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Critique de Eve-Yeshe



C'est l'histoire de Lou Bertignac, âgée de 14 ans. Intellectuellement précoce, elle est en classe de seconde avec des adolescents plus âgés qu'elle et notamment Lucas qui s'est mis en échec scolaire car personne ne s'intéresse à lui. Lou est différente des autres de la classe, elle ne pense pas de la même façon, se livre à des expériences bizarroïdes dans sa chambre, essaie de tout maîtriser par le mental. Elle est loin des préoccupations des filles de sa classe.
Un jour, un professeur demande de faire un exposé et Lou brillante à l'écrit peine à s'exprimer oralement et devant les sourires plutôt moqueurs des autres, elle se lance encouragé du regard par Lucas dont elle est sous le charme, elle fera son exposé sur les SDF car elle en croise une le matin en venant en cours.
Le professeur est surpris par ce choix difficile et promet de l'aider.
Paralysée par le trac elle va à la rencontre de No (Nolween en fait) et lui dit qu'elle veut l'interviewer pour son exposé et pour cela mieux la connaître autour d'un café, c'est tout ce qu'elle peut lui offrir avec son argent de poche.
Peu à peu elle entre dans la vie de No, qui dort dans la rue la nuit, fait la manche dans l'indifférence générale, elle est sale, mal habillée mange quand elle peut… entre elles, un lien fort se noue, No arrive à faire confiance à Lou car elle est différente et accepte de la suivre un jour chez ses parents.
Après être passées chez Lucas, pour se laver et se montrer sous un jour plus propre dans la famille de Lou qui en fait ne raconte qu'une partie de la tragédie de No, sinon ils auraient dit non, elle va entamer une autre vie. Au début elle dort des jours entiers car elle dormait d'un oeil jusqu'ici, participe aux travaux de la maison..
La mère de Lou est dépressive depuis qu'elle a perdu son deuxième enfant (mort subite du nourrisson) et depuis elle est en mode survie, les rôles sont inversés, c'est Lou qui la protège, qui joue la maman alors que le père fait ce qu'il peut comme il dit. La mère de Lou se réveille au contact de la détresse de No, enfin elle s'intéresse à quelqu'un (et ce n'est pas Lou) donc sort de la torpeur où la plongent ses médicaments. No finit par trouver un travail, très dur et peu à peu commence à boire. Et d'autres problèmes vont commencer….

Ce que j'en pense :
Delphine de Vigan nous raconte l'histoire de 3 solitudes : celle de Lou enfermée dans son « surdouement » qui intellectualise tout, raisonne sans cesse mais est incapable de nouer ses lacets et qui pense pouvoir sauver No parce que rien ne doit être impossible. Elle est seule dans sa famille, face à la dépression, aux silences, au manque d'intérêt de sa mère qu'elle défend pourtant quand la famille ne supporte pas qu'elle ne fasse pas d'effort. Elle est enfermée dans un monde sans émotion, les adultes et les autres lycéens ne comprennent pas son mode de pensée.
Puis la solitude de No, que sa mère a abandonnée quand elle était enfant car issue d'un viol collectif et qui a eu une vie à peu près normale tant que sa grand-mère a été là. Sa mère qu'elle cherche à retrouver mais qui la repousse toujours comme si elle voulait l'effacer de sa vie. Elle doit essayer de survivre quand les autres vivent, avec la cigarette dans une main la bière dans l'autre, dans le dénuement le plus absolu et l'indifférence générale.
Il y a aussi une troisième solitude, celle de Lucas, jeune homme rebelle de 17 ans qui passe son temps à se faire renvoyer d'un lycée à un autre, qui se fait expulser des cours car il est dans la provocation. Il vit tout seul dans l'appartement d'un de ses parents. Son père est parti à l'étranger et vit sa vie, sa mère habite avec un autre homme et passe de temps en temps remplir le frigo et laisser de l'argent pour se donner bonne conscience.
Delphine de VIGAN nous décrit superbement bien ces trois êtres paumés, réunis par leur vie solitaire et qui trouvent, en aidant No qui est encore plus abîmée qu'eux par la vie, un sens à la leur par l'empathie. Ils sont révoltés par l'indifférence générale vis-à-vis des SDF et refusent de restés passifs devant cette misère.
Un beau livre bien écrit, qui m'a encore plus touchée que « rien ne s'oppose à la nuit » où je trouvais que les émotions étaient bridées.
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