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Critique de Calimero29


Je gardais un souvenir marquant de "Une bête au paradis" et je ne pouvais qu'être attirée par le dernier roman de Cécile Coulon. Ce fut d'abord la rencontre avec la magnifique couverture avec ses arbres décharnés qui s'élèvent dans le ciel rouge sang et enserrent une habitation isolée; on devine que ce roman ne sera pas un long fleuve tranquille.
Nous voilà projetés au XIXème siècle dans un domaine isolé du Jura profond. Candre, 26 ans, jeune veuf après six mois de mariage, riche propriétaire terrien, très pieux, épouse Aimée, 18 ans , qui sort de la maison de son père pour entrer dans celle de son mari, naïve, ignorante de la vie. C'est un mariage arrangé, sans amour et sans désir. Elle se retrouve seule dans un immense manoir, avec comme seule compagnie, son mari, distant, souvent absent et Henria, la domestique qui a élevé Candre comme son fils à la mort de sa mère. Elle sent bien qu'on lui cache des secrets. Elle a l'impression d'étouffer. Conscient que sa femme est malheureuse, Candre lui fait donner des cours de musique par une jeune professeur de Genève, Emeline. C'est cette rencontre qui va déclencher chez Aimée, la prise de conscience de son corps par la musique, le besoin de savoir, de comprendre avec des conséquences terribles.
Le rythme lent du début sied bien à la vie dans le domaine où les jours s'écoulent semblables les uns aux autres, scandés par le travail dans les bois, le soin des chevaux, l'entretien du domaine, la tenue de la maison. Puis au fur et à mesure, nous assistons à l'éveil d'une très jeune fille à la vie, au désir et le rythme s'accélère pour aller crescendo jusqu'à l'éclatement de la vérité comme une mélodie pianissimo qui enfle pour devenir allegro.
Comme dans "Une bête au paradis", la nature joue un rôle très important; Vue par Aimée, elle est oppressante, menaçante; elle semble se refermer sur le manoir et sur elle, l'étouffant. Les descriptions sont magnifiques et donnent l'impression de se mouvoir à côté d'Aimée, de se battre contre les ronces.
Cécile Coulon a l'art de nous transporter véritablement au XIXème siècle, non seulement par les scènes de la vie quotidienne, les rapports policés entre les personnages, chacun se comportant comme il sied à sa condition mais également par le style délicieusement désuet qui imprègne tout le roman; je ne résiste pas à l'envie de citer deux exemples parmi bien d'autres : "vous êtes de bonne famille, je suis de bonne âme" ou "à votre âge, madame, cela signifie que vous portez".
Cécile Coulon semble s'être amusée à glisser, dans son roman, de nombreuses références littéraires ( "Rebecca" de Daphné du Maurier, "L'amant de Lady Chatterley" de D.H.Lawrence, les "Hauts de Hurlevent" d'Emily Brontë...) pour mieux s'en démarquer avec toute la finesse qui la caractérise.
Comme le précédent, ce roman est sobrement puissant, tout en tension, au style magnifique et poétique.
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