Citations de Axelle Auclair (105)
- Condor -
Je me suis planté ! Je n'en reviens pas. Mon mec au top est une gonzesse. Si je n'étais pas habitué à contenir mes émotions, je fracasserais mon téléphone contre le mur. J'étais persuadé que ça ne pouvait être qu'un gars pour faire preuve d'une telle maîtrise, alors c'est la grosse déconvenue. Pour la rapidité, les femmes assurent aussi, ça n'a jamais été le problème. Ce qui l'est, c'est leur caractère de pleurnicheuse. L'ancienne archiviste chialait un jour sur deux d'après l'adjudant-chef. Cela dit, je m'en fiche bien tant que j'obtiens le travail réclamé. Elle peut le faire en larmes ou sur le trône si ça lui chante.
Vous ne souhaitiez pas travailler chez nous, n'est-ce pas ?
- Pas vraiment. Je vais être sincère, j'ai passé un week-end infernal avec l'un de vos gars qui a été...
Je cherche mes mots, car je ne peux pas me permettre d'être insultante envers l'un de ses collègues, ce serait me tirer une balle dans le pied pour nos futures bonnes relations. De plus, je n'ai pas connaissance de grade de Monsieur le fou et avec ma chance, ce sera le plus haut.
- Odieux ? Immonde ? Finit-elle à ma place en souriant.
Je n'ai pas dévoilé grand-chose sur le personnage, mais nul doute qu'elle sait qui est évoqué.
- Non, attendez. Il a été le pire des mufles. C'est bien ça ?
Elle le connaît bien, en plus.
- Eh bien, je vais me contenter de dire que nous parlons bien de la même personne.
Ça, c'est mon Condor. Il s'exprime peu, mais quand ça sort, c'est aussi fulgurant qu'une rafale de FAMAS.
- Nous ne pouvons malheureusement rien faire.
- J'ai essayé, mais les ordres viennent de plus haut. Votre mutation est déjà signée, confirme le général.
Il a au moins le mérite d'avoir tenté, mais sans succès. C'est acté, je vais me taper le malotru à temps plein, c'est merveilleux. D'ici un mois, je me pends dans mon bureau avec un câble informatique, c'est certain. Je tombe de Charybde en Scylla depuis mon arrivée dans la capitale. Tout à coup, j'ai une folle envie de repartir en Franche-Comté pour me rouler dans la neige avec les lèvres gercées.
- Quand elles disaient qu'elles aimaient l'uniforme, c'était uniquement en référence à ce qu'il y a dedans. Je comprends mieux.
- C'est ça. Elles veulent ton corps musclé, mais elles oublient que pour qu'il soit si bien sculpté, ça demande des heures de travail chaque jour.
– On se prépare un plateau bouffe et boisson parce que je veux que tu me racontes tout ! s’exclame-t-elle en sautillant sur place et en tapant dans les mains.
– Vilaine curieuse, fais-je semblant de la sermonner alors que j’ai hâte d’en rire avec elle.
– Oh que oui ! Je dois savoir si l’homme le plus impressionnant l’est autant au plumard !
Oh que la soirée promet d’être hilarante, je m’en régale d’avance. Les yeux brillants de malice, nous piaffons d’impatience en pouffant comme deux gamines.
– J’ai dû mal entendre, gronde une voix grave derrière nous.
Nous bondissons de peur en criant. Un demi-tour exécuté, nous faisons face à un Condor qui nous scrute avec suspicion.
– Vous n’avez pas l’intention de parler de mes performances sexuelles, n’est-ce pas ?
Fin brutale de la fête. Nous sommes toutes les deux comme de sales gosses prises le doigt dans le pot de confiture. La température de la pièce vient de perdre vingt degrés d’un coup. Sylvie se pétrifie, congelée sur place, la pauvre. Qu’il est pénible à se déplacer si silencieusement. Je vais finir par l’équiper d’une clochette !
Tout à coup, il y a un bruissement de feuilles venant d'au-dessus de nos têtes. Une grosse forme noire atterrit à trois mètres devant nous avec un bruit sourd à l'impact, puis en un éclair, il se dresse face à nous. De stupeur, Eric a un mouvement de recul, Coralie couine, mais Sylvie soupire de lassitude. Le voici mon mari qui jouait à Tarzan dans l'arbre. Remarquez, pour une bête à plume, c'est normal.
[CA : SC, vous êtes grosse ?]
Mais ?! Il n’a pas osé ?!
[LX : Pas avec son résultat aux 8 km, il est déjà meilleur.]
Merci, Lynx. Vous, je vais vous apprécier plus que les autres.
[SC : Je ne suis pas grosse. Juste ce qu’il faut.]
[CA : Mouais…]
- À ton avis, il est vexé ou furieux ? Histoire que je me prépare à la suite.
- Je dirais furieux que tu l'aies vexé.
SC : Tu enchaînes les compliments. C'est louche.
CD : Non. Tu le mérites. Tu es au top.
SC : Monsieur? Qui êtes-vous?
SC : Vous avez volé un téléphone sécurisé et cela va vous coûter très cher, Monsieur.
Ça m'apprendra à lui dire des choses gentilles. Elle ne me prend pas au sérieux. Puisque c'est comme ça, tu vas voir, ma femme.
CD : Demain, tu bosses.
SC : Non. C'est samedi demain et je ne suis pas de permanence.
CD : Regarde bien la ponctuation de ma phrase, il n'y a pas de "?". Donc, maintenant, si. Tu bosses et tu es de garde.
SC : Ah! Te revoilà. Quelqu'un a pris ton téléphone tout à l'heure...
CD : Si tu voulais bien parler anglais, aussi !
En le lisant, je m’apprête à soupirer d’exaspération, mais je me retiens au dernier moment. Il est énervant à vivre dans sa bulle où tout est facile et tombe sous le sens. Eh bien non ! Je ne cause pas english, mais je sais cuisiner, rire et profiter de la vie. Et après deux ou trois verres, j’imite très bien la dinde en colère et le singe excité.
Ça compte comme des compétences appréciables, non ? La fatigue me rend sarcastique, alors je me fais plaisir en lui répondant.
SC : Tu as oublié de me l’ordonner avant de venir.
Je commets des actes violents, je vis et vois des horreurs, alors ne pas verser dans le sentimental est ma façon de me protéger.
- Tu fais de l'humour deux fois de suite ! Arrête ça immédiatement, parce qu'à la troisième je t'expédie direct chez ton toubib pour revoir les réglages. La machine déraille.
- Mais non ! Tous mes flingues, bordel ! Comment fait-on maintenant ? Il n'y en a pas ici et les gars sont partis avec les leurs.
- Partons du principe que nous n'en avons pas besoin et puis c'est tout.
Prions pour que l'avenir me donne raison. Il est inutile d'envisager le pire, comme d'imaginer que nous nous apprêtons à affronter un groupe terroriste avec l'intention de leurs coller une pâtée à mains nues.
- On va espérer que c'est le cas parce que je n'ai que mon couteau.
- Donc, tu as ta bite et ton couteau. C'est deux fois plus que moi, dis-je pour dédramatiser.
Ça, c’est mon Condor. Il s’exprime peu, mais quand ça sort, c’est aussi fulgurant qu’une rafale de FAMAS.
- Bien. J'ai votre dossier sous les yeux et je remarque que votre nom n'est pas mentionné.
- Alors comment savez-vous que c'est le mien ?
Mais c'est qu'il a de l'humour, de guerrier. C'est très bien. Étant un joyeux drille également, nous aurons l'occasion de nous amuser. Il me taquine, mais je m'explique tout de même.
- Il y a votre code qui me l'indique.
- Donc, il y a mon nom.
- Non, juste votre code, c'est ce que je voulais dire. Vous voulez bien me préciser votre nom afin que je l'ajoute, merci.
Aussitôt, je me penche sur le document, le stylo en main; prêt à écrire.
- Piaf.
…
- Je reformule ma demande. Pourriez-vous m'indiquer votre nom et votre prénom ?
- Bien sûr. Prénom : Agent. Nom de famille : Piaf.
Notre unité est donc composée de six militaires. Certains affirmeraient qu’un faible effectif est propice à une ambiance conviviale. Si vous le pensez également, c’est que vous n’avez pas bien compris mes explications précédentes. Je déteste me répéter, alors soyez plus attentif. La vie des autres, collègues ou non, ne m’intéresse pas. Je ne dis pas bonjour puisque je me contrefiche que leur journée soit bonne ou pas. Les miennes à gérer sont amplement suffisantes. Être odieux n’est pas un plaisir, je suis bourru et hermétique aux sentiments par protection. Me détendre est impossible, être constamment en alerte est depuis longtemps une seconde nature.
Donc le challenge actuel est de faire venir Alex ici. En présence de Matt, c’est là que réside toute la difficulté. Je tente quand même ma chance avec un texto.
Moi : Coucou toi. Tu peux passer à la maison?
Alex : Ça va? Un problème?
Plutôt normale qu’il s’imagine tout de suite un drame. Je pense que mes messages tardifs seront source d’inquiétude pour un bon moment.
Moi : Dans l’ordre, oui et non. Ne t’affole pas. Juste pour parler.
Alex : Avec qui?
Il est malin, il sent le coup fourré.
Moi : Nous sommes tous là. Nous venons de finir la réunion familiale. Ils sont au courant pour toi et Ben.
Alex : ??? Je dois me sauver au Canada?
Moi : Inutile, pas assez loin. Du calme, Matt et Wade voudraient juste te parler de la fameuse nuit.
Alex : Laquelle? Il y a eu celle avec toi chez moi, celleS de Ben et celle… enfin la dernière, la pire.
Moi : La dernière, c’est la seule qui les concerne.
Alex : Et après m’avoir soutiré des informations, ils vont m’enterrer dans le jardin?
Moi : Je ne pense pas, la terre est trop sèche pour creuser. Mais non, enfin! Viens.
Alex : J’appelle mon notaire pour finaliser mon testament, ensuite mes parents pour leur dire adieu, j’enfile une coquille et j’arrive.
Il m'a pourrie pendant dix minutes. autant vous dire que la carte exacte était expédiée bien avant qu'il ai fini de m'humilier. En deux jours, j'ai eu le droit à une telle quantité de nom d'oiseaux que je pourrais ouvrir la plus grande volière de France. Du monde, même.
- Tu as déjà pris le train quand même?
- Rarement et jamais un TGV. La dernière fois, c'était pour intégrer l'internat de Saint-Cyr.
- Mince. Mais alors, tu ne connais que les trains à vapeur?
- Parfois, tu es vraiment une sale gosse.