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Critique de Fleitour


Comme une remontée à ciel ouvert d'une oeuvre d'art que l'on croyait perdue, Anne et Claire Berest, exhume des chefs d'oeuvres oubliés, un passé explosif profondément enfouis, et grimpent à la rencontre de deux fantômes de notre histoire, deux figures des grandes révolutions picturales du XX ème siècle, effacées de nos références, une sorte de malédiction cachée mise à nue dans ce long témoignage à deux voix, "Gabriëlle".


Une mise à l'index familial, a soustrait Anne et Claire, à la personnalité de leurs grands parents, à la connaissance de leur filiation, celle-ci devant rester secrète, être la petite fille d'un grand père qui se suicide, et découvrir que son arrière grand père a été une grande figure de la peinture et des arts, n'est pas une généalogie ordinaire. le fils de Picabia, Vincente est aussi le fils qui a toujours été délaissé par sa mère, Gabriëlle. qui ne s'est jamais intéressé à ses 4 enfants.


Elles ont éludé le mystère qui entourait ce grand-père maternel, Vincente, l'enfant non désiré, meurt à 27 ans d'une overdose, laissant une enfant de 4 ans. Puis en remontant vers Picabia, relever que lui aussi s'est retrouvé orphelin à l'age de 7 ans, une blessure que l'absence de mère va profondément perturber.


Mais c'est l'itinéraire assez diabolique de Gabriële que les deux sœurs vont investir, pour la mettre à nue, et partager sa vie jusqu'à sa mort dans un dénouement insensé, pour celle qui bradera 17 toiles de Picasso. Sa fidélité à Picabia avec lequel elle se marie ira jusqu'à écarter Vincente de la tombe familiale en1953, pour y déposer le prince de ses rêves, alors qu'elle en est séparé depuis de si longues années.


Puisqu'il Il faut parler peinture, c'est la fusion de l'énergie de Picabia et de l'imagination de Gabriëlle qui va donner vie à leurs passions artistiques du moins pour la période allant de 1908 à 1930. C'est en 1909 que Picabia signe le premier tableau abstrait "Caoutchouc". C'est Picabia qui va lancer à New York les peintres français de l'art nouveau. Picabia, multiplie les trouvailles, les innovations, les chef d’œuvres.


Devenant le chef de file du mouvement surréaliste, puis du Dadaïsme, il multiple les œuvres les plus originales, ou singulières. C'est Marcel Duchamp qui le suit. La première œuvre de Marcel,"Nu descendant un escalier", refusé à Paris fait un triomphe à New York, pendant des semaines les passionnés se bousculent.
Avec Guillaume Apollinaire ils vont dresser devant eux un boulevard, une rétrospective, un enthousiasme, une doctrine derrière lesquels tant d'artistes puiseront.


Mais par quelle magie cette éclosion s'est-elle mise à flamber ?

C'est Gabriëlle l'inspiratrice, la musicienne qui veut un art au dessus de tous les arts, une démarche libérée de toutes les contraintes. Gabriëlle qui va dicter à Picabia ce qu'il faut peindre, à Marcel Duchamp toutes les folies et toutes les audaces. Marcel qui apprend vite, livre un bidet à un concours d'art moderne, déclenchant un immense scandale et l'hilarité générale. Des scandales qui avec Gabriëlle, devenaient possible et qui bientôt s'organiseront.

Dans leur sillage tant de maîtres sont apparus, Miro derrière Picabia, Magritte et Andy Warol derrière Marcel Duchamp.

Maîtrisant les langues utiles à la promotion des peintres, Gabriêlle dessine une des figures féminines, les plus extravagantes des années d'après guerre, car rien ne l'arrête, rien pour elle ne peut être sacrifié à la liberté pas même ses propres enfants. Elle fut l'Égérie de Picabia, mais aussi de Marcel Duchamp, de Igor Stravinsky...

Avec Apollinaire ils perdent un ami mais plus encore un défenseur. Son absence va peser durablement sur la notoriété du trio, Gabriëlle Buffet aux bras de ses hommes. C'est une sorte de malédiction qui va ternir l'image  de Picabia. Lui qui a peint près de 100 toiles impressionnistes, n'est pas dans les livres sur les impressionniste, Picasso y figure. Aujourd'hui sa place est floue, il est souvent absent des rétrospectives sur la peinture moderne, on cite Miro ou Chirico pas Picabia. Aucun membre de sa famille ne s'est impliqué dans la promotion de Picabia, idem pour authentifier l'étendue de son œuvre.


Il faudra un jour penser à réunir, enfin Duchamp et Picabia dans un unique hommage, une grande Expo au grand palais et par ricochet convoquer Gabriëlle pour redessiner ces deux géants de la peinture, sous le charme de leur muse Gabriëlle Buffet.

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