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Critique de POY1


POY1
06 novembre 2021
Dans cet essai, de très haut niveau, John Keegan, analyse l'évolution de la posture du chef de guerre à travers les époques. Pour cela, il illustre son étude en présentant les comportements d'Alexandre le Grand, du duc de Wellington, le vainqueur de Napoléon à Waterloo, du général nordiste Grant qui gagna la guerre de Sécession et enfin d'Adolf Hitler.

Si les trois premiers personnages étaient à proprement parlé des guerriers et des soldats formés à faire la guerre, j'ai été assez surpris par le choix d'Adolf Hitler. Excepté son expérience dans les tranchées, ce n'est pas un soldat de métier. Je pense que Keegan aurait pu choisir un général allemand de la Première guerre mondiale pour être un exemple de commandement plutôt que le Führer.

Keegan estime qu'un chef de guerre agit différemment selon les époques, de part l'esprit qui anime les membres de la société qu'il commande et d'autre part par la technologie dont il dispose. Pour chacun de ces exemples, Keegan pose la question suivante : faut-il, pour un chef, être au coeur de l'action, tout le temps ? Parfois ? Jamais ?. Ce questionnement sera le fil rouge de cet essai.

En fait, ce qui est important pour un chef, d'après l'historien, c'est de respecter cinq impératifs. L'affinité, être proche de ses hommes. L'éloquence, savoir leur parler, les galvaniser, leur donner des ordres clairs et directs. La sanction, pour conserver le respect et la discipline des troupes. L'action, le chef donne sens par les faits, en cohérence avec ses dires. L'exemple, le chef ne peut exiger de ses hommes quelque chose qu'il ne peut pas donner ou qu'il ne s'applique pas. Alors selon les époques et les technologies, le chef de guerre doit adapter ses postures pour respecter ces impératifs (d'où le titre anglais qui est « The mask of command »).

Excepté Hitler, les trois autres chefs de guerre décrits par Keegan vont être au plus près de la bataille, si ce n'est dedans. Ils galvanisent leur troupe par leur présence et prennent les éléments d'ambiance nécessaires pour adapter les mouvements des troupes et remporter la victoire. En dehors de la bataille, ils se forgent un masque qu'ils endossent pour renforcer leur crédibilité, la confiance et finalement l'abnégation que leur porte leur armée. C'est pour cela que le personnage d'Hitler ne colle pas à la démonstration. le Führer n'a jamais été au coeur des combats. Il a opté pour des quartiers généraux trop loin des batailles, comme le faisaient les généraux allemands du premier conflit. Comportement qu'il a fustigé pourtant, il n'était pas à une contradiction près. Adolf Hitler n'a jamais fait la preuve de sa capacité de stratège, bien que disposant d'une excellente mémoire et d'être un autodidacte. L'image d'Hitler montrée sous son plus beau jour par la propagande n'a fait qu'écran de fumée tant que les victoires étaient là. Enfin, le chef Nazi n'a pas non plus utilisé les nouvelles technologies, comme un Rommel ou un Guderian, pour employer au mieux son commandement.

En fait, Keegan utilise Hitler pour préparer sa conclusion, écrite en pleine Guerre froide. le développement de l'armement nucléaire et la rapidité de transmission des informations ne permettent plus d'avoir des commandants en chef sur le terrain. Ils doivent se protéger des attaques adverses en se cachant dans des bunkers. La guerre nucléaire rend ainsi caduque les cinq impératifs. Il n'y a plus de place à l'humain. Ce n'est plus à un chef militaire que la nation confie les armes directes mais au chef de l'État. de Gaulle l'avait compris et c'est pour cela que le Président de la république est aussi chef des armées. Sauf que De Gaulle était un militaire et ce n'est plus le cas aujourd'hui de notre président ou Obama et Trump, aux Etats-Unis. Ainsi, nos chefs d'état sont-ils capables de réagir et prendre les bonnes décisions face à une attaque nucléaire ? Surtout si elle vient d'un homme à la Adolf Hitler. de même, dans un emploi plus conventionnel, les chefs d'état occidentaux décident d'attaques de drones ou de missile, mais ne déshumanisent-ils pas la guerre, comme pourrait l'être celle nucléaire ?
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