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Critique de frandj


frandj
06 décembre 2021
Il y a quelque temps, j'ai eu l'occasion de découvrir des poètes chinois, par une grande anthologie: l'introduction de ce livre m'avait donné des éléments pour comprendre ces oeuvres. Mais, désirant aller plus loin, j'ai emprunté le présent ouvrage signé par François Cheng, bien connu pour sa double culture et médiatisé dans l'audiovisuel français. Cet homme, que je savais très remarquable, fait preuve ici d'une érudition et d'une subtilité qui m'ont impressionné. On comprend qu'il a beaucoup réfléchi à ces questions.

F. Cheng nous signale d'abord que la langue chinoise ignore le genre et le pluriel; elle ne connait ni la déclinaison, ni la conjugaison. le chinois distingue deux types de "mots": "pleins" (substantifs, verbes d'action, verbes de qualité) et "vides" (c'est-à-dire des mots-outils, comme les pronoms personnels, les adverbes, les prépositions, etc). Par ailleurs le chinois est, phonétiquement, une langue dite à "tons" (on en distingue quatre: plat, montant, partant, rentrant), ce qui la distingue radicalement des langues indo-européennes.

Dans leurs poésies les auteurs chinois, notamment ceux de l'époque Tang, ont eu tendance à supprimer une partie des mots "vides", à omettre les pronoms personnels et à remplacer des mots "pleins" par des mots "vides". C'est évidemment volontaire, l'intention du poète étant directement liée à une composante essentielle de sa culture (par exemple: le taoïsme) Les poètes utilisent aussi la rime, mais aussi ils peuvent imprimer un rythme par les séquences codifiées des tons dans leurs "mots".

Ainsi, la traduction en français, déjà difficile en raison des particularités de la prose chinoise rappelées ci-dessus, est encore plus délicate dans le cas de la poésie. le traducteur doit interpréter finement le mot-à-mot du chinois pour le rendre bien intelligible, tout en conservant le rythme et l'ambiguïté (voulue) du poème original. C'est une gageure ! L'explication de texte exige donc une délicatesse qui surpasse les études que l'on peut faire sur la poésie occidentale. Un exemple: ces quelques vers de Li Bo.
- mot-à-mot:
Fleurs milieu / un pichet vin
Seul boire / ne pas avoir compagnie
Lever coupe / inviter claire lune
Face à ombre / former trois personnes
- interprété:
Parmi les fleurs, un pichet de vin
Seul à boire sans un compagnon,
Levant ma coupe, je salue la lune:
Avec mon ombre, nous sommes trois
En fait, toutes les finesses sous-entendues dans ce poème n'apparaissent pas dans la traduction donnée ci-dessus. Il serait possible d'en produire une version plus affinée

De toutes façons, les références à l'histoire et à culture chinoises, très nombreuses, échappent au lecteur occidental, à moins d'être un sinologue. J'avouerai qu'une bonne partie de l'exposé de F. Cheng m'a échappé; mais j'en ai compris l'esprit. J'ai ensuite lu un (grand) échantillon des poésies présentées dans la seconde partie du livre. Elles ont toutes été écrites sous la dynastie Tang c'est-à-dire aux VIIème-IXème siècles de notre ère.
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