les membres d'une famille et quel soutien apportent-ils aux victimes ?

J'ai lu et vu un certain nombre de romans et films sur ce thème là et je suis toujours abasourdie de voir la réaction de la cellule familiale lorsqu'elle prend parti pour l'agresseur. Ce dernier va être au pire condamné par la justice à quelques années de prison. Très régulièrement, il reprendra sa place au sein de sa famille limite comme victime.

Quant à la vraie victime, condamnée elle à vie par le traumatisme, elle devrait en plus, subir les réflexions de sa famille. C'est à ça quelque part qu'Héloise Martin a dit non. Elle a eu le cran de dire que c'est elle la victime.



J'ai beaucoup aimé cette bande dessinée tant par les dessins que par le scénario basé sur l'histoire d'Héloïse Martin. Bravo à elle pour ce témoignage et aux deux auteurs de l'avoir retranscrite



Merci à #NetGalleyFrance et aux éditions Dupuis pour l’acceptation de ma demande de lecture.

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La saga de Grimr

Encore une fois, Jérémie Moreau nous prouve qu'il était fait pour être conteur en images. Il possède un sens de la mise en récit très particulière. A travers une histoire d'amitié et d'homme, un enfant est obligé de grandir plus vite que prévu. La vie sur une île volcanique est plus difficile qu'ailleurs. La rudesse du milieu fait écho à la rudesse des habitants. Grimr grâce à sa volonté et sa détermination va s'en sortir de bien des situations difficiles. Par contre, face à l'hypocrisie de l'humain et son narcissisme, il ne pourra rien. Et cela va créer sa perte. Peu de gens verront le gamin extraordinaire et déterminé qu'il est vraiment. Grâce à un auteur de saga, sa mémoire ne se perdra jamais. La bravoure ne compte pas le nombre d'argent hérité de son père ou détourné. Grâce à la tradition de l'écrit, celui qui n'avait pas de nom, a pu acquérir un statut d'homme en sauvant un village d'une mort certaine.



Niveau graphisme, on est loin du classicisme. On garde des cases et le reste c'est de la couleur. On y admire ces paysages sauvages, dures et rudes. Les teintes sont foncées, alliant marron et vert. Un travail combinant un crayonné numérique avec de l'aquarelle. Il souligne à merveille les conditions périlleuses dans lesquelles évoluent le personne principal. D'autant plus que l'on voit des traces de crayons. On sait que le bédéaste pourrait faire quelque chose de très précis et net.
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Heartstopper, tome 5

Cela fait un moment que j'ai lu le début de ce comics (mais j'ai regardé la série tv entre-temps pour me remettre dans l'univers). J'ai été très heureuse de retrouver les personnages d'Alice Oseman et cette belle luminosité qui se dégage du récit.

Ce tome aborde le côté sexuel d'une relation amoureuse, le tout avec bienveillance et acceptation, mais également l'équilibre fragile entre l'individualité et le couple... Faut-il faire passer l'autre avant soi ? Comment envisager d'être séparé ? Quel avenir pour une relation à distance ?

Autant de sujets importants dans la construction de soi à l'adolescence que ce soit dans la communauté LGBTQIA+ ou autres...

Maintenant j'attends avec impatience la suite de la série afin de savoir ce que l'avenir réserve à Nick et Charlie.

Une série doudou, qui fait du bien par le regard qu'elle porte sur la société.
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Dernier week-end de janvier

C'est un ami qui est aussi mon metteur en scène dans la pièce de théâtre pour laquelle je joue qui m'a prêté cet ouvrage et je l'en remercie vivement car sans lui, je serai probablement passé à côté de ce magnifique livre.



Ici, le lecteur se voit plongé dans l'euphorie du festival d'Angoulême, l'un de mes rêves, à savoir participer en tant que visiteuse bien sûr à ce prestigieux festival de la bande-dessinée, moi qui me remets à peine du dernier festival du Livre organisé dans ma ville pour la deuxième année consécutive. Pour les auteurs, cela doit être fatiguant certes mais aussi exhalant de rencontrer ses fans qui vous disent sans arrêt qu'ils adorent ce que vous faîtes. Mais il y a aussi la rencontre avec les autres auteurs qui font partie du même milieu que vous donc avec lesquels forcément vous avez des affinités mais il y aussi la rencontre avec le public, pas nécessairement des fans d'ailleurs. C'est ce qui arrive à notre protagoniste, Denis, scénariste venue dédicacer sa dernière BD sur Hitler. C'est à cette occasion qu'il va faire la rencontre de Vanessa,, une belle ORL qui est venue avec son mari à Angoulême. C'est plutôt lui d'ailleurs qui est fan de la bande-dessinée mais entre Denis et Vanessa va naître une sorte d'alchimie au cours de ces quelques jours - bien qu'il soit plus vieux qu'elle et que sa femme et ses deux grands fils l'attendent à Paris - une sorte de coup de foudre qui ne s'explique pas et qui, ils le savent parfaitement tous les deux, ne pourra durer que le temps de ce festival, un temps hors du temps mais une rencontre dont on se souviendra longtemps...



Un roman graphique inspiré de faits réels pour ce qui est des auteurs mais dont tout le reste est tout droit sorti de l'imagination de l'auteur (quoique), tout en noir et blanc avec parfis juste une esquisse des personnages, notamment lorsqu'ils sont dans les fêtes (le off du festival), ce qui m'a littéralement bluffé car cela m'a étrangement plongé dans l'ambiance d'un seul coup, moi qui ai encore de grandes lacunes en ce qui concerne mes connaissances sur le 9ème art ! Une lecture que je ne peux que vous recommander en vous assurant que, fans de BD ou pas, vous ne serez pas déçus !
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Les Ouïghours, un peuple qui refuse de mourir

Club N°50 : BD sélectionnée

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On suit un journaliste, sur plusieurs années, qui essaye avec ses moyens de montrer au monde entier ce que subit le peuple ouïghours en Chine.



Très bon documentaire, agréable à lire et surtout très instructif !



A mettre entre toutes les mains.



Mel

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Très bon documentaire sur le peuple ouïghours et la répression chinoise, par un journaliste qui mène l'enquête depuis 25 ans.



Clément

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Tom Thomson : Esquisses d'un printemps

Il faut exprimer les émotions que la nature inspire.

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Ce tome contient une histoire complète de nature biographique. Sa première édition date de 2019. Il a été réalisé par Sandrine Revel pour le scénario, les dessins et les couleurs. Il évoque la vie de Tom Thomson (1877-1917), peintre canadien. Il comporte cent-trente-quatre pages de bande dessinée. Il se termine avec une reproduction d’un tableau du peintre, intitulé The West Wind (1917, huile sur toile120*130cm), et une postface de deux pages intitulée Tom Thompson et le Groupe des Sept. Revel est également l’autrice de Glenn Gould une vie à contretemps (2015), Grand silence (2021) avec Théa Rojzman, Germaine Cellier : L'audace d'une parfumeuse (2023) avec Béatrice Égémar.



Octobre 1956, le narrateur Peter Frahm pagaye sur le lac avec un ami. Les deux voyageurs le traversent à la recherche d’un endroit où faire des croquis. Ils pagayent en rythme alternativement, sans parler. Le paysage fait penser le narrateur à une esquisse de Tom Thomson : des pins, un élan en train de brouter, puis qui relève la tête. Ils arrivent à la rive nord. Ils passent devant le vieux Womat Lodge en partie reconstruit après avoir été détruit par un incendie dans les années 1920. Tout est calme. Il n’y a plus de touristes. L’automne les a fait fuir. Le narrateur demande à Peter s’il reconnaît. Ce dernier répond que rien n’a changé depuis le collège, c’est ce qu’il lui semble. Dans l’onde transparente, ils voient passer une truite. Ils finissent par accoster sur une rive. Le narrateur se rince le visage dans l’eau de la rivière. L’autre estime qu’ils seront bien là, pour dessiner. Ils s’enfoncent un peu dans la forêt. La colline est illuminée. Il fait encore chaud, ils la gravissent impatients. Ils marchent sans s’arrêter sur presque un kilomètre à travers une végétation dense. Puis ils atteignent une construction : ils y sont.



Juillet 1917, quelques oiseaux s’envolent au-dessus du fleuve. Doc est réveillé par le bec d’un oiseau tapotant sur le carreau de sa cabane. Il se lève, l’oiseau s’envole et s’éloigne. Fraser s’adresse à lui : il va falloir y aller. Doc lui demande s’il connaît l’histoire de cette truite impossible à attraper au barrage du lac Joe. Il pense à elle. Il pense à ce défi ridicule. Il continue : Tom était un mordu de l’hameçon. Il péchait avec ses propres mouches. Doc, lui, a l’habitude d’utiliser ce qu’il a sous la main mais rien à faire, elle est coriace. La dernière fois qu’il a vu Thomson, la toute dernière, il se souvient, l’artiste lançait sa ligne au barrage avec Shannon Fraser. Il lui semble que c’était lui. Il s’est même dit, cette fois-ci il va l’avoir et il va en entendre parler. Le soleil brillait comme aujourd’hui. Les hommes portent le cercueil de Tom Thomson pour le mettre en terre. Maggie, une jeune fille, semble particulièrement attristée, elle croit voir une main de femme tenant un pinceau sortir doucement de la rivière et disparaître. Une femme dans une sobre robe noire jette une poignée de terre sur le cercueil et pleure de chaudes larmes. Elle s’appelle Winnifred Trainor. Tom et elle se seraient fiancés, sa famille possède un chalet au lac Canoe. Le fossoyeur commence à pelleter la terre sur le cercueil.



Qui ça ? Il s’agit d’un récit biographique relatif à Tom Thomson (1877-1917), un peintre canadien dont la carrière a duré cinq ans. Entre autres, il a réalisé des peintures de la nature sauvage de l’Ontario. Au cours du récit, un mentor lui intime d’arrêter d’imiter la nature. Il faut exprimer les émotions qu’elle leur inspire. Ils doivent regarder en eux-mêmes. Le récit débute en 1956, c’est-à-dire trente-neuf ans après le décès de l’artiste, alors que deux hommes naviguent en canoë sur le fleuve qui va les mener vers le lieu où ils pensent que se trouve la vraie sépulture du peintre. Ce fil narratif se déroule de manière chronologique ces deux personnes, plus tard accompagnées par deux autres (soient Peter Frahm, Rick Tapes, Ben Green et le narrateur) pour rechercher la tombe de Tom Thomson, et donc son cadavre afin d’éclaircir les circonstances de son décès. Cette ligne temporelle compte dix scénettes. Dans le même temps, un deuxième fil narratif évoque des moments de la vie du peintre. Celui-ci commence en 1917, avec la découverte de son cadavre, et va se dérouler à peu près à rebours. Il comprend seize scénettes se déroulant successivement en 1917 (sept occurrences), 1916, printemps et été 1915, puis automne 1915, 1912, 17 juillet 1917 (c’est-à-dire un retour à l’année de la mort de Thomson), 1906, non précisé (peut-être début du siècle et en 1956), 1904, 1887. Chaque date figurant en ouverture de scène, le lecteur n’éprouve aucune difficulté à se repérer, et il voit comment la construction à rebours vient éclairer certaines décisions, certaines situations.



L’autrice a donc choisi une construction narrative très particulière pour évoquer la vie et l’œuvre de cet artiste majeur du début du vingtième siècle, pour le développement de l’art au Canada. La découverte à rebours de sa vie permet de ressentir d’abord les conséquences de moments où se sont cristallisés des principes ou des valeurs qui ont constitué la personnalité de Thomson, et par voie de conséquence de mieux mesurer leur importance en les découvrant ultérieurement. Ainsi ils recèlent plus de sens. Le lecteur se retrouve mieux à même de comprendre l’enjeu de sa relation avec Winnifred Trainor, puis avant sa présence au musée des Beaux-Arts de Toronto, la beauté de ses esquisses, la tentation de l’abstraction et la frustration des pieds plats, la communion avec la nature, la relation avec l’Ontario Society of Artists, l’emprise du parc Algonquin, la lettre d’Alice Lambert, l’influence du métier de son père sur sa vocation. En presque alternance, il suit la progression du narrateur et de ses amis dans leurs recherches, le parallèle de leur expérience de leur séjour dans le parc se faisant avec l’exercice du métier de garde forestier dans le parc Algonquin.



L’autrice se confronte donc à l’exercice d’évoquer la vie d’un grand peintre, de lui rendre hommage, à la fois de façon biographique, à la fois en évoquant son œuvre. En fin de tome, le lecteur dispose d’un aperçu de sa toile la plus célèbre The west wind, dans un format très réduit par rapport à l’original. S’il n’est pas familier de l’œuvre du peintre, il éprouve des difficultés à établir un lien visuel entre sa manière de s’exprimer au travers de sa peinture, la façon dont elle rend compte de sa sensibilité, dont sa personnalité s’exprime à travers ses toiles, et les choix graphiques de Sandrine Revel. S’il en est familier, il peut en relever les similitudes, et relever comment elle s’inspire du regard de Tom Thomson pour réaliser ses propres pages. Le lecteur observe rapidement quelques caractéristiques majeures : l’utilisation de cases rectangulaires sagement disposées en bande, l’absence de bordure tracée pour les cases, une palette de couleurs relativement restreinte pour chaque séquence, différente de l’une à l’autre avec quelques éléments de couleurs particuliers pour un pull, une chemise, une nappe, un bonnet, une fleur rouge, un renard, une truite, un oiseau. De ce point de vue, elle n’essaye de singer les caractéristiques des toiles du peintre.



D’un autre point de vue, elle met en œuvre le conseil de l’ami de Thomson : arrêter d’imiter la nature, exprimer les émotions qu’elle inspire à l’artiste. Au vu de la place qui est donnée à la nature dans ces pages, il se dit qu’elle s’inspire également du conseil du père de Thomson : La nature est une bonne vieille nourrice, on aime à se reposer sur son flanc. Le père continue en lui suggérant de prêter un tant soit peu l’oreille, alors la nature lui racontera des histoires merveilleuses et elle lui jouera sa musique enchanteresse. De fait, le lecteur apprécie de pouvoir voir les deux amis descendre la rivière, comme s’il les observait depuis un autre canoë et de prendre le temps de regarder les rives, représentées avec de petits traits secs. Puis il admire la présence massive et silencieuse de l’élan, la transparence de l’eau et la truite comme suspendue au-dessus du lit du fleuve, le vol de quelques oiseaux au-dessus de l’eau, le premier plan des arbres devant l’étendue d’eau, la silhouette des arbres penchées résultant de l’anémomorphose, le fin tronc des bouleaux rendus fragiles par contraste avec les flocons de neige, les longues plaines herbeuses, la zone de rapides d’un cours d’eau, etc. Dans ces pages, la nature renouvelle à chaque fois le spectacle, jamais deux fois identiques, une illustration de la maxime d’Héraclite (-544 à -480), on ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve.



Ainsi le lecteur se sent immergé aux côtés de Tom Thomson en lisière du parc Algonquin, ressentant l’incidence de la présence de la nature sur son inspiration, sur son mode de vie, sur la nature même de ses pensées. Il prend conscience que les recherches menées en 1956 reproduise la même immersion, validant en quelque sorte la démarche du peintre, à l’instar de la postérité qui a elle aussi légitimé et même validé sa vision artistique, son interprétation d’artiste de ce qu’il contemple. La scénariste décide également de mener à bien son entreprise, de proposer sa version des causes du décès de Tom Thomson. De prime abord, le lecteur se dit qu’il aurait pu se passer de cette dernière séquence, qu’il n’attache pas beaucoup de valeur à une hypothèse que rien ne pourra jamais valider. D’un autre côté, c’est la volonté de l’autrice, c’est son intention. Et en même temps elle n’affiche pas la prétention de détenir la vérité puisque le personnage qui énonce cette explication indique que c’est que qu’elle sait, et que son interlocuteur est libre d’en douter. Elle souhaite donc donner un sens à cette mort, et apporter une sensation de fin, de clôture, de donner un point de vue sur ce que l’artiste n’a pas pu surmonter ou éviter.



Pas facile de rendre compte de la vie d’un être humain et de l’œuvre d’un artiste. Sandrine Revel a construit un récit avec deux fils temporels qui s’entremêlent, le second venant comme une réponse au premier. La narration à rebours de la vie de Tom Thomson en fait comme un destin inéluctable, et en même temps l’esprit du lecteur rétablit l’ordre chronologique par automatisme, faisant apparaître la fragilité de ce destin, son caractère ténu et pas du tout évident. La narration visuelle s’inspire de la vision du peintre en exprimant les émotions générées par sa vie, ainsi qu’en prolongeant les propres émotions exprimées par les toiles du maître, à l’aune de la sensibilité de l’autrice.
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Jusqu'au dernier

Je dois être dans ma période Grand Ouest américain ou tout simplement western. Mais là, il ne s'agit pas la conquête de l'Ouest mais de la fin annoncée des garçons vachers convoyant des troupeaux de bétail pour alimenter les populations des grandes agglomérations, à cause du développement du rail et de l'implantation de gares dans des coins reculés.



J'ai été attiré par la couverture : ce visage en demi-ombre, avec une pluie battante, ce pistolet à la main et ce titre qui semble annoncer une hécatombe.



Russel a encore un troupeau a convoyé. Il découvre que son ami William est décédé mais il va aussi découvrir que la femme de celui-ci est aussi morte et qu'elle laisse un jeune garçon, Bennett qui est un peu simplet. Russel va le prendre sous sa coupe.



Lors de leur repos dans la ville, les cowboys de Russell se ressourcent mais un drame va arriver et Bennett va être retrouver mort. Il semble être tombé d'un arbre après avoir bu de l'alcool. Cela surprend Russell car Bennett n'avait jamais touché une goutte autre que de l'eau. Il veut retrouver l'assassin du garçon.



Le maire de la ville n'a pas besoin d'un scandale car il veut à tout prix que le train s'arrête à Sundance. Donc la mort de Bennett ne peut être qu'accidentelle ce que ne peut admettre Russell.



Russell va mobiliser des cowboys pour empêcher les gens de sortir de la ville. Il veut la justice et il est aidé par son bras droit Kirby.



C'est un western de fin de cycle qui montre la violence et la corruption qui pouvait exister dans l'Ouest. Les intérêts individuels passent avant les intérêts collectifs. L'appât du gain est le plus fort. C'est violent, c'est sanglant. Mais il y a aussi des valeurs : celle de l'honneur, celle de l'amitié, celle de la justice...



Les vieux cowboys ne meurent jamais de manière ordinaire et c'est encore le cas. Les hommes de l'Ouest habitués à la rudesse de leur métiers et de leurs mœurs ont du mal à montrer leurs sentiments.



J'ai aimé le scénario proposé et surtout la conclusion même si je m'attendais à une fin plus violente sur un fond de vengeance.



Superbe graphisme, superbe découpage des planches, superbe composition et organisation des cases, superbe travail sur la proposition des plans. les visages sont expressifs, les paysages sont réalistes et le tout est sublimé par la mise en couleurs.



Belle découverte.

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Rivages lointains

A Chicago, à la fin des années 30, Jules est un jeune immigré italien qui en a marre des petits boulots sous payés. Il va alors provoquer son destin en se faisant incorporer dans la mafia que la prohibition enrichit. Alors qu'il se sent enfin respecté, une guerre des gangs l'oblige à fuir à new York avec son chef et à tout reconstruire.



Ce volume épais porte plus sur une histoire d'amour toxique et sur l'ambition plus que sur la mafia américaine en elle-même. L'histoire est centrée sur le couple formé par Jules et Adam, dont Adam est clairement le dominateur. Jules guidé par l'amour et l'ambition n'hésite pas à mettre son innocence à la poubelle, jusqu'à se mouiller pour la mafia au point de faire des choses de plus en plus horribles sans sourciller. Quand le couple va devoir recommencer ses trafics à New York, tenu par la mafia italienne, le rapport de force va changer puisque tout doit passer par Jules d'ascendance italienne. Adam doit exercer une pression psychologique de plus en plus importante. Bref une relation toxique.

J'ai senti le potentiel de l'histoire mais je n'ai pas totalement été embarqué. Je n'ai pas trop aimé l'évolution de Jules. Son innocence initiale, son intégrité, son envie de vivre était tout à fait louable, avec sa gueule d'ange efféminé le voir se transformer en tortionnaire sans état d'âme est dure à avaler. Et la fin malheureusement est sombre et amère, sans doute mon coté fleur bleue mais j'aurais aimer le sauver. Raté. Des gens biens peuvent devenir les pires salauds sans avoir envie de changer...

Niveau dessin, le trait est simple et épuré. Les décors sont minimalistes, voire inexistants, centrés sur les personnages. Mais il est expressif et fait bien passer les émotions, avec ses couleurs pastels ils donnent un côté retro.
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Le printemps suivant, tome 1 : Vent lointain

J'aime beaucoup Margaux Motin. Son trait plein de vie, ses couleurs pepsis, son ton léger et girly, tout ça fait du bien !

Dans ce premier tome du "Printemps suivant", elle nous raconte les débuts de sa nouvelle vie au Pays Basque : l'installation avec son amoureux, leur famille recomposée avec les filles de chacun, leur maison à décorer... Que du bonheur me direz-vous, mais au final pas tant que ça, car il peut être difficile de se réhabituer à la vie de couple et à ses concessions. Leur amour saura t'il y résister ?

Même si j'ai déjà ma petite idée sur la réponse, vite, le tome 2 !!!
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La Distinction : Librement inspiré du livre d..

Dans sa première bd, Tiphaine Rivière avait abordé son parcours pour réaliser sa thèse. Un sujet assez rarement abordé dans le 9e art. Là, elle ose encore traité un sujet des plus originales avec une libre adaptation de "La distinction" de Pierre Bourdieu. On sent la jeune étudiante passionnée par la sociologie et qui veut transmettre. Cet ouvrage classique est un incontournable. Pourquoi ne mériterait il pas une adaptation en bd? Dorénavant, c'est chose faîte et avec beaucoup de talent. Nous n'en doutions pas vraiment.



a bédéaste traite les grandes lignes à travers un enseignant partageant sa vision de ce livre à ces élèves de lycée. Cela permet de mettre en scène l'analyse incisive des relations entre goûts et classes sociales. La plupart étant issu des classes les plus pauvres, ils commencent à voir le lien entre leur passion pour le foot, le rap et le statut social de leurs parents. Ils sont liés par leur condition et par conséquence, il peut probable qu'il puisse faire un glissement de classe. Se sont les élèves qui s'approprient les concepts pour les plaquer à leur quotidien. Leur bilan n'est pas réjouissant. L'échappatoire n'est pas forcément la volonté de tout à chacun. Prendre conscience est déjà une étape importante pour mieux se projeter et affiner ce que l'on veut vraiment. Les habitus ont la vie dure.



Une vulgarisation d'un très haut niveau. Qu'importe que l'on soit un ado ou un adulte, qu'importe son bagage intellectuel, on peut lire sans souci cette bd. Même si parfois, le texte d'origine est peu compréhensible à la première lecture, le contexte permet de lui donner du sens. Le choix du noir et blanc est très logique et s'impose comme une évidence. Son trait léger et très réaliste apporte de l'humanité et de la passion. Aucun personnage n'est trop cliché. On n'a pas de difficulté à reconnaître ces chers élèves que l'on croise facilement dans l'espace public. Cela ne donne pas forcément envie de se plonger dans le pavé incontournable. Néanmoins, on s'interroge aussi sur notre position, sur ce que notre famille nous a transmis, ce que l'on a gardé et si on voulait changer de place. N'hésitez pas à partager ce bouquin pour en discuter avec ces proches.
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Monsieur désire ?

J'ai beaucoup aimé cette bande-dessinéee qui nous emmène dans l'Angleterre du début du règne de la reine Victoria. Le contexte socio-historique est particulièrement bien rendu, tant par les dessins que par l'intrigue.



Londres, 1840. Lisbeth, jeune domestique au physique peu avantageux, travaille dans la maison d'Edouard, l'un des pires libertins du pays. Celui-ci qui se prend bientôt d'intérêt pour la jeune fille très vertueuse que rien ne semble pouvoir choquer.

Commence alors une relation étrange, faussée dès le départ par le gouffre social qui les sépare. Edward réclame l'attention et la présence de Lisbeth, lui raconte ses turpitudes et ses tentatives de tromper l'ennui en allant toujours plus loin dans ses frasques sexuelles. Lisbeth, qui a besoin de garder son emploi à tout prix, n'a d'autre choix que d'écouter l'aristocrate et même de le suivre dans ses expéditions nocturnes. Et, bien qu'elle soit touchée, par le mal-être du séduisant aristocrate, elle sait que rien de bon ne peut sortir de tout cela, ni pour lui, ni pour elle.



L'histoire est prenante. On se demande jusqu'où le spleen d'Edward va l'entraîner et on s'inquiète pour Lisbeth qui semble dans une impasse entre les attentions du maître et l'hostilité de certains domestiques qui lui en veulent de ne pas rester à sa place de domestique.



J'ai aussi beaucoup aimé les dessins qui donnent un vrai caractère au récit avec les silhouettes très marquées typique de la mode de cette période et les visages justes esquissés en quelques lignes épurées. Et puis il y a un vrai travail sur les couleurs posées en à-plats, avec par exemple beaucoup de bleu, gris, mauve pour illustrer la morosité du quotidien de l’aristocrate désabusé qui cherche à tuer l'ennui ou des planches en jaune et orange pour les nuits de débauches, etc. Les planches avec des couleurs "équilibrées" n'apparaissent que pour le dénouement,



Le livre se termine sur quelques pages éclairant sur le contexte historique et social avec de très belles illustrations en noir et blanc.



"Monsieur Désir ?" a donc été une belle découverte que je prendrai sans doute le temps de relire avant de rendre la B.D. à la médiathèque.

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Barcelona, âme noire

Un grand merci à Babelio et aux éditions Dupuis...



Barcelone, 1948. Dans le train qui l'emmène en France, Carlos Morena Vargas, en compagnie de deux amis, se rend à Marseille, où son cousin lui a promis du travail. À la gare de Banyuls-sur-mer, alors que la gendarmerie nationale contrôle leurs papiers, une femme prénommée Jocelyne remarque aussitôt que le jeune homme parle très bien le français. Elle lui propose, des fois que son cousin le laisse tomber, de venir la voir à Perpignan, où elle tient une épicerie, rue de la gare. L'un des ses amis remarque alors sa grande cicatrice dans la paume. Carlos se souvient alors de ce jour tragique, alors qu'il n'avait que 8 ans... Dans les décombres de son immeuble touché par les bombardements, il découvre sa mère, Engracia, quasiment nue, une croix entaillée sur le bas-ventre. Aussitôt, le voisinage l'éloigne de cette scène et le confie à Don Alejandro. Celui-ci le recueille chez lui et lui suggère d'aller s'amuser avec sa fille, Paula. C'est là, à l'abri des regard, que le petit Carlitos s'entaille la paume...



Au cœur de l'Espagne franquiste, sur plus de trois décennies, l'on suit le destin de Carlitos, avant qu'il ne devienne Carlos Vargas puis Don Carlos. De l'assassinat de sa mère à son exil en France en passant par son ascension jusqu'à devenir le caïd le plus redouté de Barcelone, ses trafics, ses nombreuses rencontres qui l'aideront à gravir les échelons, ses trahisons, ses choix, sa rage d'échapper à sa condition sociale... En parallèle, l'on a affaire à un tueur en série qui sévit dans les rues de Barcelone et un policier retors qui n'a d'autre rêve que d'épingler Carlos. Cette fresque espagnole, à la fois historique et humaine, se montre tour à tour prenante et complexe à souhait, avec ses nombreux rebondissements, ses moult personnages parfois ténébreux et, malheureusement, ses ellipses. Prévu initialement en une série de six tomes, cet album unique, malgré ses presque 150 pages, souffre d'approfondissement et de quelques raccourcis, rendant sa lecture moins fluide, parfois déroutante. Malgré cela, Denis Lapière et Gani Jakupi ont toutefois su en garder l'âme. Graphiquement, Rubén Pellejero, Eduard Torrents et Martín Pardo nous offrent des planches remarquables, au découpage dense et au trait limpide et expressif, un brin rétro, et nous plongent dans un Barcelone sombre.

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