AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Littecritiques


Ne t'arrête pas de courir, c'est une injonction mais dans la bouche de Mathieu Palain, cela ressemble plutôt à une prière : celle qu'on fait le soir tout bas en espérant de tout son coeur que quelqu'un change. Parallèlement, ne t'arrête pas de courir, dans la bouche de Toumany Coulibaly, c'est la fuite vers l'avant, la fuite de son passé, de ses expériences, de ses fréquentations. Courir c'est évoluer, avancer, changer, s'éloigner. Courir devient alors la seule solution.

Toumany Coulibaly, c'est un homme issu d'une fratrie extrêmement nombreuse, né dans un quartier pauvre. Il est talentueux, il court, il est vite repéré et est destiné à faire de grandes choses. Il le fait, il devient champion de France du 400 mètres. Oui mais voilà, Toumany, lui, il dit « J'ai plus d'adrénaline quand les flics me courent après qu'en remportant un 400 mètres. ». Alors il vole, par nécessité au départ, par habitude ensuite. Il vole sans doute parce que l'adrénaline lui fait pousser des ailes, parce qu'il ne sait pas dire non et parce que tous ses copains le font.

Mathieu Palain, lui, est journaliste, son rêve c'était d'être footballeur mais il explique qu'il n'était pas assez talentueux pour faire carrière.

Alors comment ces deux hommes arrivent-ils à se rencontrer ? En fait, Mathieu est issu du même quartier que Toumany, ils ont le même âge, ils auraient pu se croiser sur un terrain de foot ou en bas d'un immeuble mais non, leur premier lieu de rencontre sont les parloirs d'une prison dans laquelle Toumany est enfermé. M. Palain lui écrit une lettre, sûrement parce qu'il se retrouve un peu dans Toumany ; Toumany lui répond. Ils se rencontrent aux parloirs et au fil des visites, se lient d'amitié.

C'est d'abord une belle rencontre entre ces deux hommes, dont l'enfance embrasse des traits communs mais dont les destinées se distinguent.
C'est ensuite, une belle histoire de vie : celle de Toumany, talentueux athlète luttant contre ses envies et ses habitudes, contre le rôle aussi que lui ont assigné la société et les médias « Pour la première fois, Toumany comprend ceux qui ont passé vingt ans à tourner dans une cour de promenade et qui, une fois dehors, ont l'impression d'avoir le mot « taulard » tatoué sur le front. », contre ses fréquentations, contre lui-même parfois aussi.
Mais c'est surtout, enfin, un roman qui questionne sur tant de sujets peu connus de notre société. C'est un livre à placer entre toutes les mains : celles averties de l'univers carcéral et plus généralement du monde de la justice ; mais surtout entre celles profanes qui ne connaissent que si mal leurs pairs derrière les portes de nos cellules françaises, comme le dit Charles Bukowski dans Journal d'un vieux dégueulasse en parlant de la prison « On transporte dans un autre élément la société humaine dans son entier (…) Un taulard est un perdant qui aura essayé ». C'est un très beau témoignage du destin d'un être humain, qui regorgent de (tentatives ?) d'explications sur le passage à l'acte puis d'exploration des différents facteurs de désistance : la naissance d'un enfant, l'envie de se poser, l'âge...

Ce roman est un véritable coup de poing qui donne à réfléchir, en transparence, authenticité et empathie. C'est un roman plein d'espoir même si, comme le dit si bien l'auteur, « On ne sauve pas les gens malgré eux. Il faut qu'ils aient envie de se sauver ». Chapeau à vous deux Messieurs !

Lien : https://littecritiques.wordp..
Commenter  J’apprécie          120



Ont apprécié cette critique (12)voir plus




{* *}