JD Beauvallet raconte les débuts et la mission du concours "Sosh aime les inRocKs lab"
Lorsqu'il est question des B-52'S dans les conversations de salons rock, on évoque souvent les coupes de cheveux insensées, les looks impossibles du groupe, ses vidéos excentriques, ses pochettes à encadrer obligatoirement ou ses productions postmodernes à une époque où l'on ne connaissait pas encore l'expression...Mais on oublie souvent le plus important, ce qui ne révèle ni du gadget, ni du gimmick : l'écriture pop tout à fait géniale de ces créatures d'Athens ou de Georgie. Sorte d'ABBA venues de l'espace, les B-52'S sont une machine à tubes infernale, au son unique entre hi-fi du cosmos et bricolages sur matériel Emmaüs. Ils jouent de la surf music, mais en combinaison spatiale, et l'on peut librement inventer les danses psychédélicieuses qui accompagnent leurs Planet claire ou Rock Lobster. Car ce premier album est un juke-box du bonheur, un best of, déjà. La preuve un expert de la pop les considérait comme son groupe préféré. Un certain John Lennon...
Bien des années plus tard, dans une de ses phrases définitives et malicieuses, Björk me dira : « En Islande, si tu veux une chaise, tu fabriques une chaise. » Ça deviendra, avec effet rétroactif jusqu’aux années tourangelles, ma devise absolue. Toute ma vie, j’ai construit ma chaise.
Chapitre 8. Officiel Epsilon, p. 63
Je suis impossible à vivre, même pour moi : ma compagnie est éreintante.
Chapitre quatre. Hackeur à coeur, p. 37
De son vivant [Ian Curtis], sa musique sonne déjà d’outre monde : elle est le cri mat d’un homme qui tombe dans un puits sans fond, dont l’écho des hurlements se fait de plus en plus glaçant, résigné.
Je suis musique, édito, p. 12
En 1979, le rock anglais se trouve une muse pour fertiliser son exaspération, orienter sa fureur : Margaret Thatcher arrive au pouvoir.
The Clash, London Calling, 1979, p. 40
Tony [Wilson], homme de lettres, avait tendance à prendre ses rêves pour des réalités. Comme ce jour où il reçut un appel de Shaun Ryder [leader des Happy Mondays], à la recherche d’un spot à Manchester pour une session photo. « Tony, j’ai trouvé ! On va poser à côté d’une gigantesque affiche de Rimbaud ! » « C’est super, je ne savais pas que t’intéressais à la poésie française… » « Quelle putain de poésie française ? Je te parle de Rambo ! »
Chapitre 18. Fookin’ Madchester, p. 193
Si vous n’avez jamais dansé sur cette chanson [Don’t You Want Me de The Human League] lors d’une fête, c’est que vous n’êtes jamais allé à une fête.
The Human League, Dare, 1981, p. 82
Je ne l’ai pas encore dit, mais ma vie me va. Je l’ai choisie et construite. Je n’ai gardé que les bonnes personnes. Ma garde rapprochée à moi. Je n’ai pas besoin d’une foule. Comme le dit Bansky : « Les gens m’adorent ou me détestent. Ou ils n’en ont rien à foutre. »
Chapitre 24. L’art à la rue, p. 260
Dans l’interview qu’elle m’accorda par compassion, elle me dit : « Il faut toujours partir. Les Vikings n’étaient pas sédentaires, ils préféraient risquer l’aventure sur de frêles bateaux en bois… J’ai besoin chaque jour de me tester. » Björk ne me parlait bien sûr pas des Vikings mais d’elle-même. D’île même.
Chapitre 16. Islande mon amour, p. 174-175
Les premières années aux Inrocks, nous sommes si fiers d'avoir des bureaux que nous y passons notre vie. S'y jouent d'interminables blind-tests. Chacun vient avec ses disques cultes et les fait découvrir aux autres. Je me souviens du choc en entendant pour la première fois Tim Hardin ou The Zombies. Nous sommes des éponges. Chacun enrichit l'autre jusqu'à ce que le dernier ferme la porte. Et la discussion reprend, enragée, sur le trottoir, avant que nos chemins ne se séparent enfin sur un joyeux « à demain ». Car demain serait pareil : entièrement dédié à la musique, à la découverte, à l'échange.