The Fall - Wrong Place, Right Time HD
On ne devrait jamais se mettre dans une position où on commence à détester ce qu'on fait. Je vois souvent ça, chez les gens. Or ils restent. Le pire, c'est qu'ils ont perdu la flamme et que ça s'entend dans leur manière de jouer. Encore le syndrome Beckham. Les gens finissent toujours par vous laisser tomber. C'est un truisme. Non seulement ça, mais ils se laissent tomber eux-mêmes. La seule chose à faire, dans ces cas-là, c'est d'écrire pour que ça sorte.
Je m'étonne qu'ils n'aient pas plus de respect envers eux-mêmes. Imaginez-les se remémorant exactement les faits dans dix, vingt ou trente ans... Pathétique. Je serais curieux de les voir en temps de guerre. C'est vraiment un problème générationnel. Un truc s'est perdu chez pas mal de types aujourd'hui, ceux qui ont trente-cinq balais ou moins. Ils sont dénués d'émerveillement. Je pense que leurs parents leur en ont trop dit. Du coup, ils n'abordent pas l'existence avec l'idée de découvrir les choses par eux-mêmes.
On a fait deux concerts, et un tiers des jeunes de l’île [l'Islande] est venu. Aucun groupe de rock ne venait jamais jouer chez eux. Je culpabilise un peu à l’idée d’avoir engendré les Sugarcubes et Björk.
The Fall ne se limite pas à une poignée d'anciens membres aigris.
De nos jours, c'est encore pire. Les mômes font des économies dès l'âge de sept ans pour aller en Australie parce qu'ils s'imaginent la vie là-bas en regardant Neighbours avant même de savoir tenir leur fourchette. Il est temps d'éradiquer cette notion selon laquelle on finit par se trouver soi-même en partant ailleurs ou qu'une nouvelle vie glorieuse va s'ouvrir à vous. Les gens qui pensent comme ça voudraient surtout se débarrasser d'eux-mêmes. On ne vit jamais ailleurs que dans sa propre tête.
Je n'ai jamais soutenu l'équipe d'Angleterre. Eleni et moi, on était ravis quand la Grèce a remporté l'Euro en 2004. L'Angleterre ne sera jamais capable de jouer comme ça, un vrai collectif avec des joueurs solidaires. Pas quand les entraineurs de club sont dix fois plus malins que le sélectionneur national.
Je suis un peu l'Alex Ferguson de l'industrie musicale. Je me trouve pas mal de points communs avec son parcours.Il sait quand dire merde à ses joueurs, et tant pis pour son image. C'est son club. Ses idées. Sa décision finale. Et les résultats sont là.
Le problème du collège, c'est que les bouquins au programme me tombaient des mains. Le Hobbit, par exemple : notre prof nous lisait Le Hobbit, vous vous rendez-compte ? Voilà de quoi on parlait, en classe : de petits bonshommes vivant dans des trous. On s'est tous rebellés contre le bouquin et contre le prof. Ce type avait partagé le dortoir de J.R.R. Tolkien à la fac et il nous rebattait sans arrêt les oreilles avec ça. Son passé glorieux avec J.R.R. Les délégués de classe nous ont soutenu, sur ce coup-là ; c'était censé être un cours de littérature anglaise, et on se tapait toutes ces conneries de compte de fées au lieu d'étudier Shakespeare et la poésie médiévale.
Je le [Graig Scanlon, ancien guitariste de The Fall] voyais un peu comme mon co-compositeur. Lui aussi, c’était un original. Mais il était comme tous ces guitaristes qui veulent la gloire sans la responsabilité qui va avec. Ils voudraient avoir leur mot à dire sur chaque morceau, mais ils n’ont pas envie de s’occuper de la paperasse pour les impôts. Et dès que ça commence à bien marcher, ils se prennent pour Keith richards. C’est un syndrome récurrent. Mais ce n’est pas l’esprit de The Fall. J’ai retrouvé ça chez pas mal de guitaristes.
Je suis le seul membre de The Fall que je n’ai jamais réussi à virer.
Cité dans Les années New Wave. 1978-1983 de JD Beauvallet, p. 74