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Citation de enkidu_


La déconstruction a fêté un bal des adieux à tout ce à quoi l’homme s’était identifié dans son histoire. L’adieu à l’âme ; l’adieu au corps ; l’adieu au sujet ; l’adieu à l’œuvre ; l’adieu au monde ; l’adieu au sens ; l’adieu à Dieu, enfin, qui sonne le glas des meurtriers. L’adieu à ce qui faisait la substance de l’humanité, cristallisée dans son idée, est en même temps l’adieu à l’humanisme et, en son cœur, l’adieu à la condition humaine. Rien ne semble résister au travail de la taupe qui a sapé les principes sur lesquels reposait la civilisation. Descartes rappelait que la ruine des fondements signe en même temps la ruine de l’édifice. Ces fondements, qui provenaient de différentes sources, justifiaient l’idée d’une conception architectonique de la culture. Forgeant son existence passagère au contact de créations durables, l’homme était en mesure d’habiter un monde fugitif éclairé par des œuvres dotées de sens. Le monde cassé de Kafka ou la terre dévastée de Kundera n’offrent plus à l’humanité le foyer qui est le sien (...) la Nouvelle Idéologie dominante de Shmuel Trigano souligne de son côté la façon dont le postmodernisme interdit à l’homme de trouver un sens à sa condition. Devenu débris idéologique après avoir été concept métaphysique, il a investi les champs du savoir et du pouvoir en déconstruisant les principes qui lui procuraient son humanité. « Il n’y a plus de fondement au discours ni à la réalité puisque le réel est évanescent ; il n’y a plus de vérités ni de valeurs ultimes ; il n’y a plus aucune synthèse ni vision d’ensemble possible ; il n’y a plus de cohérence globale ni systémique entre les éléments de la réalité » (2012, 26). Si la dissémination de l’être devient la règle de l’histoire, en l’absence d’une architectonique qui articulerait l’homme, selon le vœu de Kant, au monde et à Dieu, il ne reste qu’à saluer la mort de l’homme ou à préparer son extinction. Sans un principe qui éclaire l’humanité, comme la lueur d’une étoile appelle le regard, l’homme ne perçoit plus sur une terre dévastée que le désastre de sa condition.

Qu’est-ce qu’un homme révolté ? demandait Camus. Un homme qui dit non à ce qui transgresse les frontières de l’humain et qui dit oui à la part précieuse de lui-même. Qu’est-ce qu’un homme dévasté ? Le négatif du précédent. Un homme qui ne dit ni oui ni non à cette part précieuse dont il sent la présence. En récusant en lui le centre de son humanité, il déserte tout ce à quoi l’homme peut s’identifier, c’est-à-dire la liberté qu’il partage avec les hommes du passé, du présent et de l’avenir. C’est cette désertion, et la dévastation qui en résulte, qui fait de lui une rupture dans la chaîne de l’humanité. (conclusion)
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