Nationalité : France
Né(e) : 1956
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Né(e) : 1956
Biographie :
Historienne de la philosophie et philosophe française contemporaine. Spécialiste de Spinoza, de l'histoire de la philosophie moderne et de la philosophie du corps, elle est actuellement Professeur à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne où elle anime un séminaire de recherches sur Spinoza et où elle dirige Philonsorbonne, la revue de l'Ecole doctorale de philosophie. Elle co-dirige également la collection "Les Anciens et les Modernes, Etudes de philosophie" aux Editions Classiques Garnier
Originaire de Tincave, un hameau de montagne savoyard, et issue d'une famille très pauvre avec une mère au foyer et un père successivement berger, mineur, puis employé communal, Chantal Jaquet a accompli un parcours exceptionnel par rapport à son milieu social. Élève boursière au CEG de Bozel, elle est reçue 1ere au concours d'entrée à l'Ecole Normale d'Institutrices de Savoie, à l'âge de 15 ans. Destinée à devenir institutrice, elle est autorisée à poursuivre ses études en classes préparatoires, comme élève-maîtresse salariée, en raison de l'obtention d'une mention Très Bien au Baccalauréat de Lettres.
Elle est admise à l'Ecole normale supérieure de Fontenay-aux-Roses, puis à l'Agrégation de philosophie. Après sa mise à disposition du Rectorat de Paris, elle enseigne comme professeur agrégé, successivement dans les lycées de Flers, dans l'Orne, de Draguignan, dans le Var, puis dans la banlieue parisienne à Etampes et Athis-Mons.
Parallèlement à l'enseignement secondaire, elle entreprend une thèse de doctorat intitulée Sub specie aeternitatis, Etude des concepts de temps, durée et éternité chez Spinoza, sous la direction de Jean-Marie Beyssade qu'elle soutient en 1994, obtenant la mention très honorable et les félicitations du jury à l'unanimité. L'année suivante, elle est élue Maître de conférences à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Elle soutient ensuite une habilitation à diriger les recherches intitulée "Les expressions de la puissance d'agir" et elle est élue Professeur à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.
+ Voir plusHistorienne de la philosophie et philosophe française contemporaine. Spécialiste de Spinoza, de l'histoire de la philosophie moderne et de la philosophie du corps, elle est actuellement Professeur à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne où elle anime un séminaire de recherches sur Spinoza et où elle dirige Philonsorbonne, la revue de l'Ecole doctorale de philosophie. Elle co-dirige également la collection "Les Anciens et les Modernes, Etudes de philosophie" aux Editions Classiques Garnier
Originaire de Tincave, un hameau de montagne savoyard, et issue d'une famille très pauvre avec une mère au foyer et un père successivement berger, mineur, puis employé communal, Chantal Jaquet a accompli un parcours exceptionnel par rapport à son milieu social. Élève boursière au CEG de Bozel, elle est reçue 1ere au concours d'entrée à l'Ecole Normale d'Institutrices de Savoie, à l'âge de 15 ans. Destinée à devenir institutrice, elle est autorisée à poursuivre ses études en classes préparatoires, comme élève-maîtresse salariée, en raison de l'obtention d'une mention Très Bien au Baccalauréat de Lettres.
Elle est admise à l'Ecole normale supérieure de Fontenay-aux-Roses, puis à l'Agrégation de philosophie. Après sa mise à disposition du Rectorat de Paris, elle enseigne comme professeur agrégé, successivement dans les lycées de Flers, dans l'Orne, de Draguignan, dans le Var, puis dans la banlieue parisienne à Etampes et Athis-Mons.
Parallèlement à l'enseignement secondaire, elle entreprend une thèse de doctorat intitulée Sub specie aeternitatis, Etude des concepts de temps, durée et éternité chez Spinoza, sous la direction de Jean-Marie Beyssade qu'elle soutient en 1994, obtenant la mention très honorable et les félicitations du jury à l'unanimité. L'année suivante, elle est élue Maître de conférences à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Elle soutient ensuite une habilitation à diriger les recherches intitulée "Les expressions de la puissance d'agir" et elle est élue Professeur à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.
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La philosophe Chantal Jaquet, qui a forgé le concept des "transclasses" pour désigner ces personnes qui passent d'un milieu social à un autre, revient sur son enfance et sa propre trajectoire de transclasse dans un entretien aux PUF, "Juste en Passant".
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[...] une non reproduction scolaire à l'école primaire , non-reproduction qui ne peut à elle seule rendre raison des parcours sociaux à l'âge adulte, tant il est vrai que les 1ers de la classe issus des milieux populaires rejoignent bien vite le cortège des Mozart assassinés quand sonne l'heure de gagner sa vie.
Lorsqu'elle est possible, l'identification au modèle dominant donne une assiette stable et permet plus facilement une insertion dans l'ordre familial et social, mais lorsqu'elle ne l'est pas à cause du sentiment d'altérité né d'une conscience plus ou moins confuse d'être à part, en trop, différent ou déviant, une brèche s'ouvre dans la reproduction, invitant à emprunter des voies de traverse et à se frayer une trajectoire singulière pour survivre et s'affirmer. L'absence de reconnaissance, l'ignorance, voire le mépris de l'entourage, la condamnation et la mise au bon publique, favorisent le départ des "moutons noirs" et des "vilains petits canards".
[...] les rares exemples de mobilité sociale sont fréquemment brandis pour masquer l'immobilisme et lui servir de caution. Les individus des classes populaires, qui connaissent une ascension sociale, sont utilisés comme des mascottes ou des symboles confortant l'ordre sociale et alimentant l'idéologie du self made man. Ils servent de vitrines politiques et d'alibis pour récuser les revendications collectives et juguler le sentiment d'injustice. Dans ces conditions, l'objectif n'est pas de creuser la question, car la réponse est déjà toute faite et pourrait se résumer en une phrase "quand on veut on peut."
Plus qu'une rupture, l'ascension sociale est une forme de parjure. Interprétée comme un reniement de la classe d'origine, elle donne lui à des griefs et des procès d'intention qui tendent à la culpabiliser le mouton noir. "Tu nous renies", "tu nous méprises", "tu as honte de nous": le transfuge est accusé d'être un social traître et il est dépeint sous les traits du renégat hautain. [...] Le parvenu est mal vu, sa nouvelle aisance rime avec arrogance et derrière l'immodestie qu'on lui prête se cachent l'envie et son cortège de calomnies.
Le désir confus d'une autre vie, que présuppose l'orientation vers un modèle différent des modèles ambiants ne peut naître que s'il existe une insatisfaction, voire une souffrance. [...] L'individu pleinement intégré dans un ordre social ou familial n'a aucune raison de rompre ses liens ou d'aspirer à un ailleurs. Bien au contraire, il sera enclin. à se comporter en gardien du temple familial ou social et à reproduire les valeurs dominantes en dénonçant tout tentative d'échapper au sort commun.
Le manque d'ambition apparaît soit comme un défaut de nature, imputable à une inégalité ontologique entre les hommes, soit comme un défaut de caractère imputable au sujet lui-même, qui fait un mauvais usage de sa liberté et de sa volonté en visant des objectifs médiocres ou routiniers. On aurait alors beau jeu d'en conclure que la reproduction sociale est dû à une fatalité naturelle ou à une faillite morale des individus et d'en rendre compte en recourant à l'idéologie du don ou du mérite.
Le déclassement s'opère le plus souvent par déplacement tant il est vrai que deux mondes ne peuvent coexister dans le même espace et avoir lieu d'être dans le même camp. Dès lors, le changement historique de classe se présente sous la forme d'un éloignement géographique, un passage de frontière, séparant la ville des champs, la capitale de la province, le centre et les faubourgs, les banlieues huppées et les cités dortoirs, les pays développés et les pays en voie de développement.
C'est pourquoi le transclasse prend la couleur du lieu où il se couche, pour parler comme Montaigne, sa contexture est toujours une teinture. Il ne peut pas davantage nier sa mutation et prétendre conserver sa couleur d'origine dans son intégralité, car tout retour au pays porte la patine du lointain séjour ou le vernis invisible du détour. Le transclasse se caractérise donc par une double appartenance; il est au milieu des milieux, à la croisée, à l'entre-deux.
le système d'enseignement reproduit l'ordre établi, d'une part, en conduisant les enfants des classes dominantes à obtenir les meilleurs diplômes et occuper ensuite les meilleures places dans la société grâce à leur capital culturel, d'autre part, en légitimant le classement scolaire, la réussite et l'échec des individus par le recours à des qualités innées et à une idéologie du don qui transforment la sélection sociale en sanction d'une déficience personnelle.
C'est pourquoi la première tâche qui s'impose est une analyse des causes de la non-reproduction. Faute d'en comprendre l'origine, les destins d'exception servent encore trop souvent d'alibi au moralisme, en accréditant l'idée que chacun est pleinement responsable de son sort, et au conservatisme, en alimentant la conviction que l'ordre social reflète les mérites naturels de chacun et sanctionne à juste titre la paresse ou la bêtise.
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