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Critique de berni_29


Le Chat du Rabbin, avec ce tome 1 : La Bar-Mitsva, est pour moi une première incursion dans l'imaginaire de Joann Sfar.
« Chez les juifs, on n'aime pas trop les chiens, Un chien, ça vous mord ; ça vous court après, ça aboie ». C'est en quelque sorte les premières bulles qui introduisent le propos pour montrer une inclination des juifs aux chats. Ainsi ce chat du rabbin se satisfait de ce constat, partageant son quotidien entre un maître érudit et la fille du maître, Zlabya, qui le couve de son affection. Mais il y a ce bavard de perroquet qui gâche tout, bruyant, qui parle sans cesse pour ne rien dire. Un jour, crac ! le chat ne fait qu'une bouchée de l'horripilant volatile, et voilà que le greffier se met à parler...
Passé l'étonnement, le rabbin décide de faire l'éducation de son animal de compagnie, puisqu'il parle, c'est peut-être l'occasion d'en faire "un bon juif", le remettre dans le droit chemin. Mais, pour le coup, ce chat n'a pas sa langue dans sa poche et se met à dire ce qu'il pense, non pas à tort et à travers, mais avec infiniment d'esprit et beaucoup d'impertinence au regard de l'ordre établi, c'est-à-dire ce qu'il faut dire et ne pas dire sous le toit d'un rabbin...
Voici un chat qui ne cesse de poser des questions, à tel point que les contradictions et incohérences des textes sacrés deviennent aussi énormes qu'un museau au milieu de la frimousse.
Le procédé littéraire est bien vu, certes vieux comme le monde, une sorte de prosopopée, faire parler un animal pour jeter un regard à la fois détaché, candide et satirique sur le monde qui l'entoure, ici cela fait mouche, d'autant plus que l'intention est servie par une grande ironie et un dessin à propos. Qui plus est, l'allure graphique d'un chat métamorphosé selon les situations, tantôt félin fin séducteur et délicat, tantôt hypocrite et roublard, tantôt chat de gouttière réduit à la physionomie d'une serpillière... m'a fait bien rire.
Il y a en effet dans cette BD un humour décoiffant. Et cet humour sert avec intelligence le dessein de son auteur.
C'est l'esprit des Lumières, c'est Voltaire en terre judaïque. Il y a un esprit philosophique qui se faufile dans ces planches. Je me suis alors engouffré avec jubilation parmi les rues d'Alger l'ancienne, dans les pérégrinations de ce matou irrévérencieux.
Le propos de Joann Sfar, son coup de crayon, vont à l'essentiel. La réflexion va bien au-delà du simple regard posé sur le judaïsme.
Lisez un peu ceci, quelques propos du chat du rabbin vers la fin de la BD : "Je n'aime pas trop les jeunes hommes. Surtout quand ils se passionnent pour la religion. Ils la manipulent comme un instrument de pouvoir. L'érudition leur sert à prendre la parole à table". Bon, c'est un chat qui le dit...
Voici une BD aux accents universels, qui fait du bien par les temps qui courent !
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