La Route (BD)

Je m'inquiétais un peu malgré tout le bien qu'on en a dit. Pas tellement sur l'atmosphère graphique mais plutôt sur le rendu des dialogues. Je m'inquiétais pour rien. Dés le départ, on fait face aux rituels de survie, à ce qui remplit le mensonge du jour. Dés la page 22, on a la case des yeux du père sans aucun mot puis l'enchaînement des deux corps, voilà le pouvoir de la BD face au livre. Pareil pour les détails de la boite d'allumettes qui exalte « la magie du feu », ceux d'une boîte de conserve dont la couverture ne manque pas d'ironie, ce panneau évangéliste qui montre la voie ou encore le panier de basket qui devient auréole d'ange. Il y a aussi ce livre sur Vincent van Gogh perdu au milieu des autres et cette illustration du « au ciel » de la prière de l'enfant. Clairement, toute la BD ne manque pas de trouvailles face au livre. Rien que cette page 103 qui pourrait en redire à un Warhol sous colle ou ce faux fondu final qui « mesure la lumière que l'on porte en soi ». Pour moi, même si la BD est excellente, elle a quand même des faiblesses, elle ne rend pas les envolées lyriques que McCarthy sait faire en l'espace d'un ou deux paragraphes et qui vous laisse sidéré. J'ai aussi trouvé qu'elle dénaturait un peu le dialogue avec Elie qui est bien plus riche dans le livre alors qu'elle s'appesantissait par exemple sur la nécropole et ses grigris mystiques. Enfin, j'imagine que c'est la manière pour le dessinateur de s'en donner à coeur joie et d'exprimer son juste, qu'il continue sur cette voie pour notre plus grand plaisir.