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Critique de MassLunar


Pour glacer davantage cette fin d'année , Glénat a décidé de publier une oeuvre d'anticipation austère et oppressante mais aussi porteuse d'une sympathique touche de pureté morale : Blue Phobia d'Eri Tsuruyoshi.

Visuellement, difficile de ne pas rester insensible devant ce bel objet éditorial. Réédité en un seul tome pour la publication française, Glénat délivre un remarquable one-shot doté d'une couverture aussi posé qu'hypnotique sur laquelle la couleur bleu vient habilement happé les yeux du lectorat. Il y a un petit parfum de clinique immorale dans ce titre de S.F assez bien construit.

L'intrigue du manga de Tsuruyoshi se concentre avant tout sur une évasion, celle de deux cobayes atteints d'une étrange maladie, la maladie indigo qui teinte peu à peu leurs corps en bleu tout en les pétrifiants. Cette maladie serait dû à l'exploitation d'une précieuse et puissante ressource : le saphir marin. La mangaka a le mérite de combiner efficacement deux axes majeurs dans sa structure narrative.

D'abord, il y a l'évasion en elle-même qui apporte une certaine tension dans ce huit-clos oppressant que sont les parois froides et impersonnelles d'un centre de recherche. le récit est ainsi mené à un certain rythme sans décrochage, mené tambour battant, avec bien évidemment ce qu'il faut de révélations et de personnages allumés pour combler cette intrigue dynamique.

Le second axe est bien sûr le regard que l'autrice porte sur la science sans conscience. Quand le voile de l'amnésie du héros principal est déchiré, on découvre toute la portée critique de ce titre qui a le mérite de présenter différents enjeux autour d'une thématique majeure : la déshumanisation de la science. Les cobayes humains sont ainsi traités monstrueusement afin de tester les capacités de cette puissance ressource qu'est le saphir bleu. La mangaka s'amuse d'ailleurs à jouer étroitement avec cette symbolique du bleu rattaché tantôt à la froideur cruelle et macabres de ses expériences, tantôt à un certain idéal de pureté morale et écologique bafoué par l'obsession de l'Homme. Les amateurs d'oeuvres de genre se retrouvent allègrement en terrain connu avec un partis pris esthétique autour de la pureté d'un joyeux bleu intéressant.

Après , force est de reconnaître que, dans l'ensemble, le contexte n'est pas nouveau. L'obsession scientifique qui vire carrément à la folie ou qui est entaché par la vengeance, c'est un sujet qu'on retrouve dans bon nombres d'oeuvres de S.F. Pour ma part, je n'ai pas arrêté de penser à l'excellente anime Elfen Lied pour cette thématique du cobaye révolté face aux scientifique.

Le scénario souffre donc d'un parfum un peu lourdingue de déjà-vu et qui est aussi un peu entaché par une écriture un peu brouillonne de certains personnages dont les motivations sont parfois un peu obscures. Je pense notamment au personnage de Kisui dont j'ai trouvé son comportement parfois soudain, voir même bâclé alors que cet "antagoniste" un bel grain de folie. Seul le héros tire un peu son épingle du jeu en apportant une certaine humanité à ce titre parfois mal nuancé.

Cependant, malgré un scénario pas forcément maîtrisé de bout à bout , Blue Phobia est pour moi un excellent thriller d'anticipation doté d'une véritable force graphique. Force est de reconnaître que la qualité éditoriale qu'a fourni Glénat s'harmonise très bien avec le dessin tranchant et redoutable d'Eri Tsuruyoshi . La mangaka s'illustre dans le registre horrifique avec un sympathique design autour de ce cruel saphir comme en témoigne la sinistre créature contaminée. Sans pousser à la surenchère, l'auteure maîtrise parfaitement les expressions de ces personnages jusqu'à la limite de leurs émotions et délivre une mise en case à la fois ample et cloisonnée pour mieux nous happer dans les recoins de cette tortueuse course-poursuite. Merci encore une fois à Glénat pour le choix judicieux de ce grand format qui a le mérite de sublimer également ce premier travail de la part d'Eri Tsuruyoshi.


Avec Blue Phobia , Eri Tsuroyoshi signe une première oeuvre imparfaite mais réussie. Pour moi, la structure un peu brouillonne du scénario ne fait pas perdre trop d'éclat à ce Saphir Marin qu'est Blue Phobia. Ce n'est sans doute pas un titre de SF qui restera gravé dans la mémoire mais Glénat délivre un bel objet éditorial qui, assortie aux qualités graphiques de l'autrice, peut ravir un tant soi peu les amateurs de SF tendue et critique.

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