♥ « Mieux vaut être fou que mort »
(P.12)
La veille de Noël, Paris. Il marche seul, ses livres sous le bras, de telle sorte que les passants puissent évaluer l’entendue de son intelligence. Il fait froid, la nuit a déposé son manteau de velours sur le jour. Il erre. Il regarde le sol, avance lentement, il a quelque chose en tête, des tourments, des doutes dont il espère peut-être se débarrasser au gré de ses errances. Et puis, une voix, une injonction - en réponse, le refus.
♥ « dis-moi au moins ton nom… » (p.59)
Non… enfin. Mentir, oui, dire n’importe quoi, un prénom, n’importe lequel et l’espace d’un instant attiser la curiosité, l’envie chez cet autre qui interpelle. Le semer, être rattrapé, essayer de fuir. Pour enfin céder. Aux supplications, aux éclats de voix, à l’appel du corps. Cet autre qui désormais n’est plus un étranger. Une nuit, rien qu’une nuit…
♥ « La part de moi qui résistait à Reda avait disparu. Elle était morte. » (p.82)
Elle était nuit de passion et d’union, elle devient prémices d’une matinée d’horreur. Après l’amour, ce qui semblait être amour, il y a le déversement de la haine, de la rage, et jaillit l’envie de tuer. Devenu proie, devenu rien, sa vie est entre les mains de Reda.
♥ « Je m’attache trop vite aux autres » (p.99)
Et guérir quelle peine née de l’enfance, quel manque, quelle incomplétude ?
♥ « Si le langage est le propre de l’homme alors pendant ces cinquante secondes où il me tuait je ne sais pas ce que j’étais » (p.114)
Libérer la parole, la rendre acte. Le récit prend vie, à nouveau ; il y a la douleur, mais il y a la guérison, une voie vers le pardon.
A travers cette pièce de théâtre, Édouard Louis explore sa douleur, il raconte la tentative d’homicide dont il a été victime, la fait vivre, et les voix de son entourage, comme autant de perspectives possibles, une multitude de questions, de points de vue pour comprendre les mystères et les méandres de la nature humaine, sa nature humaine.
Commenter  J’apprécie         50
J'admire les livres d'Edouard Louis par sa vision sociologique et son ascension sociale également.
J'ai lu Histoire de la violence il y a quelque temps, c'était un livre poignant et difficile à lire, pourtant je parviens facilement à me détacher du récit habituellement.
Je souhaitais lire une pièce de cet auteur, qui n'en joue pas (ou très peu ?) en France malheureusement. Le roman prend vie dans cette pièce, même si j'ai trouvé le roman lui-même vivant. On passe de la scène entre Edouard et Reda, à la scène avec sa soeur. C'est une pièce animée et une autre vision que l'on pourrait avoir eu à la lecture du roman.
C'était très intéressant de voir son roman adapté en pièce de théâtre, une bonne idée pour ceux qui aimerait s'initier à la lecture de pièce mais qui appréhende !
Edouard Louis, nous attendons de voir tes pièces en vrai en France !
Commenter  J’apprécie         00
Calimero a encore frappé !
Sa méthode a peut-être réussi à le faire changer, elle a certainement réussi à l'enrichir.
Il donne des conférences à l'étranger, on adapterait une de ses œuvres à la télévision, on ne sait quoi encore.
Et il a parfaitement réussi son intégration dans le petit milieu intellectuel parisien qui fait et défait les réputations.
Une belle carrière l'attend. Et si vous ne l'aimez pas, c'est par mépris de classe, comme dit la nouvelle gauche qui est la première à mépriser le prolétariat qu'elle a abandonné au profit d'un conglomérat de minorités, et à le stigmatiser parce qu'il vote mal.
Commenter  J’apprécie         1852
Toutes les critiques assez stupidement négatives sur la personne qu'est Edouard Louis n'enlèvent heureusement rien à son talent d'écrivain. Oui, sa plume est magique, et j'aime beaucoup. Sur le récit, quelques longueurs ou répétitions parfois, tout à fait supportables car l'histoire est passionnante. Cet écrivain est un personnage capricieux, provocateur et surtout insaisissable. D'où l'envie, pour certains, de l'enfermer dans un moule bien carré. Une façon assez mesquine de se "débarrasser" de ce gêneur qui bouscule avec talent et arrogance les certitudes-béquilles des envieux de tout ce qui les déborde un peu trop (tsss...).
Commenter  J’apprécie         912
magnifique, fort, bouleversant. l histoire d une resiliance d une volonté hors du commun. comme toujours avec Édouard son écriture est parfaite on est littéralement dans sa peau on vit ses nuits et ses jours, on est dans sa tête dans son coeur. j ai lu ce livre dbune traité et je regrette que ce soit déjà terminé. !
Commenter  J’apprécie         240
L'introspection d'Edouard Louis continue, et on est toujours avec lui. L'histoire est centrée cette fois-ci sur l'acteur en lui. Il fait du théâtre, mais surtout le caméléon social, avec sa copine de lycée et chez les parents de celle-ci, puis à Paris. Cette façon dont il se change lui-même (le titre le dit bien) avec tous les déchirements qui vont avec, est fascinante. Elle parle aussi de cet "ascenseur social" sur lequel on dit tant de bêtises, et nous montre à quel point aujourd'hui il ne marche plus que pour des gens qui veulent, à tous les sens, se travestir, n'être plus vraiment eux-mêmes - pour se libérer, mais aussi avec une perte.
Commenter  J’apprécie         20
Encore un récit autobiographique bluffant !
Mi-Eddy, mi-Edouard, l’auteur raconte ses espoirs d’enfant et sa mélancolie bouleversante.
À travers une plume sublime et sur fond de critique sociale, il dévoile son désir de fuir pour mieux se trouver lui-même.
Viscéral et lumineux !
Commenter  J’apprécie         30
Nous sommes nombreux à espérer changer. Parvenir à effacer les héritages de notre enfance pour les remplacer par des qualités valorisées par le plus grand nombre.
Eddy n'a cesser de poursuivre l'Edouard qu'il voulait être.
Mais est-on jamais assez pour se satisfaire soit même ?
Où peut-on accepter que la beauté provient également des ruines d'une enfance pauvre et violente ?
Commenter  J’apprécie         00
Bravo, j'ai dévoré ce dernier livre. Il complète merveilleusement les précédents. Et comme "Le retour à Reims" de Didier Eribon, ou certains livres d'Annie Ernaux, cela me semble å la fois une expérience si proche de la mienne -l'éternel parcours de la classe ouvrière vers la bourgeoisie, et si singulière aussi.
bravo Mr Louis.
Commenter  J’apprécie         80
Un texte fort sur les "Transclasses" ou "transfuges de classe". L'auteur exprime avec sincérité sa volonté de s'élever dans la société et de quitter sa vie "d'avant". Son désir de vengeance face à la violence vécue. Il explique la méthode, sa volonté, les rencontres qui ont aidé à sa transformation. Il s'adresse à son père et à Eléna pour s'excuser. Il exprime une certaine nostalgie de ses souvenirs ainsi que sa honte d'avoir eu honte. C'est également une réflexion sociologique, politique sur les classes sociales. Le texte se lit très facilement.
Commenter  J’apprécie         00
Cet itinéraire de vie m'a bouleversé....Quelle envie d'avancer , de rejoindre ceux d'en haut et pour ça de travailler , travailler et lire "même sous la douche" pour ne pas perdre de temps. Petit à petit atteindre son but , rejoindre le camp des privilégié et là se souvenir de son enfance , ses odeurs , ses habitudes....
Commenter  J’apprécie         10
J’ai beaucoup aimé l’analyse que l’auteur fait de sa transformation.
Eddy Bellegueule (nom et prénom pas facile à porter) qui est devenu Edouard Louis.
Il analyse et détaille son parcours d’un village dans le Nord de la France, dans un milieu pauvre et déshérité, jusqu’à Paris, l’Ecole Normale Supérieure, en passant par Amiens, son lycée et sa faculté.
Tous ses efforts ont porté sur son éducation, son environnement, ses vêtements, son maintien, sa façon de parler et même sa façon de manger !
On dit que le « Diable se cache dans les détails ». C’est bien ce que traque l’auteur pour pouvoir être complètement différent.
Commenter  J’apprécie         70