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Critique de le_Bison


J'ouvre la première page, deux photos qui se font face, une mère et sa fille, à gauche, des buissons à droite. Est-ce qu'elles jouent, est-ce qu'elles interrogent ? Je ne vois pas leur visage, leurs cheveux fouettant leurs regards, leurs sourires, leurs perplexités. Je me mets à la place de ce couple, la fille a envie de jouer, la mère a envie de la protéger. La protéger de quoi, de cet ennemi totalement invisible que les buissons ne laissent même pas entrevoir. La radioactivité. Il est un lieu où l'on ne peut plus aller, laissant à la dérive les souvenirs de sa vie, de ses ancêtres. Il est un lieu, où il est nécessaire d'avoir son compteur sur soi et vérifier que l'on peut sortir prendre l'air, prendre le vent qui emporte ou dépose quelques poussières invisibles mais radioactives.

Je tourne la page, deux autres photos, des enfants qui regardent à travers la vitre, un jardin mi-vert mi-ombragé presque abandonné. Et toujours cette même réflexion, comment continuer à vivre dans cet environnement. Pour soi, pour sen enfants, pour ses ancêtres. Delphine Parodi, photographe installée au Japon depuis 2010, montre le visible et l'invisible, des photos humaines où l'homme, la femme, l'enfant sont présents au coeur de son regard, tout comme la nature qui elle, continue, comme s'il ne s'était rien passé, à survivre dans cet environnement.

Entre des séries de photographies, Yoko Tawada, poétesse japonaise installée en Allemagne, (d)écrit quelques mots, peurs, questionnements sur cette vie là-bas, après ce 11 mars 2011. Il y est question là-aussi, d'enfants, de nature et de peurs invisibles. Je n'ai pas tous les codes pour comprendre tous ces poèmes mais ces derniers permettent de respirer entre deux séries de photos, de les appréhender, de réfléchir à ces sujets, ces hommes, ces pécheurs, ces mères de famille, ce moine ou cet enfant-là qui se demande encore pourquoi il n'a pas le droit de jouer pieds nus dans les herbes vertes.

Je prends un verre, whisky sans glace, eau contaminée, un Suntory Whisky Toki qui ne vaut pas un Nikka Coffey Grain, en feuilletant ce beau livre introspectif et silencieux. D'ailleurs, mon verre est peut-être lui aussi contaminé, il faut que je regard où se trouve ma distillerie. Mais j'ai compris, bien au-delà des poussières invisibles, là-bas, la vie continue. Même sans poissons, même sans vaches, troupeaux abattus, même sans eau. D'ailleurs, c'est pour cette raison que j'ai arrêté de boire de l'eau.
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