AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de Danieljean


L' AÏEUL est assis sous le vieux citronnier de la cour. Il a une ardoise sur les genoux et tient un crayon. Par la porte ouverte, il surveille la montagne, au loin, l'air soucieux. La lumière est douce, aujourd'hui, tamisée par le brouillard. L'air est humide, chargée de gouttes de rosée, un temps brumeux. La pluie se prépare à tomber sur la terre. Il fait froid.

"Voilà l'hiver ..." murmura le vieillard en soupirant.

Il pensait aux femmes et aux enfants chassés de leurs maisons par les Turcs et entassés dans les cavernes, sans pain, sans vêtements et sans hommes pour les protéger. Il pensait à la Crête qui se révoltait à nouveau, essayant de briser les chaînes de l'esclavage et ne sachant de quel côté tendre les bras.

" Les Francs, ces chiens de Francs n'ont pas de coeur, la pauvre Grèce n'a pas de force, les Crétois sont trop peu nombreux, ils n'ont pas assez de fusils et encore moins de pain. Comment résister, dans ces conditions ? Et voilà le bon Dieu avec son hiver ; il lutte contre nous, lui aussi, avec les Turcs... Pauvre Crète, tu n'as pas encore fini de souffrir ", murmura le vieillard en fermant les yeux.

La Crète tout entière s'étendait sur son front, d'une tempe à l'autre, avec ses montagnes, ses plaines et ses rivages, avec ses oliviers, ses caroubiers et ses vignes, avec ses villages, ses enfants et leur sang ... Il en avait vu des révolutions ! Combien de fois les maisons avaient-elles été brûlées, les récoltes saccagées, les femmes violées et torturées !

Combien d'hommes étaient morts ! Pourtant, Dieu refusait de tourner son regard vers la Crète. Lui, le Capétan Sifakas, un seul homme, une seule vie, avait vu la Crète se soulever sept fois, se couvrir de sang et retomber de nouveau sous le joug ...

_ La justice, ça n'existe pas sur cette terre, la pitié non plus. Et Dieu ? Existe-t-il ? cria le vieillard en frappant du point sur l'ardoise. Il ne nous entend pas. Il est sourd, ma foi, ou bien alors incapable de pitié !

Mais à ce moment, Thrassaki, son petit-fils, sortit de la maison et le visage de l'aieul s'apaisa, brusquement, comme si Dieu lui répondait : " Tout finira bien, ne crie pas, vieillard, voilà ton petit-fils ! "

Thrassaki était bronzé par le soleil ; en quelques mois, la vie de montagne l'avait fait grandir et forcir. Il ressemblait de plus en plus à son père _ yeux, sourcils, bouche, opiniâtreté. Il s'approcha de son grand-père, lui prit l'ardoise des mains et le regarda en fronçant les sourcils
Commenter  J’apprécie          10





Ont apprécié cette citation (1)voir plus




{* *}