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Critique de Lilmoon


J'invite chaque personne ayant aimé Les mémoires de Lady Trent ou La Communauté de l'anneau, notamment toute la partie sur la Comté avec le mode de vie des Hobbits (leur amour de l'herbe à pipe y compris), à laisser une chance au roman de Heather Fawcett, L'encyclopédie féerique d'Emily Wilde, que j'ai personnellement adoré.

Ce roman de fantasy prend la forme d'un journal de voyage se passant au début du XXème siècle, dans un monde similaire au nôtre, si ce n'est que les fées existent.

Ce dernier point est évidemment central puisque notre héroïne, Emily Wilde, est une universitaire spécialisée dans l'étude des fées qui cherche à compléter l'ouvrage de sa vie, une encyclopédie exhaustive du monde féerique.

Et ce soucis d'exhaustivité l'emmène vers une île comparable à l'Islande où elle espère découvrir des entités féeriques jamais étudiées auparavant, les Recluses.

J'ai plongé avec elle dans ces paysages aussi rudes que magnifiques, qu'elle ne cesse de décrire tout au long du livre avec un plume très imagée. Par exemple : « La forêt était silencieuse lorsque je me glissais sous les branchages, elle retenait son souffle comme la nature a l'étrange coutume de le faire après une chute de neige. ». La météo changeante, les plats inconnus, les comportements des autochtones : Emily Wilde, par ses mots, a su partager son dépaysement avec moi.

Par contre, il ne faut pas s'attendre à des descriptions très poussées des personnages. Emily Wilde s'intéresse aux fées et aux lieux où elles vivent. Mais les humains, très peu pour elle. Ils ne l'intéressent pas du tout et elle ne sait pas vraiment communiquer avec eux, commettant souvent des impairs et se retrouvant tout aussi souvent démuni face aux réactions de son entourage, elle-même fonctionnant plus avec sa tête qu'avec son coeur (et je ne peux pas lui en vouloir pour ça. Bien au contraire même : elle entre dans cette catégorie très réduite des personnages auxquels je me suis identifiée pendant ma lecture [avec Morwenna, du roman éponyme]).

Heureusement, son ami et collègue Bambleby, aussi fidèle qu'irritant, va rapidement s'incruster dans son expédition et lui apporter le soutien de son savoir-faire social inné. Il va également lui apporter ses railleries régulières et ses plaintes tout aussi récurrentes (car Bambleby est charmeur autant que charmant, mais aussi moqueur et très attaché son petit confort). Mais ceci n'est qu'un détail.

La dynamique entre Wilde et Bambleby est drôle et piquante. Leurs échanges sont savoureux. Toutefois, petit, léger, minuscule bémol : à partir de l'arrivée de Bambleby, les autres personnages deviennent plus discrets, comme éclipsés par la personnalité exubérante du britannique. J'aurais apprécié que Finn et son père ait un peu plus d'importance. Et j'espère que les étudiants de Bambleby vont bien, malgré ce qu'ils ont traversé.

Roman de style Academia oblige (light academia ou dark academia ? Je ne me positionnerais pas sur cette question), l'ouvrage regorge d'informations à propos du monde féerique. Cela dit, pour le côté scientifique, la dryadologie est au moins aussi proche des sciences naturelles que des études folkloriques, les connaissances sur les fées tenant autant de la récolte et de l'analyse de contes locaux que de l'étude de terrain. À la différence de Lady Trent, la professeure Wilde ne dissèque pas ses sujets, pas plus qu'elle n'étudie leurs excréments. Par contre, plusieurs légendes sont consignés dans ses carnets (d'ailleurs, je me demande si elles sont toutes inventées ou si elles sont issues d'histoires provenant de notre réalité – je vais certainement faire quelques recherches à ce sujet).

Présenté comme un roman de cosy fantasy féerique, je comprends que des personnes ait été désarçonnées, voire déçues. Effectivement, il y a du thé et des fées. Mais ce thé est bu dans une cabane rustique, en bordure d'un village isolé du monde, piégé entre une mer impitoyable et une montagne indifférente (à moins que ça ne soit l'inverse). Quant aux fées, il ne s'agit pas ici de petits êtres mignons et fragiles. Il s'agit de Créatures fascinantes et dangereuses telles qu'on les rencontre dans de nombreux contes traditionnels, aussi belles que cruelles, promptes à se sentir offensées et excessives dans leur vengeance. Des Créatures qui aiment se jouer des humains, leurs bénédictions pouvant se révéler le pire des maux et leurs malédictions pouvant dissimuler des trésors insoupçonnés, mais aussi des sortes de personnification de la Nature obéissant aux lois des mythes (ce qui crée un jeu littéraire sympa entre l'oeuvre et le lecteur, Emily Wilde s'appuyant sur les règles narratives des histoires traditionnelles pour interagir avec les fées).

De même, les lecteurs et lectrices se lançant dans le roman en espérant une romance risque de rester sur leur faim. Il y a effectivement une histoire d'amour (qui m'a d'ailleurs énormément touchée), mais elle n'est pas au centre du récit (l'intrigue étant centrée sur la compréhension du monde féerique local et de ses spécificités), un peu comme dans Les Fiancés de l'hiver.

J'ai donc l'impression que ce livre n'a pas été marketé de manière adéquate. Autre problème que j'impute à l'éditeur, le texte comporte quelques coquilles et quelques maladresses de traduction, un problème récurrent des éditions De Saxus, Sabran et consorts (bien qu'il y ait eu une amélioration notable au fur et à mesure des années), qui semblent parfois travailler plus sur l'apparence de leurs ouvrages que sur leurs contenus.
Lien : https://vaisseaulivres.wordp..
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