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Critique de 5Arabella


Publiée en 1615 avec sept autres pièces plus quelques Intermèdes, sans doute qui n'ont pu être jouées, le ruffian bienheureux est une des pièces de Cervantes parmi les plus citées. La date de l'écriture demeure incertaine. L'auteur peut s'être inspiré de textes parus à la toute fin du XVIe siècle, l'un rédigé à Mexico dans un couvent dominicain et l'autre à Salamanque et à Séville. Il s'agit d'une histoire édifiante, d'un malandrin converti, rentré dans les ordres et donnant un exemple de piété remarquable et devenant saint.

La pièce est composée de deux parties, l'une qui illustre la vie menée par Lugo avant sa conversion, entre larcins, coups de force, fréquentation de prostituées et excès divers. A l'issue d'un pari, il décide de se convertir. La deuxième et troisième journées se passent à Mexico, où il est moine dominicain. Nous le suivons dans sa vie pieuse. Il est appelé au chevet d'une femme qui va mourir, Ana. Elle est persuadé d'être une si grande pécheresse, que se confesser ne sert à rien, car Dieu ne pourra lui pardonner. Lugo devenu le père De La Croix essaie de la persuader, puis lui propose de prendre tous ses pêchés sur lui, ce qui permet à Ana de mourir apaisée après s'être repentie et confessée. La troisième journée est centrée sur la mort édifiante du père, sa résistance aux démons qui viennent le tenter, qui laisse entrevoir sa sainteté.

La pièce délivre un message qui est qu'un pêcheur, quelle qu'ait été sa vie, peut toujours être pardonné. Lugo s'est converti en un seul moment, et le repentir d'Ana à la dernière heure, lui permet de ne pas être damnée. C'est la parabole des ouvriers de la dernière heure, c'est aussi une illustration de la miséricorde divine. C'est également une mise en cause de la vision protestante rigoureuse de la grâce, accordée ou non, sans que l'homme y puisse quoi que ce soit. Cervantes y oppose une possibilité de salut à condition d'un repentir sincère qui est toujours possible et qui dépend de l'homme.

Cela peut sembler déconcertant, mais c'est plutôt réussi. La première journée accumule des épisodes réalistes de la vie des petits délinquants, des prostituées, de tout ce petit monde qui tente de survivre dans un monde dur, sans pour autant abandonner humour et dérision. Les deux journées suivantes sont d'une tonalité très différente, même si la truculence n'en est pas complètement absente, même les moines ont leurs égarements. La sainteté surgit du pêché et des faiblesses des hommes, là où l'on ne l'attend pas. C'est sans doute très difficile à jouer sur une scène, à cause du nombre de personnages et des scènes très différentes. On comprend très bien en lisant la pièce pourquoi Lope de Vega n'a eu aucun mal à surclasser Cervantes comme auteur à succès sur les théâtres. Mais le texte de Cervantes est quand même passionnant, à cause de son caractère atypique, original, pas formaté.
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