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Payot - Marque Page - Kenzaburô Oé - Adieu, mon livre !
Il faut réfléchir attentivement aux problèmes importants, même si c'est fatiguant.
« dans la loyauté, il ne peut pas y avoir d’esprit individuel. »
Pour penser la vie d'un homme, il est nécessaire de tracer un plan qui ne se contente pas de partir de sa naissance, mais qui remonte plus haut encore et qui ne s'arrête pas non plus le jour de sa mort, mais qui s'étende au-delà. La venue d'un homme au monde ne devrait pas se réduire à sa naissance et à sa mort. Il naît dans le grand cercle des gens qui l'englobent et, encore après sa mort, il devrait y avoir quelque chose qui subsiste.
«Quelqu'un de trop célèbre, disait ma grand-mère, on finit par ne pas l'appeler par son vrai nom...»
Je suis maintenant un branleur hors pair ; j’ai même inventé une technique qui consiste, au moment de l’éjaculation, à prendre le bout du prépuce, comme on resserre le haut d’un sac, pour conserver tout le sperme à l’intérieur du prépuce. Depuis, il suffit que je porte un pantalon avec une poche trouée pour que je me branle, même en classe. Ainsi, je me branle en me rappelant la confession d’un mari – que j’ai lue dans le cahier spécial en couleurs d’une revue féminine – qui a provoqué chez sa femme une péritonite la nuit de leurs noces, en perforant la paroi vaginale. En bandant, ma queue, enveloppée d’un prépuce souple et blanc bleuté, rayonne d’une beauté vigoureuse, comme une fusée, et le bras dont je me serre pour me caresser, je ne m’en aperçois que maintenant, commence à être musclé.
Vieillir, c'est accepter l'attente de la mort.
Avant de m’endormir, je fus assailli par la peur. C’était la peur de la mort. J’ai peur de la mort à en vomir. Je suis littéralement en proie à des crises de vomissement, chaque fois que je suis terrassé par la peur de mourir. Ce qui me terrifie dans la mort, c’est de devoir, après cette vie brève, l’endurer pendant des millions d’années, dans l’inconscience, dans le néant. Pendant que ce monde, cet univers et les autres univers vont continuer à exister des millions d’années, je ne serai qu’un zéro durant tout ce temps. Pour l’éternité ! Dès que je pense à l’écoulement du temps infini après ma mort, je crois m’évanouir.
Je suis allé fermer à clé la porte de la salle de bains. On dirait que j’ai une érection chronique ; j’aime ça, parce que j’ai le sentiment que la force envahit tout mon corps et j’aime aussi regarder ma queue qui bande. Je me suis rassis : de nouveau, je me suis savonné jusque dans les moindres coins et je me suis branlé. C’est la première fois depuis que j’ai dix-sept ans. Avant, je croyais que la masturbation, c’était mauvais pour la santé. Mais, j’ai feuilleté dans une librairie un livre de sexologie qui expliquait que seule la culpabilité accompagnant l’onanisme était néfaste, et ça m’a complètement libéré.
Si le bébé n’a pas de foie, vous n’avez qu’à lui en mettre un ! On ne me la fait pas, à moi… Je leur ai dit : on fait bien des anus artificiels, vous devriez donc être capables de fabriquer un foie artificiel, ça ne doit pas être beaucoup plus difficile !
Lorsque, au quartier général de l'Action Impériale, j'eus prêté serment pour l'adhésion, Kunihiko Sakakibara me dit que je serais ainsi le membre le plus jeune. En effet, à l'époque où je commençais à fréquenter le quartier général, il m'a semblé que j'étais le seul mineur. Plus tard, j'ai fini par en repérer trois de dix-neuf ans, mais ils étaient à mille lieues de l'image que je me formais d'un jeune militant. Ces adolescent de "droite" ne se départaient jamais d'une expression hautaine, compassée et pesante. Si jamais je leur parlais de cinéma, de jazz ou de musique pop, ça les mettait en fureur comme si je les avais méprisés, et commençaient à m'insulter en me traitant de «déliquescent». Chaque fois qu'ils se plaisent à employer ce type d'expressions, j'avais l'impression d'engranger ma déception à l'égard de la "droite", telle une fourmi faisant rouler sa boule de boue jusqu'à la fourmilière. Car ces jeunes militants ressemblaient comme deux gouttes d'eau à la caricature de bande-dessinée que je m'étais figurée avec amusement avant d'adhérer au parti.