Je me souviens à quel point l’endroit semblait vaste. Vaste, haut, vide et parfaitement déplacé dans notre siècle, le survivant d’une époque révolue piégé dans une distorsion temporelle. Je me souviens du tic tac des comtoises. Je me souviens de l’odeur de vieilles choses et de poussière, de la lente pourriture des minutes et des heures sirupeuses.
Je me souviens d’autres odeurs, d’autres sons et impressions désagréables… que je ne souhaite pas me rappeler. Beaucoup d’entre eux attendent depuis des années derrière les portes closes de mon esprit, des spectres sombres aux formes ondulantes qui cherchent un espace, une ouverture, une fissure à travers laquelle ils pourraient se glisser pour venir détruire mes murs de défense.
Les soirées étaient parmi les pires moments. Je devais rester assis à écouter les bavardages des adultes, qui m’anesthésiaient l’esprit. Le fils du vicomte était introuvable. De temps en temps, le vieux vicomte me posait une question polie et froide sur l’école et mes projets pour l’avenir.
Je répondais par quelques mots prudents, remarquant à quel point il me remarquait avec intérêt, comme si j’étais une apparition, ses petits yeux injectés de sang et calculateurs fixés sur moi sous de lourdes paupières. Il n’écoutait pas du tout, il ne faisait que m’observer.
Ça va peut-être vous surprendre, les gars, mais j’adore les baisers. Idéalement, des baisers longs, profonds et torrides. Les meilleurs préliminaires de tous les temps, n’est-ce pas ?
C’est aussi et toujours ce que les baisers ont été pour moi. Des préliminaires. Les signes avant-coureurs de plus d’actions chaudes à venir.
Jamais auparavant je n’ai eu un baiser comme celui-ci, cependant, un baiser qui est un accomplissement en soi. Quelque chose qui n’en demande pas plus. L’alpha et l’oméga d’une rencontre. La réunion magique de deux battements de cœur. Un absolu ; une chose arrondie, finie, tellement évidente et claire qu’on ne doute pas une seconde. Comme un caillou lisse et brillant que l’on trouve sur une plage, et on pense immédiatement : Il est tellement parfait ! Comment se fait-il qu’il existe !
Je fermais les yeux.
Et immédiatement, je pensai : Attends ! Attends, attends, attends ! Mes yeux sont DÉJÀ fermés. Parce que je dors et que je rêve, n’est-ce pas ? Alors, comment puis-je fermer des yeux fermés ? Il n’y a pas moyen – pour personne, quelle que soit la situation, que ma vie ou ma raison soit en danger ou pas – d’imaginer un état, techniquement, logiquement, même grammaticalement, qui serait un état plus fermé que fermé.
Bon point : il sent mon observation, lève les yeux et soutient mon regard. Je le vois arriver à une conclusion, et il sourit encore davantage. Je ne décèle aucune méchanceté, aucun mépris. Puis, de manière fortuite, il ouvre ses jambes musclées, pousse ses hanches en avant et pose les mains sur ses genoux d’une manière suggestive. C’est subtil mais évident.
Un humour pétillant presque à chaque page tel que, page 143: "Bien sûr elle était furieuse quand je lui ai dit que j'avais lu Harry Potter", dis-je rêveusement. "Elle m'a fait une crise et m'a balancé une diatribe très loin d'une lady dont les termes auraient nécessité un avertissement parental."
dans une banlieue si chic que même les chats portent du Prada, et les chiens des colliers sertis de diamants.