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Critique de Foxfire


J'aime les auteurs qui ont une patte, qui savent donner une tonalité très personnelle, unique et singulière à leurs oeuvres. Edogawa Ranpo est de ceux-là. C'est un auteur dont je suis coutumière et chaque fois que je me plonge dans un de ses livres, j'y retrouve avec bonheur les ingrédients qui donnent une saveur particulière à ses histoires : une sensualité teintée d'étrangeté, voire de perversion, un raffinement élégant, des personnages souvent tordus, des situations à la fois poétiques et grotesques. Ce recueil est du pur Edogawa Ranpo. Je ressors donc très satisfaite de ma lecture.

Le recueil s'ouvre sur la nouvelle qui lui donne son titre, « un amour inhumain ». Cette nouvelle est très réussie, invitant le lecteur dans l'intimité d'un couple dont le mari a un secret bien singulier. L'auteur s'est toujours intéressé aux personnages ayant d'étranges obsessions, cette nouvelle s'inscrit dans cette lignée. L'atmosphère à la tonalité quasi-surnaturelle et très japonaise est vraiment fascinante.

Le texte suivant, « L'apparition d'Osei », est tout à fait saisissante de cruauté. La relation, dès le départ teintée d'humiliation et de souffrance, entre Osei et Katukaro, trouve son apogée dans une scène très marquante tant est mise en lumière la malveillance d'Osei.

« Les canaux de Mars », récit sans véritable intrigue, plutôt porté sur l'onirisme m'a moins séduite même si l'écriture est belle et les images dépeintes évocatrices.

On retrouve un certain onirisme dans la nouvelle suivante, « Les crimes étranges du Docteur Méra » mais il ne s'agit ici que d'instaurer une atmosphère poétique et étrange comme cadre d'une intrigue savamment construite. Je ne suis pas fan des romans policiers à énigme et cet aspect est souvent présent dans l'oeuvre d'Edogawa Ranpo. Mais chez cet auteur, ce côté whodunit ne m'a jamais dérangée, cet aspect ne prenant jamais totalement l'ascendant sur l'atmosphère particulière des récits. C'est le cas ici. Il y a bien une intrigue policière dans cette nouvelle, avec la question « qui ? » comme fil narratif mais ce qui est au coeur de l'histoire reste tout de même cette ambiance bizarre, poétiquement macabre.

« La grenade » se rattache encore plus au genre policier à énigme. Les questions « qui ? » et « comment ? » étant vraiment au coeur de l'intrigue. Mais celle-ci s'avère tellement tortueuse et tordue que c'en est un véritable plaisir même pour moi qui ne suis pas une amatrice du schéma classique indice-hypothèse-déduction. Il faut dire que ce schéma narratif est ici poussé à l'extrême au service d'une histoire particulièrement retorse. Morbide, tordu, subversif, ce récit est un de mes préférés du recueil.

Le recueil se clôt sur une nouvelle qui prend pour cadre un contexte inattendu chez l'auteur. En effet, cette dernière histoire se déroule pendant la seconde Guerre Mondiale. Mais, il s'agit bien d'une oeuvre d'Edogawa Ranpo, aucun doute n'est permis. Malgré ce décor inédit (à ma connaissance) chez l'auteur, dès le début le ton est donné à travers ce personnage qui évoque la fascination quasi-érotique que le feu des bombardements lui procure. Propos assez provocateur d'ailleurs… La suite du récit confirmera qu'on est dans du pur Edogawa Ranpo, l'histoire mêlant Eros et Thanatos de façon outrancière et non dénuée d'une certaine ironie.

Décidément, cet auteur parvient toujours à me surprendre tout en restant le même et j'aime cette singularité qui se retrouve dans chacune de ses oeuvres. Il ne m'a jamais déçue.
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