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Critique de UnCurieux


Voici un roman, sorti en français en septembre 2017 aux éditions Actes Sud, que j'attendais avec une immense impatience.

Imaginez donc : voilà un livre de Kim Stanley Robinson, l'auteur des chefs-d'oeuvres Mars la Rouge, Mars la Verte, Mars la Bleue (oui, les titres ne sont pas très recherchés, mais le contenu ! le contenu ! Quel réalisme, quel travail !). Un livre qui promet de s'inscrire dans la continuité de la fameuse trilogie martienne. Mieux que de s'inscrire dans la continuité : plutôt que de se borner à la colonisation et la terraformation de Mars, on va passer à la vitesse supérieure en étendant la chose à tout le système solaire !

Comment ne pas être impatient?

De si grandes attentes, vous l'avez compris, ne peuvent que conduire qu'à une grande déception. Mais, malgré ma tristesse, je ne regrette pas d'avoir lu ce livre.


Un univers incroyable
Je vais commencer par pointer les points forts de ce roman. Personne ne sera surpris parmi ceux connaissant l'auteur : le gars est carré.

Nous nous situons aux alentours de l'année 2312, une époque où Mars est terraformée et est indépendante de la terre, où les astres majeurs du système solaire ont été colonisés, où certains astéroïdes ont été « terraformés » (ou, pour être exact, paraterraformés) pour être rendus habitables -et servir de réserves à des animaux qui, depuis longtemps, ont disparu de la surface de la Terre-. C'est là la description, un peu plus détaillée, de l'Accelerando décrit dans Mars la Bleue, où l'on assiste depuis Mars à l'explosion de la colonisation humaine.

On retrouvera avec un immense plaisir la cité de Terminateur, sur Mercure tandis que, sans surprise, la Terre est en crise : il y a eu une montée des eaux dramatiques ; New York est devenue une seconde Venise ; un petit âge glaciaire a provoqué une terrible famine ; les nations sont, plus que jamais, divisées et sont affaiblies face à des mégacorporations disposant d'immenses ressources. On reste, ici, en territoire connu : c'est dans la droite ligne de la fameuse trilogie martienne.

Les planètes de notre bon vieux système solaire ne sont pas les seules à faire face à d'importants changements : l'Humanité elle-même est à l'épreuve. Certains bénéficient du traitement de longévité, notamment les personnes vivant dans les colonies spatiales. Leur durée de vie est, pour ainsi dire, doublée : il n'est pas inconcevable, pour un colon, de pouvoir vivre plus de 200 ans ! Mais cette modification de l'espérance de vie n'est pas la seule modification : la taille varie grandement, du nanisme au gigantisme, hybridation avec des animaux, implants contenant des ordinateurs quantiques, transsexualité et modification profonde des relations familiales sont au menu.

Avec un univers pareil, d'une échelle si immense, peaufiné avec tant de soin, le roman ne peut qu'être excellent ! Non? Non. Mais alors, là, vraiment pas.

Inutile de rappeler qu'un roman, c'est beaucoup, beaucoup, beaucoup plus qu'un univers imaginaire. C'est une intrigue, des personnages vivants, un style. Et là, je crains de ne pas pouvoir être indulgent, malgré tout le respect que j'ai pour Kim Stanley Robinson.

Les personnages, d'abord. Grosso merdo, vous allez en suivre trois :

Swan, la protagoniste principale. Une personne bipolaire, que j'ai trouvé proprement insupportable : réactions excessives, irrationnelles, incompréhensibles, se laissant porter par les événements sans être jamais (je trouve) d'une quelconque utilité pour l'intrigue.

Wahram, un homme flegmatique. Très flegmatique. En fait, ce seul trait suffit à décrire toutes ses actions, sa personnalité, son être. Vous aimez les personnages aux multiples facettes? Passez votre chemin.

Jean Genette, une naine exilée de Mars. Intelligente, elle semble piger vite, être équilibrée, avoir une histoire personnelle intéressante. En plus, elle fait avancer l'intrigue. C'est pour cela que vous ne ferez que la croiser de loin en loin, brièvement : vous auriez pu trouver du plaisir à suivre ses aventures. Heureusement, vous allez suivre Swan : vous auriez pu vous attacher à un personnage, vous l'avez échappé belle.

Peut-être ai-je loupé la profondeur des personnages. Il n'en reste pas moins que je les ai trouvés sans saveur, sans intérêt, sans relief. Pour ce seul motif, j'ai envie de sortir un carton jaune.

Hélas, mille fois hélas, ma déception ne s'arrête pas là. Il me faut, à présent, parler de la structure.

Je ne sais pas pourquoi, mais l'auteur a cru bon d'intercaler des chapitres absolument incompréhensibles, constitués de listes de mots sans la moindre espèce d'intérêt ; vous avez aussi les promenades quantiques, où vous avez un aperçu de la psyché de tel ou tel personnage (mais un aperçu parcellaire ; et la psyché concernée me paraît être celle d'une personne ayant bien du mal à garder le fil de ses pensées, du genre écureuil cocaïnomane, m'voyez). Je suis tolérant aux longueurs, vraiment. Je n'ai aucun problème avec les longues descriptions, avec les passages contemplatifs : j'apprécie, même. Mais là, c'est trop, même pour moi. J'ai tout lu, et pas en diagonale, mais cela m'a ennuyé. Et quand le lecteur ressent de l'ennui au point d'hésiter à continuer sa lecture, c'est qu'il y a un souci.

Bon, voilà, la critique est finie. Mmm? Comment? Je n'ai pas parlé de l'intrigue? Est-ce un oubli de ma part? Absolument pas. Je suis simplement démuni pour vous en parler : ce qui sert d'intrigue n'a pas su capter mon intérêt. Et je ne suis pas assez malin pour pouvoir vous exposer clairement l'objet et les finalités de ladite intrigue. Il est question d'un complot, avec des ordinateurs quantiques, des animaux et des actions aussi spectaculaires qu'inutiles sur Mercure ou Vénus.

Vous suivrez Swan, la détestable protagoniste, qui va subir les morceaux d'intrigues tout le long du livre. Cette dernière ne servira à rien pour la résolution, qui tombera du ciel en un Deus Ex Machina venu de nul part. Vous allez voleter d'un point à l'autre du système solaire, sans jamais vraiment saisir l'objet de vos pérégrinations : mais qu'est-ce qu'on fout sur Io? Pourquoi Titan? Pourquoi revenir à Mercure, faire un crochet par la Terre? Pourquoi cette orgie spatiale? Pourquoi? Qu'est-ce qu'il se passe? Laissez-moi tranquille ! Que ça s'arrête !

A la fin, le complot sera déjoué, tout vous sera révélé. Mais cela ne vous fera rien. Vous hausserez certainement les épaules, avec un « ah, ok » poli mais désabusé.

Ma conclusion :
Je vous propose de faire comme si ce roman n'avait pas existé. Kim Stanley Robinson est un grand auteur. Tout ce qu'il écrit est digne d'intérêt. 2312 n'a jamais existé. Nous nous en tiendrons à cette version.

Ma critique complète à lire sur mon blog :

Lien : https://journalduncurieux.co..
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