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Critique de Blok


Ceux qui liront ce livre sur la foi de son titre, ou du résumé éditeur, seront déçus. Il ne s'agit pas en effet d'une "histoire buissonnière", d'un tissu d'anecdotes pittoresques, avec pour fil conducteur le récit de voyages en bicyclette, mais, ce qui est d'ailleurs plus intéressant, d'un essai d'ethnohistoire
La thèse que l'auteur entend démontrer est la suivante: la nation France s'est constituée beaucoup plus tard qu'on le pense (ou qu'on le pensait) généralement; jusqu'au XXème siècle, il n'ya en effet qu'une poussière de petites unités territorailes plus ou moins autonomes, qui ont peu de contacts entre elles, dont les habitants se déplacent peu, et, sont souvent incapables de se comprendre au-delà d'un cercle étroit autour de leur village, tant ils parlent d'idiomes différents. En dehors d'élites étroites, le français est ignoré. Les gens mènent une vie dure, brutale et courte. Dans ces conditions il ne peut bien sûr exister de sentiment national,

Ces thèses sont très proches de celles développées dès 1982 par Eugen Weber dans La fin des Terroirs, dans un cadre chronologique il est vrai un peu plus étroit,
Aussi il est surprenant que l'auteur n rende pas hommage à son devancier, et ne le cite même pas, sauf dans les notes
L'ouvrage de Robb est cependant intéressant et d'une lecture passionnante

L'ouvrage est le fruit d'un énorme travail de dépouillement et livre une foule de renseignements, restant malheureusement parfois au niveau de l'anecdote en raison d'un travail de synthèse insuffisant
Ainsi, dans deux chapitres distincts, l'auteur pointe la quasi-inexistence des déplacements, puis leur fréquence et leur importance ; ces deux affirmations sont vraies, dan leurs contextes respectifs ; mais il est dommage précisément qu'elles n'aient pas été rapprochées.
On peut aussi reprocher à l'auteur de ne pas donner une place suffisante à la littérature dans ses sources ; contrairement à ce qu'il affirme, certains romanciers (on pense à Balzac, Zola, Maupassant..) connaissent parfaitement le peuple, en parlent fort bien, et sont d'excellentes sources pour l'historien.
Il cite pourtant le célèbre passage De La Bruyère où ce dernier décrit les paysans comme des « animaux farouches » mais c'est à contre-sens car il y voit un de mépris, alors que ce texte, émanant d'un satiriste, est à prendre au second degré ; l'auteur entend au contraire dénoncer la misère où le peuple est tenu.
On peut aussi relever quelques erreurs matérielles.
L'auteur mentionne ainsi le récit que fait Emile Guillaumin dans son livre « La vie d'un simple » de la mort de sa grand-mère, à laquelle il a assisté ; or Robb situe ce décès dans les années 1840, alors que Guillaumin est né en 1873.
De même, il affirme que le braconnage était puni de mort en 1789, alors que cette sanction a été abolie dans le cadre des réformes du droit et de la procédure pénale réalisées sous l'impulsion de Colbert en 1669-1670.
Il place aussi l'action du Grand Meaulne dans le Bourbonnais alors qu'on sait qu'elle se déroule en Sologne,

Comme je l'ai dit, le livre est intéressant ; mais je conseillerais de la doubler de celle de la Fin des Terroirs (ou de lire ce dernier livre si on n'en lit qu'un seul) disponible en librairie grâce à une opportune réédition de 2011
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