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Citation de enkidu_


Avec un témoignage aussi incontournable que celui de Dizzy, le « roi du bebop » en personne, personne en tout cas ne peut passer à côté du phénomène. La liste des musiciens afro-américains convertis à l’islam est assez édifiante pour convaincre d’une connivence véritable entre la création d’un jazz nouveau et provocant, et l’émergence d’une religion jusque-là quasi –absente du territoire.
(…)
Le be-bop n’est pas l’enfant du jazz, il est ce que le jazz a toujours été. En pouvant à tout moment, face à la police ou aux médias, montrer qu’il est maître de son destin, y compris de sa part la plus intime qu’est son nom, le bopper converti à l’islam démontre l’autonomie totale de sa démarche, et la haute responsabilité de son ambition : « Je ne suis pas un descendant d’esclave, je suis l’adepte du Prophète qui ne fait pas de distinction de race et je suis l’acteur d’un mouvement intellectuel qui te dépasse et te dépassera toujours. » Ce faisant, il s’inscrit dans la lignée des mouvements émancipateurs passés, en les réactualisant. C’est exactement le même mouvement qui animera les free jazzmen qui, vingt ans plus tard, prendront des positions spirituelles plus initiatiques, mystiques et métaphysiques.

De nombreux observateurs ont vu alors dans ce phénomène de conversion massive des musiciens modernes la preuve de la radicalisation de la pensée noire américaine, et le succès des idées nationalistes qui de développement à l’époque. Les boppers musulmans ne voudraient plus de contact avec les Blancs, et prôneraient une séparation radicale des races. La dénomination « Black Muslims » devient alors la norme pour désigner ce mouvement, d’autant qu’il fait écho à celui des « Black Panthers » et semble confirmer une proximité entre les connotation religieuses de l’un et les affirmations politiques de l’autre. N’y a-t-il pas de nombreux membres du Black Panther Party qui se définissent aussi comme Black Muslims ? Certains de ces observateurs vont jusqu’à penser que ce mouvement de conversion marginalise plus encore la communauté du be-bop : « Déjà rejetée dans une marginalité évidente, la communauté ‘’bop’’ allait accomplir un pas de plus vers l’isolement. Pour se démarquer aussi bien des Blancs que de la bourgeoisie noire assoiffée de respectabilité, nombre de ses membres se convertirent à l’islam. » (pp. 125-129)
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