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Critique de Jackylebook



J'ai beaucoup aimé ce roman d'Adeline Fleury « le ciel en sa fureur ». Peut-être pourra-t-on me taxer, un peu, de chauvinisme, l'histoire se passe dans le département de la Manche, mon département de naissance. Toutefois cela me permet de mieux juger la performance de l'autrice, pour décrire les paysages d'une beauté sauvage du Cotentin et dépeindre le monde rural dans toute sa rusticité.

Ce livre n'est pas à mettre dans les mains d'esprits cartésiens, rationnels ou par trop citadins qui le trouveront au mieux farfelu au pire complétement débile. Bienvenue, dans le monde des contes et légendes, dans ce petit village entre mer et marais où règne une atmosphère glauque d'apocalypse. Je vous laisse juge : « L'enfant du pavillon numéro 13 se retourne, elle pousse un hurlement assourdissant. Des coassements gras lui répondent, recouvrant dans un vacarme plaintif tous les autres bruits de la nature. de gros crapauds bondissent des bosquets, des centaines de batraciens affolés et baveux, ils chargent les enfants qui hurlent de peur et se réfugient chez eux, les crapauds s'écrasent contre les portes et les baies vitrées. Des petites grenouilles brunes tombent du ciel. Ceux du lotissement ferment leurs volets bordeaux, ceux du lotissement sont terrorisés. le corps de l'enfant du pavillon 13 gît au milieu des feuillages, secoué de spasmes, couvert d'un liquide visqueux. L'assaut des crapauds ne dure qu'une dizaine de minutes, mais semble une éternité à ceux du lotissement. La mère épouvantée de la fille du pavillon numéro 13 n'arrive pas à déverrouiller la porte d'entrée, des morceaux de crapauds bloquent la clenche. Les pluies de crapauds annoncent l'apocalypse. Certains ont lu ça dans la bible. » Suivront d'autres signes tout aussi inquiétants, la naissance d'un veau albinos, un cheval retrouvé éventré, jusqu'au cadavre de la « Ferluche » un jeune homme simplet du village, retrouvé sous un tas de fumier.

Tout oppose les deux mondes qui cohabitent, ceux des citadins du lotissement, « nouveaux ruraux », à la petite vie bien proprette et aseptisée et le monde rural, bien moins ragoutant, mais beaucoup plus proche de la nature, qui voit dans les manifestations célestes des signes divins, combat entre le bien et le mal à l'image des gobelins (goubelins dans sa version normande) qui sont des elfes, esprits de la nature qui se métamorphosent en animaux familiers, ils sont facétieux mais plutôt bienveillants tant qu'ils sont choyés. Dans le cas contraire, le diable en fait ses marionnettes.

Au milieu de ces extrêmes Julia, la nouvelle vétérinaire, qui a appris le métier de son prédécesseur local le « Vieux » que les rhumatismes contraignent à l'inactivité, mari de la « Vieille » la rebouteuse, la magnétiseuse, la guérisseuse qui par simples appositions des mains soulage bien des maux et Stéphane, la maréchale-ferrante, qui a fui la ville après le décès brutal de son amour, Victoire, et proche désormais de Julia. Ces deux femmes aidées du « Potelé », Guillaume, un journaliste venu de Cherbourg, natif du village, vont essayer de trouver la clé de tous ces mystères.

Les soupçons se dirigent bien vite sur un enfant blond, le fils des Levavasseur de la ferme à vaches, petit corps et grosse tête aux traits vieillis attirant et repoussant à la fois, que l'on retrouve toujours sur les lieux des exactions. La « Vieille » jure que c'est un enfant-fée, comme son p'tit Jojo, son fils, qui a disparu il y a quinze ans. Toutefois, l'autrice nous sème le doute, quel est donc ce Géant, ce colosse qui semble commander aux animaux, pour l'instant guetteur mais en qui l'on sent monter la violence.

Vraiment, un excellent moment de lecture que ce « thriller à la normande » doublé d'un roman d'atmosphère, merveilleusement alimenté par une écriture à la sauvagerie poétique d'Adeline Fleury. Ces contes et légendes font l'histoire de nos terroirs, notre richesse collective et rien que pour cela ne méritent pas d'être galvaudés. Ah ! j'oubliais, je ne crois pas à grand-chose, mais papa a été victime de graves brûlures sur les bras et le corps et il n'a trouvé le soulagement qu'après avoir eu recours à une magnétiseuse. Croira qui voudra !

Remerciements à Lecteurs.com et aux Editions De l'Observatoire pour cette belle découverte.
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