AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Seraphita


Après dix ans d'absence, Romain revient dans le pays de son enfance, au coeur de la Nièvre. Il y retrouve son frère Chris et les souvenirs de son enfance, notamment d'un été où leur vie innocente a basculé irrémédiablement vers le monde adulte. Ils formaient un gang avec son frère, Vlad, germe de voyou et la belle Julie qui cristallisait tous les désirs adolescents. le retour au pays sera aussi brutal que la reviviscence des souvenirs. Il va être temps, pour tous, de solder de vieux comptes, au risque d'un nouveau basculement…

« Rural noir » est le premier roman écrit par Benoît Minville, « après des ouvrages pour adolescents et jeunes adultes ». C'est une oeuvre excellente, une intrigue finement pensée et habilement construite qui n'est pas sans évoquer la veine des romans noirs américains. L'auteur commence, classiquement, à juxtaposer deux périodes « passé » et « présent », entre souvenirs d'enfance du gang portés par la voix de Romain et temps du retour douloureux au pays. Puis le rythme s'accélère, l'intrigue se noue et les deux temps entrent progressivement en résonnance jusqu'à tisser la trame qui conduit au vertigineux final.
Le ton est celui de la nostalgie, celle de l'enfance perdue, de l'innocence qui s'effrite, s'érode, jusqu'à voler en éclat. La violence mène sourdement la danse au fil des chapitres, parfois assourdie, d'autres fois éclatante, à l'image des coups que les protagonistes échangent, donnent et encaissent.
Benoît Minville dépeint un monde rural laissé pour compte, des enclaves oubliées de la République où de nouvelles économies se font jour, au mépris de la loi. La figure du gendarme, J.R., enfant du pays en proie à des dilemmes insolubles, est en ce sens exemplaire : comment exercer son métier – faire appliquer la loi – dans un territoire où l'on connaît tout le monde, où les enfants que l'on a côtoyés, avec qui on a pu jouer, se battre, sont devenus des adultes qui prennent des libertés avec la loi, préférant se faire justice eux-mêmes ?
Derrière la violence, la nourrissant par contrecoup, il y a aussi l'attachement viscéral à ceux qu'on aime, quels que soient leurs agissements passés ou présents. le roman porte une énergie fascinante, celle d'êtres aux prises avec leurs démons - angoisse, culpabilité - et portés par la volonté d'une rédemption, jusqu'au bout d'eux-mêmes.
« Rural noir » oscille entre violence, cruauté, et lumière d'une humanité qui cherche à survivre, malgré le poids des traumatismes. Brillant !
Commenter  J’apprécie          50



Ont apprécié cette critique (5)voir plus




{* *}