La peur de la mort est la cendre du bonheur.
J'avais fait construire un mausolée pour un animal de la mer océane qui n'existait que dans mon imagination fiévreuse alors que j'avais vu de mes yeux miséricordieux vu les trois caravelles ancrées devant ma fenêtre,que j'avais dilapidé les fonds publics avec mon vice irresponsable d'acheter des instruments ingénieux et que j'avais même prétendu obtenir des astronomes qu'ils perturbent le système solaire pour être agréable à une reine de beauté qui n'avait existé que dans les visions de son délire,et que dans une crise de folie sénile j'avais donné l'ordre d'embarquer deux mille enfants sur une chaloupe chargée de ciment et qu'on avait ensuite dynamitée au large,maman,imaginez un peu,quels fils de putain...
On le découvrit dans cette position à la veille de son automne, quand le caddavre était en réalité celui de Patricio Aragones, et on le redécouvrit dans la même position bien des années plus tard à une époque si pleine d'incertitudes que personne ne pouvait identifier comme vraiment sien ce corps sénile rongé par des charognards et couvert de parasites du fond de la mer.
Il vit le brasier allumé sur la Place d’Armes pour brûler les portraits officiels et les lithos de calendrier qu’on trouvait partout et à toute heure depuis le début de son régime, et il vit passer son propre corps qu’on tirait et qui laissait sur le pavé une traînée de décorations et d’épaulettes, de boutons de dolman, d’effilochures de brocard, une passementerie d’agrafes, de glands de sabre, de jeux de cartes, et les dix soleils tristes de roi de l’univers, maman, regarde dans quel état ils m’ont mis, disait-il, en sentant sur sa propre chair l’ignominie des crachats et des pots de chambre de malades qu’on lui vidait dessus au passage du haut des balcons, horrifié à l’idée qu’il pourrait être dépecé et digéré par les chiens et les charognards au milieu des hurlements délirants et du tonnerre de la pyrotechnie pour ce carnaval de ma mort.
Vous verrez, disait-il, tout sera récupéré par les curés, les ricains et les riches, et bien entendu, tintin pour les pauvres, ils seront toujours baisés et si un jour la merde a quelque valeur, vous verrez, ils naîtront sans cul !