La couleur des âmes mortes porte bien son nom, c’est une plongée dans les tréfonds de l’âme humaine et dans ce qu’elle peut avoir de plus sombre (entre gris foncé et noir ténébreux). N’imaginez pas ressortir entier de cette lecture proprement éprouvante.
Gilles Caillot est connu pour ses romans assez gores. Ce roman se détourne un peu de cette lignée et se rapproche davantage de son bouquin L’apparence de la chair, soit un thriller psychologique d’une rare noirceur, mais profondément ancré dans la réalité de l’inhumanité.
D’aucuns pourront sans doute rapprocher ce récit de ce que propose Karine Giebel. Le roman est en effet assez proche de cette violence et de cette analyse psychologique qu’elle décrit si bien (et puis c’est plutôt une comparaison flatteuse, non ?).
Mais Caillot a clairement son style d’écriture qui lui est propre, mélange de longs dialogues et de récit à la première puis à la troisième personne. Les dialogues sonnent globalement juste. Les autres passages prouvent que l’auteur sait écrire et n’est pas qu’un simple dialoguiste.
Le tout donne une patte très « cinématographique » à l’histoire et tient franchement bien la route, rendant le récit dynamique et addictif, rentre-dedans et vivant. D’autant plus que Gilles Caillot maîtrise l’art du contre-pied, et certains retournements de situation sont assez déstabilisants.
Le sujet de la pédophilie est à manier avec des pincettes, l’auteur flirte avec la ligne jaune, souvent. Cette lecture est par moment vraiment difficile à vivre, parfois un soupçon trop à mon goût personnel.
Mais on ne se lance pas dans un tel roman sans savoir où l’on met les pieds. La violence du propos et des actions, la déchéance psychologique ne peuvent que marquer le lecteur au fer rouge.
Bien sûr, ce récit peut se lire comme un « divertissement », mais malgré la forme du thriller, Gilles Caillot lance des pavés dans la mare et pose de vraies bases de réflexion sur les sujets éminemment sensibles que sont les abus sexuels envers les enfants (ou même les adultes), la violence qui engendre la violence, la vengeance, les pertes de repères ou encore la manipulation mentale.
C’est parfois cru, toujours tendu, et on sent que l’écrivain a creusé le sujet. On ressort de cette lecture avec un sale goût dans la bouche, éprouvé, à l’image du final qui vous laisse totalement hagard.
Même si, à mon sens, certaines scènes auraient pu être édulcorées, ce roman est un véritable uppercut. Une histoire qui hante notre âme blessée, un long moment après avoir tourné la dernière page. A vous de voir si vous êtes prêts à supporter le choc.
En tout cas, dans le genre, c’est un roman qui a les qualités pour sortir du lot.
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