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Critique de gerardmuller


Chien Blanc : Romain Gary (1914-1980)
Ce récit est d'abord l'histoire d'un chien berger allemand qui entre dans l'existence de Gary en février 1968 à Beverly Hills où demeure l'auteur avec sa femme Jean Seberg. Un chien qui s'est perdu et qui débarque un beau matin devant la porte de l'auteur avec Sandy, son autre chien qui était parti en cavale. C'est un coup de foudre : « Il m'observait, la tête légèrement penchée de côté, d'un regard intense et fixe, ce regard des chiens de fourrière qui vous guettent au passage avec un espoir angoissé et insupportable. » Il s'avère rapidement que Batka a été dressé à l'attaque à l'encontre des Noirs. le dilemme est alors à son comble car il faut savoir que Jean Seberg milite depuis plusieurs années pour la cause noire et contre le racisme et donc sa maison est un lieu de réunions diverses avec des Noirs. Que va faire Gary avec son chien Batka qu'il adore ?
On devine déjà en cette année 1968 des tensions dans le couple et c'est un peu aussi le thème d'une partie de ce livre de souvenirs. Jean Seberg s'est investie totalement avec les Blacks Panthers et la lutte contre le racisme.
Les jugements se Gary concernant l'intellectuel américain sont sans appel : « le signe distinctif par excellence de l'intellectuel américain, c'est la culpabilité. Se sentir personnellement coupable, c'est témoigner d'un haut standing moral et social, prouver que l'on fait partie de l'élite. Avoir « mauvaise conscience », c'est démontrer que l'on a une bonne conscience en parfait état de marche et, pour commencer, une conscience tout court. »
1968, c'est aussi l'année de l'assassinat de Martin Luther King à Memphis dans le Tennessee et Gary nous relate avec ses commentaires les émeutes sanglantes qui ont suivi ce drame. Gary déplore l'attitude de l'entourage de feu Luther King hormis celle de Coretta, son épouse. « La haine me prend. La vraie : celle du chien à la recherche d'une gorge, cette hargne qui me saisit chaque fois que j'assiste à la manifestation de la plus grande force spirituelle de tous les temps : la Bêtise. »
En mai 1968, Gary repart en France pour assister aux événements que l'on sait. Des événements qui le font sourire et qu'il commente avec un humour féroce allant jusqu'à la provocation comme toujours.
Sur la colonisation et l'islamisation de l'âme africaine, les Noirs africains ayant été jadis les premiers esclaves des Arabes Musulmans, Gary nous offre une belle réflexion avec cette phrase : « Rien de plus aberrant que de vouloir juger les siècles passés avec les yeux d'aujourd'hui. »
Toujours dans un style alerte Gary nous offre un album de souvenirs avec ses passions et ses convictions qu'il sait défendre souvent dans la provocation qui est sa forme de légitime défense préférée.
le sort de Batka revient comme un leitmotiv tout au long du récit et cette phrase en peu de mots résume le sentiment de Gary : « le seul endroit au monde où l'on peut rencontrer un homme digne de ce nom, c'est le regard d'un chien. »
Écrivain français, pilote de guerre durant la Seconde Guerre Mondiale et instructeur à l'école de Salon de Provence, diplomate de 1945 à 1961, auteur et réalisateur de films (Les oiseaux vont mourir au Pérou et Kill), Romain Gary est né en Russie. Il est arrivé à Nice avec sa mère en 1928, Nice où il a fait ses études avant de faire le droit à Paris. Fait commandeur de la Légion d'honneur, il fut le mari de la comédienne Jean Seberg (À bout de souffle avec Belmondo) de 1962 à 1970. Jean Seberg connut une vie tumultueuse de par son engagement politique pour faire entendre la voix des Noirs américains alors opprimés.
Jean s'est suicidée en 1979 à Paris.
Romain Gary écrivit entre deux missions durant la guerre « Éducation européenne », Prix des Critiques 1945. Plus tard, il obtint son premier Goncourt en 1956 avec « Les Racines du ciel » et une seconde fois, ce qui est un cas unique, avec « La vie devant soi » sous le pseudonyme secret de Émile Ajar. Au total, 26 romans, essais et souvenirs. Il s'est donné la mort en 1980.
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